Couverture-3

2002 Words
Sur cette dernière pensée, je prends mon courage à deux mains pour y retourner et laver le reste, en commençant par mon vomi. Qu'est-ce que c'est déplaisant à dire et à faire. L'entendant arriver, je décide de me mettre dans l'encadrement de la porte et de l'attendre. Inspirer. Expirer. Bloquer. Entrant dans la chambre, son premier regard est pour ma personne. Il fouille mon âme. Il voit certainement mes déboires, s'en réjouissant à coup sûr. — Bravo tu as réussi ! maintenant je vais pouvoir installer mon bureau ici. Quoi ? tu croyais que c'était ma chambre ? non c'était seulement celle de ta mère ! je n'aurais jamais dormi ni dans une saleté comme cela ni avec cette c***n. Je viens de réaliser que je n'avais jamais mis un pied dans la chambre de ma mère, j'ignorais tout de leur vie de couple. Profitant du repos qu'il m'accorde, je m'allonge de tout mon long dans mon lit. Je ne peux dormir, je me répète en boucle, comme un mantra, la phrase qui allait changer ma vie, cette phrase si sanglante, cette phrase qui vous détruit avec de simples mots. « Votre mère a été poignardée dans sa chambre, toutes mes condoléances ». Pourquoi ? Pourquoi elle ? Elle était belle et douce, gentille et aimable, elle n'avait aucun ennemi. Je ne comprends pas pourquoi Georges, mon beau-père, le monstre, a pu forcer la gendarmerie de nous laisser dormir dans notre maison après cet événement. Les images défilent sous mes yeux, je vois le visage de ma mère, ses yeux clos, ses cils noirs et épais, ses cheveux marron en batailles, les marques des larmes qui avaient séchées sur ses joues brûlées, le sang sur son corps, sur ses bras, sur ses mains, sur sa poitrine... Les marques de SES grosses mains, les hématomes... Je ne l'ai pas reconnue, on aurait dit une sauvageonne, une lionne brutalement arrachée à son bébé. Elle a dû souffrir atrocement. IL me dégoûte, la rage m'envahit, j'aimerais pouvoir hurler mais je ne peux pas, je dois être silencieuse, je suis beaucoup trop oppressée pour ne pas faire de crise de claustrophobie. J'ai le sentiment d'être condamnée à être muette puisque je ne peux rien dire. Je ne suis ni aveugle ni idiote. J'ai compris, j'ai tout compris. Perdue dans mes pensées, ce qui m'en fait sortir se sont des gémissements. Sortant de ma chambre sur la pointe des pieds pour ne pas réveiller le monstre, j'aperçois mon demi-frère Tim au pied de la chambre de notre mère, je le prends donc dans mes bras pour essayer de le réconforter sachant parfaitement ce qu'il ressentait. Je ne suis qu'une impuissante, il a perdu sa mère au même âge où j'ai perdu mon père. À cet instant je pourrai tout faire pour qu'il ne lui arrive pas la même chose que moi, il ne peut pas perdre aussi son père, malgré SA cruauté, Tim n'y est pour rien. Je suis alors condamnée à me taire, à encaisser et à être forte pour mon petit poussin. Après l'avoir déposé dans sa chambre et avoir pleuré jusqu'à ce que plus aucune larme ne puisse sortir de mes orbites, l'épuisement finit par me gagner et me faire sombrer dans une nuit éternelle, entraînant ma paix et mon innocence avec elle. Chapitre trois Trois ans plus tard Les yeux humides, la gorge serrée, j'attends le prochain coup, les larmes roulants sur mes joues. Je ne suis pas faible, je supporte juste toute cette souffrance pour Tim. Voilà la seule pensée capable de me laisser maltraiter. Voici la seule pensée capable de contenir mon instinct primitif : la défense. Les esclaves n'ont pas survécu en proclamant la guerre contre leurs geôliers, mais en se soumettant et en obéissant à toutes les demandes ordonnées. S'ils ont survécu, je survivrai. Et pourtant mes pensées s'envolent à la seconde même où SA main s'agrippe à mes cheveux et me jette au sol. Je me protège le visage quand IL me donne des coups de pieds dans mon ventre, dans mes jambes, dans mon dos, dans ma nuque... Après les coups viennent les paroles sanglantes, « tu n'es qu'une merde, même ta mère a crevé à cause de toi, tu ne l'as jamais aidé, les coups de poignard étaient ceux que tu lui infligeais au quotidien ! tu as détruit notre famille ! Tim n'a plus de mère... ! » J'ai appris à connaître ces paroles par cœur et à les boire à grande gorgée. Seulement, elles me déchirent toujours autant les tripes. À cause de cet homme monstrueux et dénué d'âme, je ne vis pas, j'attends la mort en souffrant. Même si Tim est mon demi-frère, un lien très fort nous unit : notre mère. Seulement je suis seule, sans famille, ce n'est pas lui qui peut m'aider, nous aider, c'est à moi de le faire. Au moment où je me lève, il me tire brutalement les cheveux et me plaque le visage contre le poil. De violentes douleurs m'étripent le corps tout entier, la proximité du feu brûle ma chair et j'ai beau me débattre, il ne m'éloigne pas pour autant du brasier. Je suis faible et tremble comme une victime face au démon. — La prochaine fois ce sera ta tête qui sera à l'intérieur ! j'ai hâte de voir le spectacle, voir ta tête fondre à travers les flammes, voir tes yeux crépiter et tes cheveux partir en étincelles... c'est excitant n'est-ce pas ? C'est horrifiant. Souffrir de cette sorte sans rien dire, j'en ai des hauts le cœur, sans avoir pu réagir, des convulsions me font vomir par secousses, des spasmes me remplissent l'estomac. C'est comme si des asticots s'agitaient dans mon corps tout entier, comme s'ils se réveillaient à cause du feu qui me tourmente. D'un mouvement brusque il m'écrase contre la porte d'entrée et me tend un objet. — N'oublie pas tes lunettes de soleil, ce dernier est assez fort ce matin. IL m'oblige donc à me lever, afin que j'aille au lycée. Aie. p****n, ce n'est pas le soleil qui fait mal, mais mes brûlures. Les jambes encore flageolantes, les muscles crispés, étant encore sous le choc, je prends appui sur les murs pour marcher et rejoindre mon arrêt de bus. Une fois assise sur un banc pour attendre ce dernier, je sors mon miroir de mon sac et observe les conséquences de SA crise d'hystérie. Alors résultats des dégâts ? Yeux rouges, joues brûlées, sang qui coule, cheveux en batailles, hématomes virant au noir... Bon au petits moyens les grands remèdes : fond de teint ! J'étale donc ce dernier sur toutes les parties de mon corps à découvert pour cacher au maximum ce m******e. Une couche de mascara est également indispensable. Je prends aussi la peine de me coiffer soigneusement les cheveux et d'avaler un comprimé anti-douleur. J'espère seulement que ces petits désagréments ne seront pas trop visibles... Je crois que je peux le dire officiellement. J'ai hâte d'être au lycée. Pas besoin de poser la question, tant la réponse me semble évidente. Je veux à tout prix m'éloigner de cet endroit macabre... ~ Arrivée au lycée, j'avais eu le temps de me remettre de mes émotions, c'est donc dans cet esprit calme que je traverse le portail du lycée, signifiant pour moi la barrière de ma vie privée ! Ma souffrance, ma misérable vie, mon monstre personnel... Tout est clos et bien enfoui en moi, là où personne n'a accès. À part peut-être ma meilleure amie, je la connais depuis si longtemps, avant même la perte de mon père, mais elle est bien loin de la vérité, seulement c'est mon refuge quand j'en ressens le besoin. Direction mon casier, j'aperçois Léna et son corps de rêve, ses longs cheveux blonds qui leur arrivent au bas du dos, ses yeux bleus avec ses longs, noirs et épais cils, son visage parfaitement parfait, et sa bonne humeur. Une humeur si contagieuse que mes sourires les plus sincères lui sont solennellement accordés. En me voyant venir à elle, elle me fait de grands signes et courre vers moi. — Alice, tu m'as trop manqué ! j'aurais vraiment aimé te voir pendant les grandes vacances ! j'ai déjà regardé la fiche de classe et on est dans la même, en terminale L deux ! et devine quoi ? non je dois te le dire maintenant, c'est beaucoup trop important, Bailey aussi est avec nous ! dans ma classe tu imagines le bonheur pour moi ? je vais enfin pouvoir lui parler lia ! cette année sera mon année ! — C'est super Léna ! cela va être une année de folie ! et c'est partie pour les aventures de dingues, les soirées et les mecs ! m'exclamais-je, n'y croyant absolument pas. — Yeah ! les soirées et les amis ! c'est notre dernière année dans ce lycée, c'est incroyable ! attend ce sont quoi ces marques ? — Ce n’est trois fois rien, je suis tombée dans les gravillons en partant de la maison. — Tu as mal ? tu ne veux pas aller à l'infirmerie ? Voyant qu'elle n'aurait pas plus d'information, elle ne dit plus rien. Elle me connaît. Je ne suis pas le type de fille à pleurnicher pour la moindre égratignure en courant me plaindre à plein poumon. Je suis consciente qu'elle se doute de quelque chose, mais elle est trop absorbée par sa vie palpitante qu'elle n'en fait pas plus attention mais ce n'est pas un reproche, oh non loin de là l'idée d'insulter la personne la plus aimante qu'il m'est donnée de rencontrer. Honnêtement je préfère de près ceux qui ne posent pas trop de questions. Comme d'habitude, en nous dirigeant en cours, tous les lycéens que nous croisons nous saluent, étant les deux filles les plus populaires du lycée, nous connaissions toute l'école. Et nous sommes connues sous le surnom « les jumelles lia. » Je n'ai pas toujours été comme ceci... Un an après la mort de ma mère, j'ai décidé de ne plus montrer mes faiblesses ouvertement aux autres, cela sert seulement apporter la pitié, les regards rieurs, la méchanceté et les attaques gratuites. J'ai alors fini de me renfermer dans mon coin. Léna m'a beaucoup aidé, elle avait des ressources indispensables en tant que meilleure amie et en tant que fille la plus belle et populaire du lycée. Elle m'a fait devenir comme elle, à une différence près, contrairement à elle je laisse croire que j'enchaîne les aventures amoureuses ou purement sexuelles. Sans vouloir être hautaine, tous les mecs s'agenouillent à mes pieds, mais je ne suis jamais sortie avec quiconque et personne ne le remarque. Comment est-ce possible, sachant que les mecs parlent entre eux ? La réponse est très simple. Premièrement les garçons possèdent un ego surdimensionné, c'est bien connu. Ils mentent. Ils déforment la réalité. Les rumeurs racontent que parfois c'est moi qui ai été éconduite, ne leur plaisant pas, ils donnent une image de moi totalement déplorable, les rumeurs disent que je les supplie. Certaines disent même que je suis sortie secrètement avec eux. Il est évident que personne n'y croit. Personne n'y porte d'intérêt. Nous préférons laisser les mâles blessés de leur côté. Voici donc la deuxième raison, qu'importe la vérité. Je suis assez belle, quand je ne porte pas de cicatrices. Je suis populaire, sportive, bienveillante, intelligente, surdouée, je pourrai sortir avec le plus bel homme de la ville, mais je n'ai pas le droit de faire la fête, de sortir de m’amuser le soir. Je porte un aspect de ma vie bien privé et confidentiel. Léna sait seulement ce que je veux bien lui dire, elle a conscience que mon beau père est très strict. Malgré « mes autres amis », personne ne me connaît vraiment, je me sens seule, et ne supporte plus ma misérable vie, pour moi tout cela n'est qu'une façade. Pourtant, je fais comme si de rien n'était et continue de faire semblant. J'enchaîne les sports pour canaliser ma haine et ma souffrance, je suis la meilleure nageuse du département, prix à l'appui, une bonne gymnaste et une boxeuse en colère. Le mélange de ma rage et de ma souffrance me rapproche toujours de la victoire, pourquoi ? Parce que c'est la seule action qui me donne sérénité, confiance en moi et qui calme mes accès de colère. J'évite ainsi mes rébellions, donc par conséquent de potentielles blessures. Chapitre quatre — Entrez ! Nous sommes en plein cours de littérature et une nouvelle élève nous interrompt en rentrant dans notre salle, un peu perdue et assez réservée. Ses cheveux aux carrés mettent son visage en valeur et ses yeux sont d'un bleu transparent comme je n'en ai jamais autant admiré. — Pardonnez-moi mon retard et mon dérangement, je suis nouvelle et j'ai eu du mal à trouver ma salle... — Ce n'est pas grave, comment vous appelez-vous ? — Sarah Scott madame. — Bien, prenez les papiers que j'ai déjà distribués à vos camarades et asseyez-vous à côté de Mlle Porter, qui est au deuxième rang, à moins que vous préfériez vous asseoir à côté de votre frère ? répond notre professeur. — Merci beaucoup, mais je pense prendre la première option.
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