On dit que le meilleur moyen d’aimer la vie c’est d’expérimenter de très près la mort. Mais si vous voulez que le monde vous dégoute, il faut apprécier le rejet.
Il n’y a rien de pire.
Ne pas avoir accès à certains privilèges parce qu’on n’est pas de la même classe sociale.
Etre considéré comme n’étant pas beau ou belle juste parce qu’on a plus de poids que d’autre, parce qu’on a un handicap ou parce qu’on n’a pas assez de moyen pour se vêtir et s’acheter un portable dernier cri.
Tout ceci dans le but de gagner un vis-à-vis intéressé et se croire considérer, alors qu’en réalité on mérite mieux que ça. Et on est plus seul qu’on le prétend.
Seul, délaissé par soi-même et par les autres.
On mendie la considération des autres juste parce qu’on n’a pas assez confiance en nous.
On mendie la considération des autres en nous cachant derrière nos possessions matérielles.
Parce que c’est bien plus facile comme ça que de s’accepter soi-même.
On comprend mieux ce que ça fait de se sentir rejeté lorsqu’on en fait l’expérience. Et à côtés de tous ces cas de figures, moi j’avais le sentiment que je n’y arriverai jamais, juste parce que je n’étais même pas considérée avant tout comme un être humain.
Plusieurs jours s’étaient écoulés après ma rencontre avec Baal. Il m’avait fallu du temps pour apprendre à maîtriser mon pouvoir de démon. J’avais l’appui de mon père, de Salif et de quelques hommes.
Mais bon nombre de gens dans le campement avait peur de moi, de ma nature et de ce que j’étais capable de faire. J’avais la vitesse et la force, l’instinct et la stratégie. J’étais de loin plus forte que les autres soldats.
J’étais un danger pour eux.
--- Hey ? Quel mignon petit garçon ! Comment tu t’appelles (Demandais-je accroupie)
--- Mes parents m’ont interdit de m’approcher de toi parce que tu es mauvaise (Dit-il en courant vers sa tente)
C’était si douloureux de ne pouvoir approcher un enfant juste parce que j’étais considérée comme un démon.
Chef : Ne t’inquiètes pas Anna. Ils ont besoin de temps. Sois patiente et fais tes preuves (Disais mon père en me caressant l’épaule)
--- Je l’espère … (Toute attristée)
Chef : Viens, on a rendez-vous avec notre informateur.
Je me levais et j’allais avec mon père et quelques hommes au lieu du rendez-vous.
C’était dans un bar.
J’avais du mal avec l’alcool d’ici. Mais ce n’était qu’une question d’adaptation.
--- De l’eau s’il vous plait (Commandais-je)
Chef : Nous t’écoutons !
Informateur : Des rumeurs dans la ville voisine laissent à penser qu’il y a une activité anormale. Des campagnards affirment avoir vu des sortes d’animaux sur leurs deux pattes se nourrir d’enfants et de nouveau-nés. Plusieurs familles se sont plaint de disparition de leurs enfants. Les autorités sont aux aguets mais jusqu’ici aucun de ces enfants n’a été retrouvés. Ce jeune homme que vous voyez avec moi a eu à assister à un de leurs actes diaboliques alors qu’il allait en randonnée avec ses collègues. Hélas il reste le seul survivant de cette expérience. Il s’appelle Joaquim
Joaquim : Ce que j’ai vu était juste horrible (Dit-il stressé)
Chef : Calme-toi et explique-nous. Comment étaient-ils ?
Joaquim : On aurait dit des chiens enragés, non. Ils étaient grands avec une fourrure lisse. Ils parlaient très bien notre langue et appelaient un dieu avant de sacrifié ces enfants…
Salif : Des loup garous. De quel dieu est-ce qu’il s’agissait ? Qu’est-ce que tu as entendu ?
Joaquim : Je crois qu’il s’agissait de Fierna.
Salif : Fierna ! C’est elle ! (Dit-il en frappant le poing sur la table)
C’était la première fois que je voyais Salif aussi en colère. Il semblerait qu’il aurait un antécédent avec ce nom.
--- Qui est Fierna ?
Chef : Je t’ai dit qu’il existe neuf royaumes dans les enfers
--- Oui.
Chef : Fierna est la princesse légitime du royaume de Phlégéthos.
Salif : Une étendue flamboyante dont les mers de magma en fusion génèrent des ouragans brûlants, une fumée étouffante et des nuées de cendres. Nous devons nous rendre là-bas au plus vite.
Chef : Nous irons. Mais nous devons élaborer une stratégie avant.
--- Fierna … (Repetais-je)
Chef : Elle doit avoir ton âge. Elle a récemment succédé à son père après sa mort.
--- Qui a tué son père ?
Chef : Baal.
Encore ce nom…
Chef : Tous ces crimes dans la ville voisine, ont sans doute une raison. Ils doivent préparer sa cérémonie d’intronisation. On devrait empêcher ça.
Pendant qu’ils continuaient de discuter entre eux, je balayais mon regard dans le bar. Mon instinct me prévenait de quelque chose mais je n’arrivais pas à savoir de quoi il s’agissait. Jusqu’à ce que je commence à m’intéresser aux couleurs.
--- Oh merde… (M’exclamais-je)
Salif : Qu’y a-t-il ? (Demandait-il intrigué)
--- Oh rien, ce sont mes règles.
Salif : Tes règles ?
Pendant que Salif cherchaient à comprendre ma réaction, je pris un stylo et une feuille et j’écrivais dessus.
Le bar était rempli en majorité de démons. Leurs sens développés de l’ouïe leurs permettaient de nous entendre malgré la distance.
Je présentais ensuite le papier à Salif en lui disant qu’on devait se dépêcher de tous rentrer avant que je n’inonde le bar de sang. Il comprit immédiatement en lisant le bout de papier ce que je voulais dire.
--- Nous sommes encerclés (Avais-je écris)
D’un signe du regard, Salif avait prévenu mon père et les autres hommes. Mais pour éviter la panique il ne l’avait pas dit à l’informateur et Joaquim.
Chef : Bien ! Joaquim, nous allons t’accompagner jusqu’à notre campement. Là-bas tu seras en sécurité.
Nous nous levions et nous sortions du bar en faisant comme si de rien n’était.
Nous étions suivis.
Nous empruntions une voie très peu éclairée et c’est là que nous passions à l’action.
Surpris de ne plus nous voir dans la ruelle que l’on avait empruntée, ils se retournèrent et se rendirent compte qu’ils étaient encerclés. Plus moyen de faire semblant. Ils se transformèrent en loup garou et se mirent à nous attaquer.
Joaquim et l’informateur étaient allés se cacher derrière un poteau pour ne pas nous gêner. C’était ma première vraie expérience de combats avec des démons depuis mes entraînements au campement.
Ils étaient forts et rapide mais ils leurs manquaient le sens de l’organisation. Comme si dès lors qu’ils étaient transformés, tout ce qui leurs venaient à l’esprit était de se ruer sur leurs proies pour les dévorer.
Tout ce que nous avions à faire était de créer une diversion tandis que d’autres visaient leurs cœurs
Salif sortit un explosif de lumière qu’il frappa contre le sol et les éblouit et le tour était jouer.
L’un d’eux réussi à se camoufler dans l’obscurité et attendit que nous soyons distraits pour attaquer Joaquim et notre informateur. J’avais réussi à le voir qui se dirigeaient vers eux. Avec ses griffes, il donna un coup destiné à l’informateur, mais je réussi à m’interposer et à l’encaisser à la place.
Son coup m’avait déchiré le bras.
--- Ça fait mal ça. (Dis-je en laissant mon bras cicatriser seul)
A la grande surprise du démon qui renchérit
Démon : Comment se fait-il que tu puisses cicatriser ? Qui es-tu ? (Demandait-il en reculant de peur)
--- Oh moi, je m’appelle Anna (Toute fière)
Il compta ensuite sur vitesse pour tenter de s’en fuir mais j’étais bien plus rapide que lui et je lui fis volte-face. Et d’un coup, je lui arrachais le cœur avec ma main.
Avant de mourir il se rendit compte sur mon regard que j’étais un démon tout comme eux.
Démon : C’est impossible …
Puis il tomba en cendres.
Informateur : Qu’est-ce que vous êtes ? (Apeuré)
Chef : C’est ma fille. Mais j’aurais le temps de mieux te l’expliquer plus tard (Dit-il)
--- Pourquoi est-ce que ces démons en avaient après nous ?
Chef : Ils sont probablement au courant de l’existence de notre fratrie et se sont servis Joaquim pour trouver notre base.
--- Je vois
Chef : Encore une chance que tu aies été là. Heureusement que tu aies été des nôtres ce soir Anna. Qui sait ce qui aurait pu nous arriver…
Les gens dans notre campement m’avaient réservée un accueil couvert d’insulte et de honte. Tout le monde n’arrêtait pas de crier.
--- Elle n’est pas humaine. C’est un monstre ! On doit la tuer ! elle finira par nous trahir !
Le chef tout en colère répliqua
Chef : Silence !
L’agora finit par se taire et regardait mon père
Chef : Cette femme que vous traitez de démon c’est ma fille. Et nous ne serions peut-être plus en vie aujourd’hui si elle n’avait pas été des nôtres.
Un des hommes dans l’assemblée s’écria
--- C’est impossible qu’elle ait pu faire une chose pareille
Informateur : Pourtant c’est bien vrai. Cette fille nous a sauvé d’une attaque de démons et m’a sauvé la vie alors que j’étais seul face à un loup garou.
Chef : Elle n’a pas choisi d’être ce qu’elle est. C’est parce que je n’ai pas su la protéger qu’elle est aujourd’hui considérée comme un démon par vous. Alors si quelqu’un souhaite en finir avec sa vie, il devra d’abord en finir avec la mienne ! Est-ce que c'est bien clair ?
Salif : Et la mienne aussi !
Tous les soldats qui étaient avec nous répondirent pour encourager mon père
--- Moi aussi !
Tout le monde s’était calmé jusqu’à ce que Joaquim en rajouta une couche.
Joaquim : Heu… Moi aussi, mais je ne sais pas me battre. Enfin je veux bien apprendre si vous…
Chef : La ferme !
Joaquim : Oh désolé…
J’ai pouffé un rire et nous rentrions dans nos tentes respectives. Nous devions nous préparer pour voyager. Dans deux jours nous irions dans la ville voisine pour empêcher un autre c*****e de ces démons.
La veille de notre départ je retrouvais Salif qui s’entraîna au tir à l’arc alors qu’il faisait nuit.
--- Tu dois te reposer, on a un long voyage demain Salif
Salif : Je m’entraîne.
Sa couleur était très prononcée. Comme de la rancune.
--- Tu as un contentieux avec la princesse de Phlégéthos ?
Salif : ça ne concerne que moi (Dit-il en visant un mannequin)
--- Vous avez fait beaucoup pour moi depuis que je suis ici. Si j’ai pu avoir une raison de me battre contre mon sort c’est grâce à vous. Mais je sais aussi que je ne suis pas la seule à avoir une histoire. Je veux bien écouter ton histoire, si tu permets (En posant ma main sur son épaule)
Il finit par se calmer et déposa son arbalète. Il s’assit près de moi.
Salif : Mon père était passionné par l’histoire et l’archéologie.
--- Un démonologue ?
Salif : Oui. Dans ses recherches, il avait fait une découverte sur l’une des prophéties de l’apocalypse de Jean. Mais ça découverte fût connue par les enfers. Baal exigea alors qu’on le tue.
--- Je vois, et c’est Fierna qui s’en est chargée. C’est pour cela que tu sais toutes ces choses sur les démons. Tu suis les traces de ton père.
Salif : Je la tuerai de mes propres mains.
Je posais ma main sur son dos et je le rassurais qu’il devait contrôler sa colère, sinon il ne viendra jamais à bout de ces esprits. J’étais empathique à son endroit. Et pendant que je lui caressais l’épaule je découvris quelque chose de nouveau sur ma capacité à sonder les couleurs des âmes.
Il y avait un transfert de couleurs entre lui et moi. Une sorte d’aura orangée me traversais pour le recouvrir et changeait sa couleur à lui. Il semblait revenir à de bons sentiments.
Salif : Tu as raison. Quelque chose ne va pas ?
--- Oh non rien, j’ai eu un coup de froid (En souriant en coin)
Il posa sa main sur la mienne et nos regards se croisèrent.
Les yeux parlent.
Nous discutions innocemment tous les deux en nous regardant. Il y avait une connexion entre nous deux tout à coup. C’était peut-être précipité.
Pourtant je le ressentais, ce tourbillon de sentiment qui nous emportais au firmament dans les étoiles et dans le vent.
Comme le début d’une histoire à nous.
Tout à coup l’image d’Alain me revint et un soldat nous interrompit
Soldat : Vous êtes debout ? Il va bientôt faire jour. Vous devez vous reposer.
--- Oui, nous y allons déjà.
Je me levais dans l’empressement et je regardais Salif timidement.
--- Repose toi bien. A demain
Salif : A demain Anna.
Le soleil levé, nous nous préparions au voyage. Nos armes étaient prêtes. Nous avions toutes les munitions qu’il nous fallait et nous priment la route, guidés par l’informateur.
Joaquim était resté au campement.
Lorsque nous étions à la sortie du campement, tout le monde sortait et se mit à applaudir.
J’étais surprise de ce que je voyais. Tout le monde criait.
--- Bonne chance ! Bonne chance Anna ! Revenez-nous vivants !
Ils me souriaient enfin. C’était la première marque d’attention que je reçus d’eux y compris des enfants.
Mon père me prit par l’épaule et ajouta
Chef : Le temps Anna. Le temps est le juge de tout.
Ainsi nous nous engageons dans notre voyage, cela nous pris deux jours et deux nuits, mais nous finîmes par y arriver.
Tadjoura, la ville aux milles saveurs.
J’allais bientôt rencontrer Fierna, la princesse de Phlégéthos.