Chapitre 8 : La Dualité De l’Âme (Suite)

776 Words
21 Juin, Cher journal, Cette semaine, nous avons entamé les épreuves du bac. Il est trois heures du matin et je prends le risque de t'écrire, bien que l'on pourrait me surprendre. Nous les êtres humains, savons-nous réellement ce qu'est la maitrise de soi ? Je n'arrive toujours pas à comprendre, tu sais, comment il suffit à un homme de voir le corps d'une femme pour qu'il en oublie même de prendre soin de ses responsabilités. Je n'ai pas appelé à être au monde. Mes parents ont demandé cette bénédiction. Mais voilà que l'on m'impose de réussir dans mes études, car on dépense sur moi, alors que je dois aussi me réveiller dans la nuit pour bercer les enfants et les nourrir. Il est vrai que j’ai envie de m’en aller d’ici, mais pour l’instant, je n’ai pas d’autres choix que de supporter cette douleur et ces combats. Sinon, sans mon diplôme, quelle vie aurais-je là dehors ? Dieu me délivrera un jour, j'en ai la conviction. Tu sais, il y a quelques semaines de cela, lorsque ma belle-mère est partie récupérer mon bulletin du troisième trimestre, elle a été témoin d’une scène que j’aurais voulue moi-même éviter. ​Je marchais dans les couloirs au moment où mon cœur se mit à s'agiter avec passion. Je levais donc le regard et remarquais Asriel, le garçon dont je t'avais parlé. Je tournais ensuite vite les yeux et avais l'espoir que l'on s'évite, parce que je pensais qu’il avait compris que sa présence m'irritait. Mais Non. Il s'est arrêté. Puis, m’a bloqué le passage. J’essayais tant bien que mal de m’échapper, mais il ne me laissait pas partir. Tout souriant, il s'est même penché vers moi, cherchant absolument à ce que je ramène mon regard à lui. Pourquoi a-t-il toujours ce sourire alors que je crache autant de haine sur sa face ? Quel est ce bonheur qui habite son cœur, au point où même devant la négativité des gens, il n'est pas dérangé ? Oh, que je l'aime et le déteste à la fois. Que je l'envie de sembler avoir une vie de famille paisible. Mais surtout, que je désire le protéger. À la fin, oui, je le protège de moi en ne lui accordant pas de connaitre que quelque part dans mon cœur, sommeille un brin d'amour pour lui. La morose de mon cœur ne ferait que le détruire. Que l'amour rend confus. Lorsque nos regards se sont enfin croisés — ce qu'il cherchait, j’ai cru mourir. Mourir, puis renaitre dans la même seconde. La couleur caramel de sa peau apportait quelque chose de festif à la vie. Une couleur de plus pour rendre l'existence plus belle. Une couleur de plus pour rendre l'agonie moins douloureuse, et aussi les ténèbres moins sombres. Mais l'image de mon père se présenta soudainement devant mes yeux et l'amour disparut pour laisser place à la colère. L'expression anodine de mon visage changea. Et alors que je m'apprêtais à lui crier dessus, j'entendis une voix forte. C'était tante Béatrice. Elle m'a giflé devant tout le monde puis m'a traîné par la main en me traitant de tous les noms. Elle me rappelait combien j'étais bête, mais étais forte pour parler à des garçons. J'avais des larmes aux yeux, et la haine que je ressentais envers les hommes est devenu encore plus grande. Parce que, je me suis dit que tout cela arrivait à cause de mon père. À ce niveau de ma vie, trois seules choses arrivent à me faire tenir. Dieu, la mémoire de ma mère et la curiosité de voir une vie différente. Quant à Asriel, je comprends pourquoi il me rend autant nauséeuse. Je comprends pourquoi il me fait danser autant entre oui et non, entre amour et haine. En me concentrant sur ses yeux, je vois la nudité de son âme. Et ma foi, qu’elle est belle. Or, lorsque la réalité me pince la peau, je me rappelle cette couverture qui couvre son âme. Le fait qu'il est un homme, comme mon père. Quelle ironie pour une personne qui prétend se rapprocher de Dieu, de détester les hommes, n'est-ce pas ? Parce que, comment pourrais-je prétendre aimer Dieu, lorsque je n’aime pas mon prochain ? Comment est-ce que je pourrais me tenir devant la face de Dieu et dire… combien je suis désolée. Désolée d'avoir été faible. Faible au point où j'ai accepté que les épreuves aient leur mot à dire dans ma façon de réfléchir, d'aimer et de marcher. Comment pourrais-je même prétendre pouvoir imiter Jésus dans le désert en résistant à la tentation, si je n'arrive pas à résister à la tentation de haïr ?
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