Tiziana
J'étais venue dans le nord de l'Italie le cœur plein d'espoir. J'avais espéré vivre une vie meilleure avec ce changement radical, mais j'avais maintenant l'impression de mourir à petit feu. Je n'arrivais plus à reconnaitre Giorgio. Ces derniers temps, j'alternais des moments de bonheur absolu avec des moments de pure terreur. Était-ce vraiment de l'amour ? L'amour était censé protéger, pas faire peur. L’amour était censé rassurer, pas effrayer. J'avais tout à coup l'impression d'être une coque vide.
Je quittai péniblement la porte et me rendis dans ma chambre. Je me couchai sur mon lit et fus immédiatement envahie par le parfum de Giorgio que j'avais toujours pourtant apprécié, mais maintenant, il me donnait simplement envie de vomir. Je me levai péniblement et me rendis au salon. Je m'assis sur le canapé et laissai vaguer mon esprit. Un torrent de larmes envahit immédiatement mes yeux et je pleurai tout mon soul. Je me levai ensuite péniblement du canapé et commençai à faire le ménage. J'avais besoin de m'occuper l'esprit, j'avais besoin de penser à autre chose. Je me mis à nettoyer de fond en comble mon appartement. J'avais l'impression que la douleur physique que je ressentais avait été anesthésiée en m'occupant l'esprit.
Je pris à la fin une longue douche et me rassis sur le divan du salon et tins ma tête entre mes mains. Je me sentais épuisée physiquement, mais j’avais encore l'esprit en ébullition.
Je me mis à penser à ma relation avec Giorgio. Je m'étais toujours sentie épanouie à ses côtés même si je ressentais au fond de moi le besoin de connaitre autre chose. De me créer un monde en dehors de lui. Pour une fois que j'avais essayé de sortir de son cocon en essayant simplement de me lier d'amitié à ma voisine, Giorgio avait été d'une violence inouïe avec moi. Cette fois, pour un simple coup de fil de mon cousin, Giorgio m'avait administré une gifle monumentale et m'avait rouée de coups. Il était allé trop loin !
Je réussis finalement à m'endormir malgré mes tourments et fus réveillée par la sonnerie de l'interphone. J’entrouvris légèrement la fenêtre de mon appartement qui donnait sur la rue et vis Giorgio qui attendait patiemment devant l'immeuble. Je décidai de l'ignorer simplement. La sonnerie retentit ainsi pendant près de deux heures, avec parfois de petites pauses, mais j'avais simplement fait la sourde oreille. Il avait fini par s'en aller.
J'allumai la télévision au salon, laissai un volume assez bas et m'étendis sur le divan. Mon esprit recommença à vagabonder, le sommeil et la fatigue eurent finalement raison de moi. Je ne saurais dire à quelle heure je m'étais finalement endormie.
J'étais encore profondément endormie quand la sonnette de la porte d'entrée me tira lentement de mon sommeil. Pff, encore Giorgio pensai-je irritée. Mais que voulait-il bon sang ?! Je me levai et me rendis à la fenêtre et jetai un regard vers la porte d'entrée de notre immeuble et vis avec stupéfaction que Giorgio n'y était pas, sa voiture non plus. La sonnette retentit une fois de plus et je réalisai à cet instant que c'était celle de la porte d'entrée de mon appartement, pas de l'immeuble. La personne se trouvait donc devant la porte de mon appartement. Je me rendis à pas feutrés vers la porte et regardai distraitement à travers le judas. Je vis avec soulagement le visage de Caroline apparaître dans mon champ de vision. Que faire ? Je n'avais pas envie de recevoir qui que ce soit dans l'état dans lequel je me trouvais, mais je me rappelai rapidement qu'elle s'était inquiétée après avoir entendu mon cri hier et était venue aux nouvelles. La moindre des choses était de lui ouvrir la porte.
- Une minute, m'écriai-je en déverrouillant la porte de mon appartement avec peine.
Chaque mouvement m'arrachait une grimace de douleur.
- Oh mon Dieu Tiziana, s'éxclama Caroline d'un air horrifié dès que la porte fut ouverte. Que t'est-il arrivé ? poursuivit-elle sans se départir de son air scandalisé.
- Qu'y a-t-il ? demandai-je avec stupéfaction.
- Tiziana, dit Caroline d'une voix inquiète, tu devrais aller te regarder devant une glace.
Mon cœur se mit à battre à vive allure. Je craignais de comprendre de quoi il retournait. Je me retournai péniblement et me rendis avec énormément de difficultés aux toilettes. Mon reflet dans le miroir me confirma mes soupçons. J'avais une énorme empreinte de doigts sur ma joue gauche et un bleu clairement visible sur la joue droite. Je fixai mon expression et les larmes emplirent une fois de plus mes yeux.
Je pleurai un bon moment et mon corps fut secoué de soubresauts. Je restai un long moment devant le miroir et un énorme sentiment de honte envahit mon être entier. Comment aurais-je fait pour me présenter devant Caroline maintenant ? Comment pourrais-je justifier ces marques sur mon visage ?
Après un long moment passé dans les toilettes, je pris finalement mon courage à deux mains et me décidai à sortir de là après m'être lavé le visage et essayé toute trace de larmes.
J'ouvris la porte des toilettes le cœur battant et rejoignis finalement Caroline au salon. Je m'assis en face d'elle, la tête baissée. Une atmosphère à couper au couteau régnait dans la pièce. J'osai lever le regard vers Caroline et le baissai immédiatement.
Nous restâmes ainsi un long moment et je perçus finalement un mouvement provenir du côté de Caroline. Je sentis quelques secondes plus tard des bras chaleureux me serrer très fort. J'éclatai en sanglots et me mis à pleurer sans retenue.
- Ça va aller ma chère, ça va aller, chuchota Caroline tout en me tapotant délicatement le dos en signe de réconfort.
Je pleurai de désespoir, mais aussi de honte, d'embarras. C'était une parfaite inconnue qui se retrouvait à me consoler. Je pleurai encore un bon coup avant enfin de me calmer. Je me détachai lentement d'elle et quand mon regard osa croiser le sien, un énorme sentiment de honte me submergea à nouveau.
- Qui t'a fait ça ? me demanda gentiment Caroline en essayant de croiser mon regard.
Je maintins la tête baissée.
- Tiziana, je sais que l'on se connait depuis peu, mais tu peux te confier à moi, reprit Caroline d'un ton encourageant.
- Je... Je... Je ..., baltutiai-je sans réussir à finir ma phrase.
- Tiziana, si tu ne veux pas....
- C'est... C'est Giorgio, mon petit ami, chuchotai-je d'une voix meurtrie.
- J'ai vu un mec sortir de ton appartement hier matin, c'est lui ?
Je hochai simplement la tête et la baissai à nouveau.
- Je ne sais pas grand-chose de toi, ni de ton couple, mais je me permets tout de même de te donner un conseil, tu devrais réfléchir à ce que tu attends de cette relation. Malheureusement dans beaucoup de relations, le premier coup n'est que le début d'une longue série.
Un autre silence lourd de sens emplit à nouveau la pièce. Je n'osais lui dire que les coups d'aujourd'hui n'étaient pas le premier acte de violence que je subissais de la part de Giorgio.
Un autre lourd silence s'installa entre. Je ne m'étais jamais sentie aussi embarrassée de mon vivant.
- Je vais te laisser, dit Caroline en se levant. Je passais simplement m'assurer que tout aillait bien de ton côté.
- Merci beaucoup Caroline, dis-je sans oser soutenir son regard.
Elle se rendit à la porte et je la suivis pour la fermer après elle. Je retournai immédiatement vers le divan et m'y étendis. Quelques secondes plus tard, des larmes se mirent à ruisseler le long de mes joues.
Je devais bosser toute la semaine prochaine, mais j'étais consciente qu'il aurait fallu plus ou moins une dizaine jours pour effacer toute trace de violence de ma joue. J'appelai mon médecin traitant et inventai des symptômes, heureusement, avec la Covid qui sévissait encore, il me fit des jours de maladie sans avoir besoin de me consulter au préalable. Je pris un comprimé de paracétamol et m'endormis en espérant me réveiller demain et réaliser qu'il s'agissait simplement d'un mauvais rêve.