‡Chapitre 12 : Intruders (2)‡

1834 Words
L'intrus se rapprocha d'elle les bras grands ouverts comme si c'était la chose la plus normale à faire, ignorant les expressions et les exclamations marquées par la surprise et l'indignation de ses subalternes. – Tu as grandi de la plus belle des façons, ajouta-t-il d'un air sans vergogne. Apparemment vivre à Vanupas n'altère en rien la beauté extérieure, vous n'êtes pas d'accord avec moi ? Certains hochèrent la tête par dépit tandis que d'autres étaient beaucoup trop sidérés pour assimiler ce qui se passait. Maintenant qu'il était plus près, il prit le temps de l'admirer telle une œuvre d'art qu'on ne voit pas tous les jours. – Allons ! Baisse donc ton arme et discutons plus sereinement. Je suis un vieil ami de ton père après tout, j'estime que je mérite une réception digne de ce nom. Il se retint de lâcher un gloussement sardonique comme si ses intentions n'étaient pas déjà assez claires comme le jour. « Pour une plus-que-maudite, elle a vraiment tout ce qu'il faut pour combler un homme tel que moi. Au diable, la loi ! Si j'ai accepté d'escorter ce vétuste qui ne vaut plus rien dans cet enfer pour je-ne-sais-quelle raison, alors au moins en profiter ! Vas-y jeune fille, incline-toi devant ma supériorité ! Tu aimerais sûrement qu'on te cajole dans le sens du poil après toute ta misérable vie vécue dans ce calvaire... » spécula-t-il en buvant goulûment sa boisson plutôt exquise sans lâcher Kaya des yeux. « Comment peuvent-ils posséder des nectars aussi précieux en plus de manger à leur fin ? Le laps de temps que je passe ici me montre qu'il regorge peut-être de richesses inespérées » Et il voulait en jouir dans tous les sens du terme. Le territoire d'Aroër est un trou à rat où chacun ne vit que pour soi-même après tout. Avec toute une armée réunie, ce sera un jeu d'enfant et bien sûr leur chef tout aussi avare pourrait en profiter... Il sait partager quand il veut. . . . Kaya ne remua pas un pouce. Ses yeux étaient froids et vides d'émotion alors qu'elle s'exprimait en dégageant un semblant de prudence : – Tu demandes à moi, une plus-que-maudite, de m'associer à toi pour discuter comme de simples connaissances, te moques-tu donc de la loi ? À ce propos, pourquoi est-ce que des membres de la tribu se qualifiant de noble se donnent-ils la peine de fouler la terre de Vanupas ? Êtes-vous désespérés à ce point ? Peu importe l'attitude dérisoire, l'homme râblé ne semblait pas affecté, il lâcha même un rire bruyant et rauque, comme si Kaya venait d'inventer la plus grosse blague du siècle. – La loi ? Renchérit-il en plissant davantage ses yeux. Dans la jungle aucune loi ne prévaut, il n'y a que l'instinct qui dicte les règles ! Vu qui nous sommes, il est évident que nos intentions soient nobles et purs, ce qui ne nous contraints donc point à user de la violence, mais si la situation nous l'impose... Nous n'hésiterons pas à trépasser nos armes sur vos âmes maudites. Mais je peux être conciliant si j'obtiens de vous une coopération digne de ce nom. Alors qu'il leva la main dans l'intention de toucher son visage, Kaya le fixa enfin droit dans les yeux : – Est-ce ainsi ? Tu m'envoies rassurer ! Flap ! Une flèche vola et vint se coincer dans le dos de sa main manquant de peu de passer à travers. La surprise et la douleur lui firent lâcher son gobelet pour agripper inopinément son poignet. La fureur et l'incrédulité se saisirent de lui tandis qu'il vit avec effarement son membre saigner. – Si tu ne recules pas d'elle, ce sont tes billes qui te servent d'yeux que j'vais crever ! . . . Un jeune homme qui était autrefois tapi dans l'ombre, s'avança à leur niveau, deux flèches tendus à l'arc et pointant dangereusement vers l'intrus. Kaya se détendit et sourit franchement à son ami qu'elle avait mis sans le vouloir de côté. Elle espérait juste de ne pas l'avoir mis trop en colère pour ça. – T'en as mis du temps ! Tu peux me croire, je me suis véritablement empêchée de vomir, taquina-t-elle en mimant du dégoût avec sa langue. – On dit merci mademoiselle ! Répliqua Akkun, de toute façon, tu ne devrais t'en prendre qu'à toi-même tête brûlée. Attrapes ! Akkun lança avec précaution deux lances familières à Kaya, celle-ci les rattrapa avec facilité tout en le gratifiant d'un sourire reconnaissant. – Vas-y, je m'occupe d'eux ! Tu dois absolument intervenir et déterrer ce qui passe, je ne sais pas pour toi, mais j'ai un mauvais pressentiment. Kaya qui ne pouvait pas être plus d'accord, hocha la tête. Alors que cette dernière avait le regard tourné, elle ne vit pas le malotru pervers dégainer son sabre pour infliger son châtiment par un coup de lame vertical sur son dos. Pour une raison quelconque, la lame trancha l'air et le mufle se retrouva avec l'autre dos de la main transpercé par un poignard, juste assez pour qu'il lâche son arme et soit suffisamment déstabiliser pour être renversé par un simple coup de pied. Avant qu'il ne se rende compte, Kaya était déjà de l'autre côté. Malédiction ! Apparemment celle-ci avait hérité des prouesses physiques de son père. – AAARGH ! S'écria-t-il, V... VOUS ESPÈCES DE BARBARES DOUBLÉS DE FOLIE ! Comment osez-vous lever la main sur moi ? Ne savez-vous pas à qui vous avez affaire ? N'oubliez pas que peu importe le lieu dans ce territoire, je suis toujours hiérarchiquement plus élevé. Sans se retourner, Kaya s'élança dans la cabane, menaçant du regard quiconque voulait l'en empêcher. C'est Akkun qui répliqua : – Ici à Vanupas, nous n'avons que faire de votre hiérarchie ! Allez-vous en ! Retournez d'où vous venez et ne mettez plus jamais les pieds ici ! Le butor fixa Akkun avec des yeux brûlants de haine. En voyant cet air hautain, de plus venant d'un plus-que-maudit, sa rage fut décuplée et un désir de meurtre le rongea jusqu'à la moelle : – GRRR ! QUE FAITES-VOUS b***e D'INCAPABLES ? NE RESTEZ PAS PLANTÉS LÀ ! ILS ONT LEVÉ L'ARME SUR VOTRE SUPÉRIEUR, SAISISSEZ-LES IMMÉDIATEMENT ! Ordonna-t-il en respirant profondément. « Quand j'aurai mis la main sur vous, je m'assurerai que vous croupirez en enfer, sales démons de la nature !... Apparemment vivre dans ce taudis vous a fait perdre votre sens commun. Je vais vous apprendre moi, surtout au rejeton de cet homme dont j'éprouve toujours une haine viscérale » . . . Dans une pièce de la cabane, autour d'une table basse, l'ancien et le grand sage se faisaient face _ semblant à peine conscient de l'agitation à l'extérieur ou faisant tout pour l'ignorer _ quand une personne fit brusquement irruption dans la pièce. L'ancien regarda avec les yeux exorbités, la jeune fille respirer fortement de même que la pression qu'elle exerçait sur ses lances. On aurait dit qu'elle était sur le point de passer à une exécution. – Kaya... ? À grandes enjambées, Kaya se rapprocha du vieil homme qu'elle considérait autrefois comme respectable et déclara d'une voix rude, manquant de peu d'élever la voix : – Ancien ! Depuis toujours, j'ai été entièrement dévouée à ma tâche sans faillir, j'ai supporté la perte de mes camarades et amis pour ce périple que la plupart d'entre nous n'ont point mériter et à cause de quoi ? Avec un regard méprisant, elle pointa du doigt Seïr qui arborait pendant tout ce temps une expression calme. – Pourtant ÇA ! Ça, c'est la pire trahison de toutes ! Vous rendez-vous compte que vous exposiez le camp à plus de souffrance émotionnelle et qui sait quoi d'autre ? Des personnages malveillants et sans scrupules rôdent dans le camp et qui connait leurs intentions ? Alors, je vous demande ancien, qu'est-ce que cela signifie ? Avant qu'il ne put répondre, une voix sourde et calme presque usée s'éleva : – Hum ! Enfin la fille d'Edréï nous fait l'honneur de sa salutation... Le sage leva son regard fatigué avec un soupçon de reconnaissance, mais sans toutefois le diriger vers elle : – J'ai eu vent à l'instant que vous êtes à la tête des combattants du camp... J'en conclus que vous êtes devenue aussi aguerrie que votre feu père. Kaya était sans voix. Comment pouvait-il agir aussi passivement à son égard après tout ce qu'il a fait ? Il n'y a aucun doute, tous ces mâles sont dénués de bon sens... Et c'était inadmissible de subir encore plus de leur infamie ! Elle ne leur permettra pas de se moquer d'eux encore longtemps. Les mains tremblantes, la mine assombrie, elle vociféra d'un ton dangereusement bas : – Toi ! Ne m'adresse pas la parole et ne salis aucunement la mémoire de mon père en le mentionnant de tes lèvres mensongères ! Si tu oses poser tes pieds ici comme si de rien n'était, j'en conclus donc que tu as un désir de mort. D'un air recueilli, Edréï plongea son regard dans le sien : – Vous savez, j'aimerais vous dire à quel point je comprends votre acrimonie à mon égard, mais je doute que vous le preniez bien. Et aussi, je préfère garder ma tête sur mes épaules si vous comprenez ce que je veux dire... Ancien ? Je vous prierai de bien y réfléchir. Sachez que le temps nous est compté. Kaya fit un effort surhumain pour ne pas agir en représailles et se tourna une fois de plus vers l'ancien. Plus vite, elle aura des réponses, plus vite, elle sera débarrassée de sa présence. – Ancien... – Kaya, interrompit-il entre le regret et le tourment. Cela te concerne aussi... Assied-toi ma fille, je te prie. Il eût un moment de silence où Kaya crut être sous l'emprise d'un joug maléfique. Comme si son passé venait la narguer. L'injustice, la douleur, le rejet, la trahison... Tout revint. Un côté du masque craquela et une fissure éclata. « Je ne comprends plus rien ! Qu'est-ce qui se passe ici ?» Un épais brouillard l'enveloppa et quand il se dissipa, elle sentit la vie être aspirée d'elle. « Pas ça ! Pas encore ! Je... Je ne supporte plus rester dans cette pièce. Je dois sortir ! Je vais... » Kaya fit un pas en arrière, puis deux, l'expression vide : – Vous m'excuserez mais je n'ai pas envie de couler une once de courtoisie à l'égard d'un traître. C'est au-delà de mes principes, s'exprima-t-elle d'un ton morne en prenant la direction d'une autre porte sauf qu'elle fut stoppée par une personne qui se tint directement devant elle. Les deux individus se regardèrent droit dans les yeux. – Je sais que c'est trop te demander mais peux-tu au moins le faire pour moi... Ma chérie ? Kaya qui avait reprit ses esprits semblait une fois de plus plongée aux tréfonds des ténèbres. . . . . . ♦‡♦
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