IILe Royaume d’où la tradition éthiopienne veut que sa Reine soit descendue pour aller à Jérusalem saluer le Roi Sage se révèle d’abord au visiteur comme un lieu prédestiné.
Entre les vallées de la Mer Rouge et des Nils, l’Éthiopie prend la figure heureuse d’un château d’eau qui, au-dessus des marais et des déserts, monte, superbement, vers le ciel.
Trois secousses sismiques l’ont constituée en trois étages. À trois mille mètres d’altitude s’épanouissent les villes : la capitale elle-même, cet Addis-Ababâ dont le nom signifie « Nouvelle Fleur ».
Deux termes fixes, la latitude équatoriale qui impose la chaleur, l’altitude alpestre qui apporte le rafraîchissement, combinent ici leurs effets pour attribuer à cette terre de prédilection les vertus de trois serres superposées. Au pied du plateau, c’est la serre chaude ; à la hauteur des pays gallas, la serre tempérée ; en haut, la serre froide.
Trois fleuves, nés des brouillards de l’Océan Indien, tout chargés de la lente désagrégation d’une roche très ferrugineuse, coulent sur les flancs de cette Suisse africaine : le Nil Bleu s’échappe dans l’orientation d’un Rhin ; il va vers la Méditerranée ; l’Aouache ruisselle vers l’est, dans le départ d’un Danube ; l’Omo fuit au sud vers les grands lacs, comme notre Rhône vers la mer provençale.
Façonnée pour être nourricière d’hommes et de chevaux, cette forteresse montagnarde est sûrement apparue à ceux qui, les premiers, l’escaladèrent, sous les apparences d’une Terre Promise.