Épître dédicatoire des cinq premiers volumes intitulés : une année

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Épître dédicatoire des cinq premiers volumes intitulés : une annéeIls parurent, pour la première fois, en 1786. À M. BR ***, fils. Notre amitié naquit, pour ainsi dire, dans ton berceau ; elle fut l’instinct de notre premier âge, et l’amusement de notre adolescence : nourrie par l’habitude, fortifiée par la réflexion, elle fait le charme de notre jeunesse. Ton indulgence a toujours encouragé mes faibles talents ; ce fut toi qui, le premier, m’invitas à les essayer ; c’est toi qui naguères m’as pressé de descendre dans la vaste carrière où se sont égarés avant moi tant de jeunes gens présomptueux. Peut-être comme eux je m’y serai trop tôt montré ; mais enfin je t’ai cru, j’ai écrit, je te dédie mon premier ouvrage. La critique ne manquera pas de dire, que très heureusement pour les lecteurs, la mode de ces longs discours complimenteurs, toujours placés à la tête d’un livre somnifère, est depuis longtemps passée. Je répondrai qu’il ne s’agit pas ici d’un fade éloge, donné, pour de bonnes raisons, à quelque riche ennobli, ou à quelque petit commis protecteur. Je répondrai que si l’usage des épîtres dédicatoires n’avait pas existé depuis longtemps, il m’eût fallu l’inventer aujourd’hui pour toi. Ô mon ami ! ta respectable mère, ton père bienfaisant m’ont rendu des services qu’on ne paie point avec de l’or ; des services que jamais je ne pourrais acquitter, quand même je deviendrais aussi riche que je le suis peu. Ton père et ta mère m’ont sauvé la vie : dis-leur que j’aime la vie à cause d’eux. Ils se sont efforcés de me donner un état, qu’on croit noble et libre : dis-leur que l’espérance de devenir un jour avec toi l’appui de leur vieillesse respectée, anima mon courage dans les cruelles épreuves qu’il m’a fallu subir, et me soutiendra toujours dans mes travaux. Ils se sont réunis à toi pour m’engager à cultiver les lettres : dis-leur que si le chevalier de Faublas ne meurt pas en naissant, j’oserai le leur présenter, lorsque mûri par l’âge, instruit par l’expérience, devenu moins frivole et plus réservé, ce jeune homme me paraîtra digne d’eux. Quant à toi, j’espère que cet hommage public, rendu par la reconnaissance à la bienfaisance et à l’amitié, te flattera d’autant plus, qu’il ne fut point mendié, et que peut-être il n’était pas attendu. Je suis ton ami, LOUVET.
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