L'amant invisible

Chapitre 11

_ Chase m'avait caressée intimement mais c'était tout.

_ Ça t'a plu ?

_ Oui... Beaucoup. Mais c'est abject, mal et malsain. Je n'aurai pas dû laisser les choses prendre cette tournure.

_ Comme si tu aurais pu y changer quoi que ce soit. Tu n'as et ne fait que subir ce qui était destiné à t'arriver. Crois-tu vraiment que c'était une coïncidence si tu t'es retrouvée à West-Sosa ? Tu aurais pu choisir une autre ville mais non, ton index a pointé celle-ci lorsque tu sillonnais la carte des États-Unis. Je me trompes ?

_ Non, avais-je murmuré. Chase a aussi dit qu'on était des âmes-sœurs. S'il n'avait pas perdu la vie, on se serait même mariés, on aurait fondé une famille à nous... Mais Abraham a tout gâché.

_ Comme je viens de te le dire, je savais tout ça mais j'ai préféré me taire pour ne pas te bousculer. Je savais également que tu finirais par l'apprendre. Tu tiens quand-même le coup ?

Lucianna posa une main réconfortante sur mon épaule et la frotta tendrement.

_ Je n'en sais trop rien. En ce moment j'ai la tête en vrac. Il y a environ deux semaines, je me suis en quelques sortes "disputée" avec Chase.

_ Pour quelle raison ?

_ Il refuse de se venger.

_ Se venger ?

_ J'ai croisé son maudit oncle récemment et j'ai failli péter un câble. Mes propos étaient poignants mais je ne regrette rien de tout ce que je lui ai dit. Cependant j'en ai parlé à Chase lors de notre dernière séance de Ouija. Il ne veut pas toucher à un cheveu de Gallagher. Ça m'écœure. Cette pourriture ne mérite pas de rester libre. Il ne mérite pas de respirer du tout.

_ Je comprends parfaitement ta colère chérie. Tu te dis que Gallagher t'a privé d'un bonheur inouï. Tu as mal de le voir circuler en toute impunité.

_ Si tu le voyais Lucianna, on dirait qu'il n'a rien à se faire pardonner. Il se cache derrière le maire pour se protéger. Comment Mills peut cautionner un crime pareil ? Bon d'accord, il ne sait peut-être pas que Abraham avait une réelle intention de nuire à Chase mais quand-même !

_ Tu sais j'ai croisé cet homme une ou deux fois. On n'a pas vraiment parlé lui et moi, mais je n'ai pas eu besoin de lire entre les lignes de ses mains pour savoir que cet ivrogne est rongé par le regret. Il essaie de le cacher mais il y a des signes qui ne trompent pas. Cependant fais très attention à lui, je ne l'apprécie pas.

_ Ça, tu n'as pas besoin de me le dire. Et puis "rongé par la culpabilité", tu parles ! Pour moi cet enfoiré ne paie pas assez parce qu'il l'a fait-

_ Exprès, je sais. Il a tué Chase de façon prémédité, je le sais aussi. Mais c'est à Chase de décider s'il veut se venger ou non. Pas à toi. Kyla, il y a une chose que tu n'as pas encore incluse dans l'équation. C'est pour toi que Chase est resté ici bas. Il s'en fout de Gallagher ! Bon au début ça devait sûrement le démanger de se faire justice, mais son lien avec toi était beaucoup plus fort que tout désir de vengeance. Et puis à quoi lui servirait-il d'ôter la vie à son oncle ? Ça ne le ramènera pas à la sienne qu'il a déjà perdu. Ça ne fera que alourdir la liste de ses propres péchés. Tu sais, il y a bel et bien un paradis et un enfer. On finit par aller dans l'un ou l'autre tôt ou tard.

_ Ça veux dire que... Chase s'en ira lui aussi ?

_ Probablement oui. Je ne peux pas te dire quand exactement. Ça peut être demain, dans un an, voir dans dix. Mais une chose est certaine, il partira pour de bon. Cette terre n'est plus sa place depuis bien trop longtemps. Pourtant il s'y accroche pour toi. Mais il ne faut pas oublier qu'il ne détient pas le pouvoir de décision en ce qui concerne le fait de rester ou de s'en aller.

Ces mots m'arrachèrent le cœur. Je m'étais habituée à son odeur et à sa présence. Allais-je pouvoir survivre sans ça ? Allais-je pouvoir retrouver goût à la vie ?

_ Mais même si tu ne l'oublieras jamais, tu finiras par te reconstruire un autre cœur, un autre amour.

_ Non.

_ Non ? avait-elle ri de façon gentiment moqueuse.

_ Je ne sais pas si je serai capable d'aimer comme je l'aime. J'aime et je déteste que ça soit si fort. Ça n'a jamais été aussi intense avec les autres.

_ Allons ! Je suis certaine que tu y arriveras. Il y a bien Darren non ?

_ Darren ?!

_ Bah oui.

_ Pourquoi tu me parles du shérif Myers ?

_ Il y a des rumeurs qui circulent par-ci par-là depuis quelques jours à propos de vous.

_ Des rumeurs ? Quelles rumeurs ? avais-je demandé avec méfiance.

_ On raconte que vous sortez ensemble, m'éclaira Lucianna tout en examinant ses ongles coupés.

_ Mais c'est complètement faux ! m'étais-je indigné.

Je savais qu'il y avait des commérages dans cette ville et entre ses habitants car c'était monnaie courante. Mais ils étaient allé trop loin. Je n'étais sortie en public avec Darren qu'une seule fois et on n'était pas intimes, on n'avait pas échangé des gestes amoureux. Alors comment diable de telles rumeurs étaient nées ?

_ Donc tu ne vois pas Darren Myers ?

_ Non. On est en quelques sortes de simples amis. Mais récemment je me suis éloignée de lui.

_ Par obligation je présume.

_ Oui. J'avoue qu'au départ c'était un peu plus parce-que Chase menaçait implicitement de lui faire du mal. Je ne pouvais pas permettre que ça arrive car ils étaient des amis. Je ne voulais pas être le caillou sur leur route.

_ Et ça t'honore tout à fait.

_ Mais après, j'avais ressenti un besoin inexplicable de rompre le lien qu'on commençait à tisser.

_ Ce lien que tu qualifies d'inexplicable à un nom: Chase McKay.

_ J'essaie de voir clair dans mes sentiments mais c'est flou. Pourrais-je y arriver un jour ?

_ Oui, j'en suis persuadée. Laisse-toi juste du temps, ne force pas les choses. Vas-y pas à pas. Tu as bien fait de t'éloigner de lui pendant un certain temps. Il faut d'abord que tu te concentre sur Chase, c'est le plus important.

J'avais très faiblement acquiescé en me mordant la lèvre inférieure. Ses conseils étaient si précieuses et même si j'étais toujours dans l'obscurité, j'avais l'impression de ne plus être seule à affronter mes démons. Je me souvins alors du jour où j'étais rentrée dans son camping-car. Elle n'avait conseillé de lâcher prise en couchant avec Chase. J'avais été horrifié. Là, je n'avais pas du tout trouvé ses conseils précieuses, au contraire.

_ En passant, il m'a avoué m'avoir suivie l'autre jour quand j'étais venue te voir. Pourquoi ne m'as-tu pas dit qu'il était dans ton camping-car ?

Elle haussa les épaules avec un rire d'excuse.

_ Eh bien je ne voulais pas t'effrayer et je souhaitais qu'il sache ce que tu pensais vraiment de lui.

_ Comme s'il ne le savait déjà pas, j'avais soupiré avant de me lever. Il faut que je rentre maintenant. C'était un plaisir de t'avoir croisée et d'avoir pu discuter avec toi.

_ Idem pour moi. Passe me voir un peu plus souvent, d'accord ?

_ Tu habites où maintenant ?

_ Le maire a fini par nous dénicher une vieille maison se trouvant à l'entrée de la ville.

_ Je crois effectivement l'avoir aperçue en aménageant ici. Mais elle m'a l'air un peu délabrée non ?

_ Oui c'est vrai. Cependant ce n'est plus le cas depuis quelques jours. Si tu n'étais pas enterrée chez toi, tu l'aurais peut-être remarquée. Nous la rénovons petit à petit et même si elle est petite, elle nous convient parfaitement. Rick est d'ailleurs entrain de réparer le toit avant l'arrivée des orages. J'étais passé acheter des outils dans le magasin d'à côté lorsque je t'ai aperçue dans la vitrine de la supérette.

_ Dans ce cas je passerai te rendre visite un de ces quatre. Mais la porte de ma maison t'es également ouverte. Passe quand tu veux.

_ Je croyais que tu voulais rester seule durant quelques jours.

_ Oui mais je fais une exception pour toi, j'avais faiblement souri avant de ramasser mes sacs pour m'en aller.

Le soir je réchauffai une des pizzas que j'avais achetées en guise de dîner. C'était dégueulasse à manger mais j'avais les idées ailleurs alors ça ne me gêna pas plus que ça. Je m'étais également servie un verre de vin mais je n'y avais pas goûté. Je ne faisais que remuer pensivement le liquide dans le cristal transparent.

Chase allait s'en aller tôt ou tard, m'avait dit Lucianna. Ce n'était pas que j'étais étonnée mais cette vérité était dure à encaisser. J'avais peur d'être seule et abandonnée. Mes parents m'avaient abandonnée, voilà que Chase allait lui aussi le faire. J'étais maudite. Mais je m'étais jurée une chose, j'allais profiter de chaque moment qui allait suivre. Je n'allais pas les gaspiller en continuant par lui faire la gueule. J'allais vivre le moment présent, lâcher totalement prise et m'offrir à lui de mon plein gré.

Comme s'il avait su que je pensais à lui, Chase me toucha l'épaule. Au lieu de me dégager, je posais la main sur la sienne. Je ne m'habituerai jamais à cette vision. Je touchais quelques choses d'invisibles à l'œil. Sa peau me paraissait à la fois douce et rugueuse. Ses mains avaient l'air si grande et caressante. Et pour cause, elle était autant capable de délicatesse que de rudesse. Je me redressai et me me tournai vers lui pour chercher son visage à l'aide de mes doigts. Je tâtonnai un peu mais je finis par rencontrer ce qui me sembla être sa mâchoire. Ma main glissa dans son coup puis vers son torse nu. Il semblait taillé dans du bronze. Son parfum m'enivra au point de me faire haleter. J'avais envie de sentir sa peau contre la mienne. J'avais envie de le sentir en moi. Je sentais un souffle s'écraser sur mon visage. Ses mains s'enroulèrent possessivement autour de ma taille.ses bras étaient de vrais étaux qui me maintenaient serrée contre lui. Il faufilait ses doigt sous mon déshabillé en me faisant rougir et gémir à la fois. Je baissai brièvement les yeux pour voir le bas de mon peignoir s'écarter et se bomber en prenant la forme de sa main. Je relever la tête pour encrer mes yeux à l'endroit où devaient se trouver les siens. Ma respiration devint laborieuse quand il se mit à pétrir mes fesses tout doucement et avec une tendresse dont je ne l'aurai jamais cru capable.

_ Chase, avais-je faiblement murmuré entre-deux soupirs de bonheur.

Je n'avais qu'un souhait: qu'il me fasse l'amour sur le champ. Il sembla entendre ma prière silencieuse car il me souleva pour ensuite me faire asseoir sur la table après avoir fait valser au loin le verre d'eau l'assiettequi contenaitles reste de mon dîner. Il me tira ensuite un peu plus vers lui. Je perdis l'équilibre et me retrouvai à moitié allongée. Je m'appuyai sur mes coudes pour redresser légèrement mon buste. Mon corps battait à la chamade et j'avais un délicieux vertige.

Mes jambes furent écartées puis je le sentis prendre place entre elles. Vu que je n'avais mis aucun sous sous-vêtement, j'étais à découvert. À nouveau, son souffle chaud se mêla au mien, signe qu'il s'était penché vers moi.

Je remontai ma main vers son visage en quête de ses lèvres. Mon pouce traça leur contour. Aidée par la photo que j'avais de lui, je les matérialisai en pensée. J'avais tant rêvé d'elles même quand je pensais le haïr. Tout comme moi il devait être impatient car sa main plongèrent dans mes cheveux, solidement cette fois-ci comme s'il craignait de me voir me soustraire comme l'autre fois où il avait voulu m'embrasser contre mon gré.

Je n'avais aucune intention de le fuir. J'étais pleinement consentante. J'avais un peu plus vers lui en effleurant ses lèvres pleines. Ce simple contact m'avait électrocutée.

Et alors je l'embrassai.

Ma bouche s'écrasa lourdement contre la sienne. Elle était intrépide, dominatrice et conquérante. Je l'imaginai poussant un grognement de plaisir. Ses lèvres étaient si douces, si incomparables. Je tremblai contre son corps invisible. Ciel, j'avais l'impression de goûter au paradis après navoir connu que l'enfer. Et ce paradis, je le vivais dans les bras de lucifer lui-même. Quelle ironie était-ce là ?

La longue attente nous avait rendu fébriles. En effet il avait tant attendu ce moment et moi, je l'avais tant repoussé. Un simple b****r aussi intense soit-il ne nous suffisait plus. De mon propre chef, j'avais dénoué les pans de mon déshabillé pour ensuite les écartées. J'étais complètement nue, complètement offerte telle un h********e. Moi qui avait toujours eu peur de ce moment, je venais de le provoquer.