XAlors, elle se résolut à faire ce que voulait son mari.
Elle envoya quérir Harold, qui, apprenant sa détermination, montra peu d’empressement. Il répondit qu’il était prêt à ce que commanderait sa dame et maîtresse, mais que c’était chose délicate à elle de se remarier si vite, et avec un simple page, et qu’il l’engageait à réfléchir.
À quoi madame Hélène repartit que la réflexion lui était bien loisible à lui qui n’était pas malade et qui n’était pas en danger de damnation ; mais qu’elle ne souhaitait pas de perdre son âme pour lui, et qu’elle le sommait d’être son mari, et fort promptement.
Et cela dans des termes si irrités, que le page fut contraint de consentir.
Le mariage se fit sans foule et sans joie, comme quand c’est un devoir qu’on accomplit et non une félicité qu’on obtient ; il n’y eut ni carrousel, ni cavalcade, ni danse, ni feu sur l’étang ; on distribua seulement beaucoup de pain et de monnaie aux pauvres gens. Madame Hélène n’avait jamais eu un visage plus pensif, ni Harold. Elle était en noir, lui aussi. On aurait dit des obsèques plutôt qu’une noce. Au repas, ni lui ni elle ne mangèrent ni ne burent. Ceux qui les virent sortir de la salle crurent voir une statue menée par un spectre.
Ils montèrent ainsi dans la chambre nuptiale.
Ils entrèrent. Elle le regarda, espérant peut-être qu’il ne resterait pas. Il alla vers la porte ; mais, au lieu de sortir, il poussa le verrou. Quand il se retourna, c’était un autre homme !
Il rayonnait de bonheur et d’amour ; sa figure était comme une pensée contenue qui éclate ; ses regards étaient des cris de joie !
Il revint à elle comme un lion qui tient enfin sa gazelle. Il se précipita à ses pieds et s’y roula, les baisant, riant, pleurant, effréné d’adoration. Et jusqu’au matin ce fut une tempête de passion à réveiller une morte.