Chapitre 7

1496 Words
Caroline - Ci vediamo settimana prossima (à la semaine prochaine), lança Monsieur Bianchi, le professeur d'anatomie pathologique en sortant de la salle. Je pris mes effets personnels et les mis à l’intérieur de mon sac à dos. - Tu dois bosser aujourd'hui ? demanda Alessandro, mon camarade de classe et ami. - Oui, je commence d'ici une heure, ripostai-je en regardant ma montre. Il était en effet 17 h et je devais prendre le service dans un fast-food de la place à 18 h. - As-tu besoin d'un coup de main pour transporter tes affaires ? demanda Alessandro. - Non Alessandro, je t'en remercie. Je saurais me débrouiller, répondis-je avec un léger sourire aux lèvres. Tu as déjà assez fait pour moi. - Mais non, ce n'est vraiment pas un problème et en plus, l'appartement de ma grand-mère devait être remis en location de toute façon, que ce soit toi ou quelqu'un d'autre, cela ne change pas grand-chose. J'eus envie d'éclater de rire à ces propos. Il n'avait pas la moindre idée de ce que cela représentait pour un étranger, de surcroit noir, sans bulletin de paie consistant, sans famille pour faire office de garant, de trouver un logement de nos jours. J'étais une jeune camerounaise de 27 ans, arrivée en Italie il y a cinq ans de cela pour entreprendre des études en médecine. Je n'avais pas de famille ici, juste quelques amis. Je logeais dans un appartement avec deux autres étudiantes camerounaises, mais malheureusement pour nous, le propriétaire nous avait demandé de libérer son appartement, nous accordant un délai de trois mois pour cela. Il était fatigué des tracasseries que représentait la location et avait décidé de le vendre. Je m'étais ainsi retrouvée dans une position vraiment inconfortable. J'avais commencé à éplucher les annonces et quand j'appelais au téléphone, certains me raccrochaient au nez dès qu'ils percevaient mon accent étranger. D'autres me donnaient des rendez-vous et quand je m'y rendais, l'appartement avait mystérieusement été loué dans la nuit. Je commençais sérieusement à désespérer. Mes colocataires avaient décidé de s'installer chez leur copain en attendant de trouver autre chose. Au détour d'une conversation avec Alessandro, je lui avais fait part de mon problème de logement. Il m'avait parlé de cet appartement de sa grand-mère qui avait récemment été libéré. - C'est un petit appartement, je te préviens, chambre, cuisine américaine et petite toilette, m'avait dit Alessandro. Ah, j'oubliais, il y a aussi un tout petit balcon. - Alessandro, c'est plus que suffisant pour moi. Que demande ta grand-mère comme loyer ? avais-je interrogé Alessandro. - Ne t'inquiète pas pour ça, j'en parle avec elle et je te reviens. Nous étions ensuite allés visiter l'appartement en question et il me plaisait bien, disons que je n’avais pas non plus trop le choix. Alessandro m'avait informé quelques jours plus tard que sa grand-mère demandait 400 euros pour le loyer. C'était beaucoup plus que ce que je payais avec les filles. J'occupais une chambre double et je payais 220 euros le mois, là, c'était pratiquement le double qu'il me demandait. Mais je devais admettre que le prix était bas par rapport à la moyenne et surtout pour la zone, ce n'était pas très loin de la fac. D'un autre côté, je ressentais le besoin d'avoir mon espace à moi. Je m'entendais assez bien avec ma colocataire, mais ce n'était pas toujours facile de partager la chambre avec quelqu'un d'autre. Je touchais près de 900 euros chaque mois et j'y laisserais 400 euros seulement pour le loyer, entre ma petite voiture et mes frais scolaires, j'arriverais de justesse à chaque fin de mois, si j'y arrivais ! - Ça me va, avais-je d'une voix décisive à Alessandro. C'est bon, je le prends. - D'accord, je te confirme tout d'ici demain, conclut Alessandro avec un large sourire. Tu sais, je n'habite pas très loin de là, nous aurions l'occasion de nous voir plus souvent. Bah voilà la raison de ma réticence à accepter la proposition d'Alessandro. Je savais au fond de moi qu'il avait le béguin pour moi, mais je faisais semblant de ne pas le remarquer. De son côté, il n'osait se déclarer, ce qui m'arrangeait. - T'es sûre de n'avoir vraiment pas besoin d'un coup de main ? insista Alessandro. - T'inquiète, je devrais y arriver. J'ai pris mon congé ce week-end au boulot, je vais en profiter pour transporter mes affaires, déjà que je n'ai pas grand-chose. L'appartement était déjà meublé quand nous y étions entrés. - C'est cool, ici aussi, tu as déjà tout le nécessaire comme tu as pu le constater, même si c'est assez minimal, répondit Alessandro. - C'est parfait ainsi, répondis-je avec un large sourire. J'étais tellement soulagée d'avoir enfin pu trouver un logement. - Ale, je dois te laisser, je risque d'arriver en retard au boulot, dis-je en me levant précipitamment. - Je ne sais pas comment tu fais, s’exclama Alessandro. J'y arriverais jamais moi ! - La nécessité mon cher, lui répondis-je en riant. Alessandro vivait chez ses parents qui le prenaient totalement en charge. Il avait de la peine à comprendre comment je faisais pour tout gérer : maison, études et boulot. Je lui fis une bise rapide et m'éloignai rapidement vers la sortie de l'amphi. Je comptais emménager ce weekend et l'inviter à dîner le week-end prochain pour le remercier. Il me sauvait vraiment la mise. Je m'installai dans ma petite voiture et mis le moteur en marche. J’en avais pour un quart d’heure de trajet. Comme à mon habitude durant mes moments vides, je lançai l’appel vers le numéro de maman. - Allô maman, dis-je dès qu’elle décrocha. - Allô ma fille, ça va ? - Oui maman ça va. Devine quoi maman ? m’écriai-je d’une voix joyeuse. J’ai enfin trouvé un logement. - Merci mon Dieu, mon éternel mon roi. Je n'ai pas arrêté de prier afin que le Seigneur ne te trouve un toit. Dieu est grand. Maman poursuivit un long moment avec une série de bénédictions, tant en français qu’en dialecte. - Amen maman, amen. Je lui racontai que je comptais aménager ce week-end et la conversation dévia ensuite sur les petits potins du quartier. - Maman, je vais te laisser, je suis à peine arrivée au boulot. J’ai tout juste cinq minutes pour enfiler rapidement mon uniforme et commencer le service. - D’accord ma fille, bon boulot et sois prudente ce soir quand tu rentres à la maison. - Sans faute maman, bisous. - Bisous mon ange, répondit maman. Je raccrochai finalement et me précipitai à l’intérieur des vestiaires. Cela m’avait fait du bien de parler à maman. Elle me manquait terriblement et cela faisait bien cinq ans que nous ne nous étions plus vues, c’est-à-dire, depuis mon arrivée en Italie. Ces appels ou vidéo appels quotidiens ne me suffisaient plus, j’avais besoin de la voir et de la serrer dans mes bras. J’étais née et avais grandi à Bagangté, une ville de l’ouest Cameroun. J’étais orpheline de père depuis mon plus bas âge. En réalité, mon père, je ne l’ai jamais connu. Il était décédé quelques mois après ma naissance. J’avais été élevée par ma mère qui s’était toujours sacrifiée pour que mon frère Liam et moi ne manquions jamais de rien. Nous avions une relation si spéciale tous les trois. En effet, nous avions dû nous serrer les coudes après le décès de papa et le rejet de la famille de ce dernier qui n’avait jamais toléré ma mère pour des raisons tribales. J’avais espoir de les voir d’ici quelques mois. En effet, cela faisait exactement un mois que je cherchais un vol à prix abordable pour le Cameroun et les prix proposés étaient tous hors portée. Il fallait aussi admettre que j’avais un budget extrêmement restreint. Je ressentais fortement le besoin de retourner ne serait-ce que pour quelques jours sur ma terre natale et j'espérais vraiment que cela serait possible. Je croisais les doigts en tout cas. Avec le mariage de ma cousine et amie Gabrielle, j’espérais saisir l’occasion de faire une pierre deux coups, rendre visite à ma famille et assister au mariage de Gabrielle. Le problème était que ma cousine avait décidé de se marier pendant la semaine de l'assomption, c'est-à-dire, la semaine du 15 août, du coup, les billets d'avion étaient extrêmement chers. Je secouai énergétiquement ma tête pour me libérer de mes différents problèmes, au moins celui du logement avait été résolu, pensai-je avec soulagement. J’avais besoin d’être concentrée durant mes heures de service. Ce travail représentait mon gagne-pain quotidien et je me devais de le faire scrupuleusement malgré l'énorme fatigue que je ressentais. Je finis le service aux environs de 23 h30 et arrivai à la maison un peu avant minuit. J’avais déjà commencé à empaqueter mes effets, ce qui me prenait énormément de temps et d'énergie, d’où l’extrême fatigue que je ressentais. Je pris tout de même la peine de boucler certains cartons avant de prendre une douche et plonger immédiatement dans un sommeil réparateur.
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