Chapitre 1
Tiziana
- Allô chéri, je sonne avec insistance depuis près de cinq minutes, mais apparemment, t'es absent, dis-je à Giorgio du téléphone pendant que j’appuyais une fois de plus sur la sonnerie de son appartement.
- Désolé bébé, je suis sorti précipitamment tout à l’heure pour acheter du sel au supermarché, je me suis rendu compte à la dernière minute que je n'en avais pas, répondit Giorgio.
- Sans problème bébé, je t’attends, le rassurai-je avec le sourire aux lèvres.
Je raccrochai en m’adossant contre la porte de l’appartement de Giorgio.
Je me sentais tellement fatiguée que je décidai de m’asseoir à même le sol pour l’attendre.
J’étais en couple avec Giorgio depuis près de trois ans, c'est-à-dire depuis mon arrivée dans le nord de l'Italie, plus précieusement à Brescia. Notre relation évoluait tant bien que mal. Elle avait comme toute relation ses hauts et ses bas, mais elle suivait tout de même son cours.
J'étais perdue dans mes pensées quand des bruits de pas attirèrent mon attention. Je vis Giorgio qui montait les marches à grande vitesse et me levai pour attendre qu'il arrive à ma hauteur.
- Bonjour bébé, désolé encore, s'excusa-t-il en me rejoignant sur le palier.
Il me prit un bref moment dans ses bras et nous échangeâmes un long b****r.
- Ce n'est pas bien grave chéri, lui répondis-je après qu'il eut relâché mes lèvres.
Il ouvrit enfin la porte de son appartement et m'invita à y entrer. Il se saisit ensuite de ma petite valise et me suivit à l'intérieur de l'appartement.
Nous étions samedi matin et cette valise contenait les vêtements nécessaires pour notre sortie de ce soir. Nous avions prévu de passer la soirée avec des amis à lui.
- C'est quoi le programme de ce soir ? demandai-je en me laissant tomber lourdement sur le divan au salon.
- Je ne sais pas trop. Les potes parlaient de se faire un resto et de poursuivre en boîte de nuit, répondit Giorgio en s'asseyant près de moi et en m'attirant contre lui.
Je me laissai simplement aller à sa douce étreinte.
- Pas trop fatiguée ? demanda Giorgio avec sollicitude. Tu pourras tenir le coup ce soir ?
- Je suis morte de fatigue, je l'avoue, soupirai-je en m'étirant. Je pensais me reposer un peu avant de la sortie de ce soir.
- D'accord chérie, répliqua Giorgio en posant un bref b****r sur ma tempe. Tu restes là et tu ne bouges pas, je pense à tout. Je pensais faire de la pasta al pesto (une spécialité génoise, pâtes avec sauce verte faite à base de basilic). Tu pourrais manger vite fait et te reposer ensuite, poursuivit Giorgio d'une voix douce.
Je m'installai confortablement sur le divan pendant que mon homme se rendait à la cuisine. Mes pensées furent immédiatement envahies par ma nuit de garde. Elle n'avait vraiment pas été de tout repos.
J'exerçais le plus beau métier au monde. Assister des femmes à mettre au monde les princes et princesses de leur vie me procurait une énorme satisfaction chaque jour. L'euphorie d'une famille dans l'attente de leur progéniture pouvait parfois se transformer en véritable drame, mort du parent ou de l'enfant, mais heureusement, cela n'arrivait que très rarement.
Nous avions assisté cette nuit à un accouchement assez difficile. Il s'agissait d'une grossesse gémellaire qui s'est ensuite compliquée par une hémorragie massive de la maman. Heureusement, l'équipe présente en salle avait su gérer la situation avec brio et nous avions ainsi évité de justesse un drame.
- Hé bébé, viens, c'est prêt, me secoua gentiment Giorgio.
Je réalisai à cet instant que je m'étais assoupie. La fatigue avait vraiment eu raison de moi. Je me redressai péniblement et me frottai les yeux en regardant Giorgio d'un air égaré.
- Désolé de te réveiller, je vois bien que tu es morte de fatigue. Il faut que tu manges un morceau, tu pourras ensuite te reposer, murmura Giorgio en me faisant un b****r sur le front.
- Merci chéri, t'es un ange, lui répondis-je en le serrant contre moi.
C'étaient dans ces moments que je réalisais la chance que j'avais de l'avoir dans ma vie.
Je me levai et pris la main qu'il me tendait. Giorgio me guida à la cuisine en me tenant tendrement par la main. Je m'aperçus que la table était déjà dressée et n'attendait que nous.
- La nuit a été difficile ? demanda Giorgio avec sollicitude.
- Tu parles chéri, nous n'avons pu fermer l'œil de toute la nuit, même pas eu un petit moment de répit.
Les nuits de garde étaient généralement pénibles, mais il nous arrivait tout de même d'avoir un petit instant pour un café ou pour une clope, pour qui fumait, mais cette nuit avait été particulièrement stressante.
Je lui racontai ma nuit de garde entre deux bouchées pendant qu'il me racontait sa journée particulièrement prenante au boulot.
À seulement quarante-deux ans, Giorgio occupait le poste de vice-directeur dans une grande banque de la place. Malgré son poste de responsabilité, Giorgio trouvait toujours du temps pour moi et nous passions difficilement une journée sans nous voir, mais cela au prix d'énormes sacrifices.
- Ça ne te fait flipper quand tu vois tout cet argent ? lui demandai-je.
- Au début oui, mais heureusement, avec le temps, les transferts d'argent se font généralement de manière électronique. Mais bébé, ce pays regorge de riches ! s'exclama Giorgio. Nous avons des clients avec des sommes folles sur leur compte, mais à les voir, tu ne te l'imaginerais jamais.
- Je serais tentée de les voler moi, lançai-je en rigolant.
- Ma copine est un malfrat à ce que je vois, répliqua Giorgio en riant de bon cœur.
- Haha bébé, si je vole, c'est pour en profiter avec toi non ? ripostai-je en riant à mon tour.
- Je pourrais bien t'aider, mais comme je ne suis pas sûr que tu vas partager le butin avec moi, je préfère m'abstenir, rétorqua Giorgio de gaité de cœur.
- Haha, ce n'est pas bien grave. Nous allons devoir nous contenter de nos minables salaires.
Giorgio éclata de rire et je le rejoignis dans son fou rire. Le repas continua ainsi dans la bonne humeur. J'aidai Giorgio à débarrasser la table et nous lavâmes la vaisselle après.
- Bébé, tu devrais te reposer pour être en forme ce soir, dit Giorgio d'une voix douce en s'essuyant les mains.
- T'as raison, rétorquai-je. J'espère réussir à m'endormir encore après avoir somnolé tout à l'heure.
- Je pourrais bien te tenir compagnie, murmura Giorgio d'une voix malicieuse en se rapprochant de moi.
- Non merci, répondis-je en riant et en m'éloignant au pas de course vers sa chambre.
- Haha, haha, ce n'est pas grave. À tout à l'heure bébé.
Je me rendis dans sa chambre et me couchai dans son lit. Je humai un moment ses draps et mes narines furent emplies de son doux parfum.
Malgré l'énorme fatigue, j'eus de la peine à trouver le sommeil. Mon regard se mit à parcourir la chambre de Giorgio et je m'attardai sur ce coin de son dressing qui contenait mes effets personnels. Cela faisait des mois, que dis-je, des années que Giorgio insistait pour que nous aménagions ensemble, pratiquement quelques mois après le début de notre relation, mais je ne lui avais pas encore donné de réponse.
Je sentis tout à coup mes paupières s'alourdir et le sommeil m'emporta lentement.