Chapitre 8 : La nuit où tout commença

1310 Words
C’était une nuit différente des autres. La pluie tombait sans interruption, rendant à moitié aveugle quiconque tentait de garder les yeux ouverts sous les lourdes gouttes qui s’abattaient au sol. Une silhouette, massive, se découpait à travers la pluie torrentielle. La créature veillait. Elle s’assurait que tout soit parfaitement en sécurité pour les gens qui lui avaient juré fidélité et soumission. Elle détestait la pluie, car elle masquait l’odeur des rôdeurs. Les rôdeurs, ces loups sans meutes. Ces loups qui avaient sombré dans une folie profonde parce qu’ils ne partageaient aucune connexion avec un groupe. D’une manière étrange, il arrivait que ces loups solitaires se réunissent afin d’atteindre le même objectif : celui d’éliminer tous ceux ayant porté allégeance à un Alpha. La créature les détestait et les tuait à la vue, sans jamais prendre la peine d’écouter leurs supplications. Quelques fois, elle pouvait ressentir de la compassion pour certains rôdeurs, car la créature elle-même pouvait sentir la folie prendre peu à peu possession d’elle. Elle savait qu’il ne lui restait plus beaucoup de temps avant que son autre moitié cède complètement aux ténèbres, emportant avec lui, ce qui lui restait d’humanité. La créature savait que la moitié de son âme était toujours incomplète, et que c’était en train de le tuer à chaque seconde où elle respirait sans avoir son âme-sœur près d’elle. Alors que quelques rayons de lune éclairaient le chemin qu’elle avait l’habitude de parcourir pendant ses patrouilles nocturnes, une odeur interrompit ses pas. Un vent doux souffla, chassant délicatement les nuages noirs qui tentaient de masquer la pleine lune de ce soir. Un doux rayon de lune vint éclairer la créature majestueuse. Désormais, un loup colossal se tenait fièrement, révélé par l’astre lunaire. Sa fourrure était aussi noire que la nuit et un croissant argenté, en forme de croissant inversé, semblait briller sur son front. Des yeux d’un rouge écarlate contemplaient la lune, suppliant dans une prière silencieuse, l’astre rond pour savoir si cette odeur était un rêve ou non. Des éclairs tombèrent. Il pouvait sentir la magie parcourir la terre. Il voulait hurler à la lune, mais pourquoi ? Personne n’oserait répondre à son appel et s’approcher de lui, surtout lorsqu’il était dans cet état. Le Dément, c’est ainsi que les gens avaient pris pour habitude de l’appeler, alors que chaque jour passant, lui faisait perdre un peu plus la raison. Même les membres de sa meute tremblaient de peur lorsqu’il rentrait. Il commença à rebrousser chemin, persuadé que l’odeur qu’il avait perçu n’était, une fois de plus, qu’un rêve. Les éclairs tombèrent à nouveau. Le vent souffla avec plus de force, portant avec lui, dans son sillage, un arôme qu’il n’avait jamais senti avant. Il sentit comme une urgence viscérale se réveiller en lui, une urgence qui faisait battre son cœur beaucoup plus fort et qui semblait apaiser son esprit. Il ferma les paupières sur ses pupilles écarlates et leva la truffe vers le ciel, cherchant à nouveau le parfum qui avait redonné du sens à ses jours. Son loup lui-même était effrayé de prononcer le mot à voix haute. Comme si la nommer était beaucoup trop précieux et sacré pour oser en articuler le nom. Ils avaient attendu si longtemps. La pluie n’aidait en rien la créature, mais elle devait absolument retrouver le propriétaire de l’odeur. Le vent souffla un air doux et chaud dans sa direction. Il ouvrit subitement les yeux. Ses pattes massives commencèrent à frapper le sol. Il devait être plus rapide. Il devait la trouver… ou le trouver… cela n’avait aucune importance pour lui. Son cœur était rempli de l’odeur que le vent continuait à porter dans sa direction. Il savait qu’il chérirait, plus que tout, le propriétaire de la fragrance. Il pourrait lui offrir le monde s’il lui demandait. Il accéléra encore avec plus de force, faisant trembler le sol sous son poids. Finalement, la piste le conduisit devant une vieille voiture abandonnée. Rapidement, il reprit apparence humaine. Il laissa les bruits morbides de ses os, se remettant en place, faire écho sur la terre. À la place du loup se tenait désormais un homme nu. Il s’était avancé, impérial, devant la voiture. Son cœur battait à tout rompre dans sa poitrine. La nudité n’était pas un problème pour les gens de son espèce, et c’est pourquoi il avait marché avec assurance et espoir de la voiture. Il sentit tous ses muscles se crisper lorsqu’il s’était rendu compte que le véhicule était vide. Il ouvrit la portière d’une main tremblante. Dès qu’elle fut ouverte, une douce senteur fit encore battre son cœur avec plus de force. Il entra dans la voiture, cherchant à renifler tout ce qu’il pourrait y trouver. Il fronça les sourcils lorsqu’il remarqua une autre odeur. Il vit un sac sur la banquette arrière. Il était rose avec de petits papillons dessus. Il tendit le bras pour l’attraper et l’ouvrit. Il se figea sur place. Il venait de voir la poudre pour bébé, les couches et les vêtements pour nourrissons. Cela le brisa de l’intérieur. La moitié de son âme avait déjà un enfant. Il jeta le sac là où il l’avait trouvé. Il plaça les mains sur son visage. Puis il laissa l’odeur calmer la rage silencieuse qui s’épanouissait à présent dans sa poitrine. Il s’assit correctement sur le siège conducteur et posa son crâne contre le repose-tête. Il regarda les gouttes d’eau glisser sur le pare-brise alors que les grognements de son loups s’élevaient. Il tuerait l’homme qui l’avait mise enceinte. Pire, il tuerait aussi l’enfant si elle venait à le refuser. Elle lui appartenait et à personne d’autre. Il prit une profonde inspiration et remarqua un objet au pied du siège passager. Il trouva un sac contenant un ordinateur portable, des livres dans une autre langue, un porte-monnaie, du maquillage, une brosse à cheveux et un passeport. Il sécha rapidement ses mains contre le siège de la voiture. Il dut faire une pause de quelques secondes pour se calmer. Son loup lui hurlait de se dépêcher et d’ouvrir le passeport. Ses yeux alternaient rapidement du vert forêt au rouge écarlate en même temps que son loup tentait de prendre le contrôle de leur corps. « Et si ce n’était pas elle ? Et si le sac appartenait à quelqu’un d’autre ? » dit-il à voix haute. _Ouvre et regarde... Nous devons savoir._ répondit le loup. Il tournait en rond, grognant et montrant des crocs, car son côté humain n’agissait pas assez rapidement à son goût. L’homme hocha la tête et ouvrit doucement le passeport, trouvant ainsi la page où la photo de la moitié de son âme se trouverait. Il n’eut que quelques secondes pour l’apercevoir que des puissantes griffes remplacèrent subitement ses ongles, réduisant à néant le passeport. L’homme soupira bruyamment. « Es-tu content maintenant ? » demanda-t-il encore à voix haute. Il n’eut pour toute réponse que de petits gémissements dans sa tête. Son loup avait manqué de patience et la transformation les avait tous les deux surpris. « Maintenant, si tu pouvais garder ton p****n de calme et me laisser utiliser mes mains. Peut-être que je pourrais obtenir un nom ? » Les pleurs de son loup continuèrent, mais il vit les griffes se rétracter, masquant ainsi la présence du monstre en lui. Il poussa un soupir exaspéré et tenta de lire les restes d’informations. Il fronça les sourcils puisque la première chose qu’il parvint à lire fut : « République Française ». Nom / Surname : Leroy Prénom / Given Name : Bianca Nationalité/ nationality : Française Sexe /s*x : F Taille / Heigh : 1,75 m / 5’9’’ Il s’arrêta là, satisfait par ce qu’il avait appris. Il pouvait sentir son cœur grandir et se réchauffer. Il lut, encore et encore, puis embrassa le passeport en ruine. « -Bianca.- »dirent d’une même voix l’homme et le loup.
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