Un cœur de pierre tendre

Chapitre 5

Ariel

C’est étrange… Je ne ressens pas le besoin de fuir… Cappuccino en main, j’ose le regarder dans les yeux, sans en ressentir de la peur… Ses yeux d’un bleu glacier semblent pourtant si froids… D'ailleurs, tout chez lui semble froid...

_ Vous avez là un très beau chien. Et je ne doute pas qu’il vous protège au péril de sa propre vie.

_ Djouck est mon garde du corps… Sans lui… Je n’oserai même pas m’aventurer seule dehors…

_ Vraiment ?… Pourquoi ?

_ Ce… C’est une longue histoire, dont je n’ai pas envie de parler.

_ Je comprends… Moi, je suis mon propre garde du corps. Dit-il avec humour.

Je le regarde avec étonnement et me retiens de rire à mon tour. Je n’en doute pas, cet homme est une vraie armoire à glace. Il doit faire au moins un mètre quatre-vingts et tout en muscles.

_ Oh, vous avez un…

Alors qu’il lève sa main, je me recule et ferme les yeux, levant les bras en protection. Il se stoppe et me fixe, surpris.

_ Qu’est-ce que ?… Je voulais juste retirer une feuille de vos cheveux.

_ Je…. Je suis désolé… Je…

Stupide réflexe !!! Mais quelle idiote !!! Je me lève précipitamment et commence à partir. Pourquoi a-t-il fallu que j’aie ces stupides réflexes de protection ?!!

_ Ariel, attendez…

Alors qu’il essaye de m’attraper le poignet, Djouck prend ça pour une agression et lui saute dessus, lui mordant le bras. Je me retourne et les regarde horrifier. Mon Dieu, Djouck !!

_ Djouck, stop, reviens !!

L’homme… Daren, il me semble, tient son bras et j’ai peur qu’il ne veuille se venger, sur mon chien ou sur moi. Pourtant, il me surprend encore plus en me souriant.

_ Qu’est-ce que je disais. Au péril de sa vie.

_ Vous saignez.

_ Ce n’est rien…

_ Oh, mais non… C’est de ma faute…

_ Non, je vous assure, ça va.

_ Je… Laissez-moi au moins vous soigner… Pour m’excuser.

_ Ce n’est pas vous qui m’avez mordu… Mais j’accepte votre offre avec plaisir. Je crois qu’il a bien enfoncé ses crocs en moi.

_ Je… Vous avez peut-être besoin de point de suture.

_ Non, un bandage suffira.

_ D… D’accord… Venez, je n’habite pas très loin.

_ Oui, je sais.

Alors qu’il dit ça, je me retourne vers lui avec étonnement.

_ C’est une petite ville, vous savez. Tout le monde connaît tout le monde et… Disons que nous sommes tous assez unis.

_ Oh, je vois… Il est rare de voir ce genre de ville.

_ Croyez-moi, quand vous serez totalement intégré dans notre ville. Vous comprendrez pourquoi.

_ Je… Si vous le dite…

J’ouvre la porte et après avoir soufflé discrètement, l’invite à entrer. Avant de fermer à clé derrière lui.

_ Asseyez-vous… Je vais chercher la trousse de secours.

Je me dirige vers la salle de bain et y reste quelques secondes. Me regardant dans le miroir…

_ Tu peux y arrive… Ça va bien ce passé… Tu soignes ses blessures et c’est tout…

J’inspire et expire, puis retourne auprès de lui, trousse en main.

_ J’espère que ce n’est pas trop profond.

_ Je suis sûr que ça devrait aller…

Il retire son blouson de cuir et je me retrouve face à des bras en béton. Un mec comme lui pourrait faire faire un tour complet d’une tête qui recevrait une claque de sa part. Je suis sûr que la tête en question pourrait même ce décollé de son corps.

_ Oh… Vous faites de la musculation ? Ou quelques choses dans ce genre ?

_ Quelque chose dans ce genre. Je… Je travaille dans la sécurité de la ville.

_ Vous êtes policier ?

_ Gardien de nuit… Je veille à la sécurité durant votre sommeil… Du moins, pas pour l’instant… On m’a confié une autre mission. Mais, habituellement, c’est ce que je fais.

_ Oh…

_ Et toi ?… Oh, ça ne te dérange pas si je te tutoie ?

_ Je… Non… Non, c’est bon… Je travaille dans l’informatique. Je crée des logiciels de sécurité.

_ Oh, c’est intéressant. On aurait bien besoin de renouvelé notre système actuel. Si tu acceptes, j’en parlerais à mon chef. Je suis sûr que ça l’intéressera.

_ Si tu veux…

Je termine le bandage par de morceau de ruban, relevant les yeux vers lui, je réalise qu’il est trop près pour moi… Et le malaise s’installe.

_ Ta réaction de tout à l’heure…

_ Je suis désolé… Je… Je ne sais pas ce qui m'a pris.

_ Si je suis sûr que tu le sais. Est-ce à cause d’un homme que tu es si méfiante et distance ?

_ Je…

_ J’espère qu’il a eu ce qu’il mérite.

_ Eu…

_ L’homme qui t’a fait du mal.

_ … Oui… Je…

_ Tu n’es pas obligé d’en parler… Même si je pense que ça te ferait du bien. De te libéré de ce poids.

_ … Mais, je ne te connais même pas.

_ Parfois, il est plus simple de se confier à un étranger plutôt qu’à un ami ou un membre de sa famille.

_ Oh… Oui… Peut-être… C’est juste que… Je n’ai pas pour habitude d’en parler.

_ Comme je te l’ai dit… Tu n’es pas obligé d’en parler.

_ Café ?

_ Avec plaisir.

_ … Je l’ai rencontré au lycée… C’était le quaterback. Tout le monde n’avait d’yeux que pour lui. Même moi.

_ J’imagine…

Je n’en rajoute pas et dépose deux tasses fumante, une de café, l’autre de cappuccino…

_ Ont à commencer à sortir ensemble et tout était parfait… Il était tendre, aimant, attentif… Il ne cessait de me dire qu’il était fou de moi… On a terminé le lycée et on avait vu différente. Lui voulait aller dans une université sportive… Moi, dans une université d’informatique. On est resté trois ans à étudier chacun de notre côté… On se voyait les week-ends et pendant les vacances. On voulait prouver à tout le monde que notre couple pouvait résister à la distance et aux années d’études… Et on y est arrivé. J’ai obtenu mon diplôme et j’ai commencé à travailler dans une boîte près de chez lui… Tout était… Parfait.

_ Un peu trop parfait, je pense.

_ Oui… Ça n’a pas duré longtemps. On a emménagé au bout d’un an.

_ Quand a-t-il commencé à changer ?

_ Trois mois plus tard… Ou peut-être avant… Au début, il se montrait jaloux et… Possessif. J’y voyais ça comme de l’amour ou de la peur qu’il ne me perd… La première fois qu’il s'est montré méchant, ce n’était qu’en m’insultant… Il cherchait à me rabaisser et à m’humilier… Je croyais que c’était de manière intentionnelle. Alors, j’ignorais ses attaques verbales et je préférai même les oublier…

_ Aucun homme n’a le droit de rabaissé quelqu’un. Même de manière… Intentionnelle.

_ Hum… J’étais juste amoureuse et… Heureuse qu’il m’ait choisie moi, parmi toutes les filles qui rêvé de sortir avec lui. Un jour, nous étions invités à manger chez des amis… On rigolait. On était bien et… David, l’homme qui nous avait invité, a renversé son verre sur moi sans le faire exprès. Il a voulu m’aidè en frottant la tache. Et sur le coup, je n’ai rien dit. Je trouvais qu’il agissait de manière normale. Mais quand j’ai levé les yeux… C’est la première fois que je l’ai vu me regarder de cette façon… On est rentrée et il a commencé à m’insulter et à me hurler dessus… Je lui ai juste dit qu’il était ridicule, que je n’avais rien fait de mal… Il m’a frappé pour la première fois… J’en ai été la première surprise et… Lui aussi, il me semble. Mais ses yeux… C’est ce qui me hante le plus.

_ Mais il a recommencé ?

_ Oui… Il s'était immédiatement excusé… Puis ont à oublier… Jusqu’au prochain coup… Puis, encore des excuses et des regrets… Mais, plus je lui pardonnais… Plus il recommençait et chaque fois de plus en plus fort… De plus en plus de colère était en lui…

_ Combien de temps ?

Je relève la tête, mon regard croisant le sien. Mais je ne lis aucune pitié… Juste de la colère… De la tristesse…

_ Ça a duré… Trois ans… Trois à subir, coup… blessure… v***e.

_ Quoi ??? Comment ça, v***e ?

_ Oh… Il refusait que je me refuse à lui. Il disait que je lui appartenais et que je me devais être à sa disposition… Alors, quand je me refusai à lui… Il… Il m’a saisie le poignet et me l’a tordu dans le dos… Me forçant à lui obéir… M’obligeant à l’accepter en moi…

Je le vois serré les dents, tant il semble en colère… Mais pas contre moi… Et curieusement, ça me soulage d’avoir du soutien de la part de quelqu’un.