— Elle refuse de sortir de sa chambre, fit tristement Corazon qui descendait les escaliers pour rejoindre Son frère et leur tante.
Stressée par la tournure de cette journée, Corazon semblait avoir perdu tous les moyens et la force de parler à sa fille sur ce qu'elle avait entendu. Sa fille lui avait littéralement dit qu'elle la détestait pour ce qui était arrivé à son père. Et elle avait raison de lui en vouloir. Combien de temps allait durer cette situation? Elle avait déjà perdu Damian et il était hors de question qu'elle perde sa fille.
— Ma chérie, ne fais pas cette tête, dit Babette en venant la serrer contre elle dans un geste de réconfort.
— Je n'en peux plus tante Babette. Elle n'aurait pas dû apprendre la nouvelle de cette façon. J'imagine ce qu'elle a dû ressentir en nous écoutant à la porte. Je ne lui en veux plus de s'être conduit d'une manière imprudente pour se rendre chez Nathan parce que je comprends qu'elle n'avait aucune envie de me parler.
— Ta fille se montrera compréhensive une fois que tu lui auras tout expliqué. J'en suis sûre. Je la connais si bien.
— Pour ça, il faudra qu'elle sorte de sa chambre.
— Ne t'en fais pas pour ça, dit-elle avec un sourire en coin.
Elle interperlla Rosa, sa gouvernante qui d'une minute à l'autre fit son apparition dans le salon avec un énorme gâteau en main. Prise de stupeur Corazon fixa sa tante comme tétanisée.
— Ne me dis pas que tu comptes utiliser ce gateau pour la faire sortir de la chambre. Tante Babette, tu sais très bien que je suis contre l'idée qu'elle en mange.
— Et alors ? Tu veux qu'elle sorte de cette chambre ou pas ?
— Bien-sûr mais..
— Alors laisse moi m'y prendre avec mes méthodes.
Avec raideur, elle observa sa tante prendre les escaliers. Si Babette était sûre que ce gâteau pourra faire sortir sa fille de sa chambre c'était sûrement parce qu'elle avait l'habitude de lui en donner lorsqu'elle lui rendait visite. Cela l'irritait que son entourage prenne à la légère le régime qu'elle avait établi pour éviter que sa fille perde sa silhouette.
— Tu es incroyable ! Commença Daegan dans son dos. Même dans des situations comme celle-ci tu te préoccupes des calories que pourrait prendre ta fille. Tu devrais plutôt te montrer reconnaissante que tante Babette ait trouvé un moyen aussi simple pour la faire sortir de sa chambre.
— Il s'agit de ma fille et je sais ce qu'il y a de mieux pour elle.
***
— Azalée, c'est Tante Babette. Chérie, tu peux m'ouvrir cette porte. J'ai quelque chose pour toi.
— Laissez-moi tranquille. Je ne veux voir personne. Je vous déteste !
— Je ne compte pas bouger d'ici si tu ne m'ouvres pas cette porte chérie. Rosa ta preparé un magnifique gâteau. Ton préféré. Tu ne voudrais manquer ça pour rien au monde, n'est-ce pas ?
— Je n'en veux pas.
— Allez ma chérie. Tu ne voudrais pas vexer Rosa. Elle l'a préparé avec tellement d'amour pour toi. Ce serait vraiment dommage que ce gâteau finisse dans une poubelle.
— Je veux mon papa, murmura-t-elle d'une voix brisée.
Babette exhala un soupir face à l'entêtement de la petite. Vu qu'elle ne pouvait pas la faire sortir, elle fit appel à Rosa. Peut-être qu'elle écouterait sa gouvernante. Après tout, elles s'entendaient si bien toutes les deux.
— Je n'ai pas réussi à la faire sortir. Peut-être que toi tu pourrais lui faire entendre raison.
— Pas la peine de faire appel à Rosa. Je ne sortirai pas. Allez-vous en, cria Azalée.
— Mais enfin Azalée, ta mère s'inquiète beaucoup pour toi.
— Je ne veux plus jamais la voir. C'est de sa faute si papa est malade. Elle l'a dit à Tonton Daegan. Je les ai entendus. Je la déteste, cracha-t-elle acerbement.
Corazon qui avait tout entendu, presqu'aussitôt chercha un endroit où s'asseoir. Les mains sur le front, elle ne put réprimer les larmes qui remplissaient ses yeux ! Qu'est-ce que ça lui faisait mal de se sentir incomprise de celle à qui elle tenait plus que tout !
— Corazon, écoute. Elle ne le pense pas vraiment, dit Babette.
— Ce qu'elle peut être injuste envers moi ! Ne peut-elle pas comprendre que j'ai besoin de lui parler ?
— Tu sais quoi Cora ? Nous allons la laisser. Peut-être que demain tu pourras lui parler et tout lui expliquer.
— Non, je ne pourrai pas dormir sachant que ma fille me déteste Babette. J'ai besoin de lui parler, de clarifier les choses. Tu comprends ?
— Bien-sûr que je comprends mais elle ne veut pas te parler, fit-elle en la poussant vers les escaliers. Rosa ?
— Oui madame.
- Prépare quelque chose à manger à la petite. Si elle ne veut toujours pas ouvrir. Attends que ton mari rentre pour qu'il te donne le double de clé de la chambre.
— D'accord, madame.
— Tu as besoin de te reposer. Rosa s'occupera d'elle.
— Babette? Est-ce qu'elle pourra me pardonner de lui avoir caché la vérité ?
— Mais enfin Corazon, elle ne va quand même pas t'en vouloir à vie. C'est impossible. Elle a beau te dire qu'elle te déteste mais au fond d'elle elle sait que ce n'est pas du tout vrai.
— Alors ? Elle vous a parlé ? Demanda Daegan une fois qu'elles eurent rejoint le salon.
Corazon secoua la tête.
— Ne t'en fais pas. Ça lui passera. Bon je vais m'en aller. Martha m'a appelé. Tanais a fait une chute dans les escaliers.
— Mon Dieu ! C'est grave ? Demanda anxieusement Corazon.
— J'espère qu'elle s'est cassé un pied, lâcha Babette d'une voix aigre.
— Tante Babette, tu vas trop loin dans tes propos, gronda Corazon.
— Vous n'etes pas sans savoir que je ne supporte pas cette femme superficielle. Je n'ai jamais apprécié qu'elle tourne autour de toi, Daegan.
— Tu vas devoir t'habituer à la supporter dorénavant.
— Et pourquoi? S'enquit Babette en plissant le front.
— Tu le sauras très bientôt, répondit-il en tournant les talons. Bonne nuit.
Babette fronça les sourcils en se demandant à quoi il faisait allusion. Elle se tourna vers Corazon en quête de réponse. Comme celle-ci avait bien pu deviner que sa tante attendait qu'elle lui en dise plus, elle se hâta de lui dire qu'elle n'en avait aucune idée.
Téléphone contre l'oreille, Daegan écoutait les plaintes répétitives de Tanaïs. Celle-ci se lamentait sur l'état de son pied. Apparemment c'était assez grave et il se peut qu'elle ne remarche pas avant plusieurs mois. Il se trouvait donc obligé à rester constamment avec elle, vue l'acuité de son état. Il ne peut nier qu'elle avait raison lorsqu'elle lui reprochait d'être trop absent et de ne lui accorder aucune attention. Si aujourd'hui elle se retrouvait avec un pied mal au point s'était en partie de sa faute. Elle avait tellement voulu qu'il l'aide pour les travaux de la rénovation de sa maison. Mais étant occupé par le travail et les recherches concernant leur sœur il l'avait laissée s'occuper toute seule de la rénovation.
— Tu as fait vite, déclara Martha lorsqu'elle ouvrit la porte d'entrée pour l'accueillir. Vas-y, entre, ne reste pas à la porte.
Sans plus attendre il pénétra l'appartement tout en le sillonnant du regard.
— Comme tu peux le constater il reste pas mal de chose à faire. Ça pourrait aller plus vite si Tanaïs ne s'entêtait plus à s'occuper toute seule de la rénovation et à mettre sa vie en danger. Elle ne veut travailler avec personne qu'avec toi. C'est idiot.
— Si tu crois que je suis le mieux placé pour lui faire changer d'avis...
— Daegan il s'agit de ta fiancée et vous allez vous marier bientôt. Si ça continue comme ça elle risque de se casser tout les membres avant le mariage. Voudrais-tu qu'elle te rejoigne sur l'autel en chaise roulante ?
— Il n'y aura même pas de mariage si elle finit sur une chaise roulante. Tanaïs tient tellement plus à sa réputation qu'elle refuserait même de m'épouser dans cet état.
— Tu as raison. Mais je te prie de la raisonner. Qu'elle engage un expert pour terminer les travaux.
Daegant exhala un soupir redoutant qu'elle accepte de l'écouter puisqu'elle est d'une nature tenace. Martha le conduisit à ses appartements. Il ne pouvait se permettre de rester trop longtemps puisqu'il devrait se reposer pour être en forme le lendemain.
— Je t'en prie, recouche toi, fit-il lorsque Tanaïs tenta de se lever.
Daegan s'assit près d'elle et demanda à examiner son pied.
— Ce n'est pas très joli, se plaignit telle en dressant son pied sur les jambes de Daegan.
— Avec plus de repos ton pied irait plus vite mieux. Je te préviens Tanaïs, tu n'as pas intérêt à vouloir jouer au maître d'œuvre dans cet état. Je ferai appel à une entreprise de rénovation qui se chargera de terminer ce que tu as commencé.
— Il n'en est pas question.
À vouloir tout contrôler, Tanaïs a la fâcheuse habitude de n'en faire qu'à sa tête.
— Ils ne feront pas exactement ce que moi je voudrai. Il n'y a que moi qui puisse terminer cette maison et si je souhaite qu'elle le soit avant le mariage je ferai mieux de me remettre à bosser.
— Je doute que ce soit possible.
— Tu penses ? S'enquit-elle en haussant les sourcils.
— J'ai demandé à Martha de prévenir ta mère. La seule personne à qui tu ne peux tenir tête.
— Tu sais très bien que je déteste que ma mère se mêle de tout encore moins de ma vie privée. Tu n'aurais pas du l'appeler.
— Tu ne nous a pas laissé le choix.
— Tu ne comprends pas que j'ai besoin que cette maison soit terminée à temps.
— Tanaïs cesse de te comporter comme une gamine. Tu ne pourrais rien faire dans cette condition si ce n'est qu'empirer l'état de ton pied. Tu me promets que tu ne quitteras pas ce lit ?
— Ai-je le choix ? Je ne vois pas comment je pourrai m'extirper de ce lit avec ma mère dans les parages. Après tout elle obéit à tes moindres désirs.
— Je ne me fais plus de soucis alors, dit-il en se levant.
— Tu ne comptes pas passer la nuit ici ? Demanda t-elle en appréhendant sa réponse.
— Non, j'ai un vol à prendre demain. Je serai de retour dans pas longtemps.
— Et tu vas où ?
— À Boston. Je suis sur le point de retrouver la fille de mon père.
— Enfin une bonne nouvelle. Je n'attendais que ça depuis. Rencontrer enfin la riche héritière des Blake.
— Prends soin de toi.
Il lui donna un b****r avant de prendre congé d'elle. En passant il salua Martha et rejoignit sa bagnole. Il n'en avait que peu de temps pour se reposer et préparer ses affaires pour le voyage. En y pensant, il était enthousiaste à l'idée de retrouver sa sœur. Et même s'il redoutait qu'elle accepte de faire partie de leur famille, il ne pouvait qu'espérer mieux. Tout ce qui compte, c'est de la retrouver. Il l'avait promis à Simmons.