DEUX MOIS PLUS TARD
ABOUBAKAR
Le travail a repris il y a un bon moment maintenant... Du ministère du commerce au ministère des finances, c'est la grande classe. Ça veut dire plus d'argent et plus de pouvoir mais également plus de travail. On ne va pas se mentir, pour arriver à ce niveau il a fallu faire pleins de sacrifices aux sens propre et figuré du terme. Nous sommes si nombreux à rêver de cette place alors le plus offrant l'emporte. Sur ce coup, j'ai été le plus offrant et j'ai gagné.
Bon là il faut que je me concentre sur cette pile de documents sur mon bureau. Naturellement je laisserai quelqu'un faire le travail à ma place mais avant tout j'aime faire mon travail et si j'ai fait des mains et des pieds pour être à cette place ce n'était pas que pour le prestige mais également pour prouver que je le méritais.
Ma secrétaire m'annonce que mon rdv de 11h est là. J'ai d'ailleurs été très surpris de sa requête de vouloir s'entretenir avec moi. Je demande à ma secrétaire de la laisser entrer...
Quelques secondes plus tard, la porte s'ouvre sur notre chère maire. Cette femme me trouble franchement. Elle a une beauté et un charisme qui mettent tout le monde d'accord et puis elle a ce truc en plus que je ne saurai décrire. Je me souviens encore qu'il y a quelques temps on était tous contre le fait qu'elle entre dans le gouvernement. Pourquoi ? Tout simplement parce qu'elle ne fait partie de notre cercle. Mais bon après il faut avouer qu'elle fait du bon boulot et jusqu'à présent son arrondissement reste le premier de tous. Ce qui a le plus marqué c'est la façon dont elle a géré après la mort de son frère. Une vraie dame de fer cette femme. Je crois même que si j'avais su que ce jeune homme était son frère j'aurais été plus indulgent enfin c'est passé... Mais malgré tout j'espère qu'elle se contentera de son poste de maire je trouve que c'est bien assez pour quelqu'un comme elle.
Je l'accueille le sourire aux lèvres...
Moi : Madame le maire !
Elle : bonjour monsieur le ministre...
Moi : asseyez-vous je vous en prie !!
Ce qu'elle fait puis je reprends la parole...
Moi : j'ai été très surpris de savoir que vous vouliez me rencontrer.
Elle : oui c'est vrai mais déjà je tenais à m'excuser de mon absence à votre réception. Je ne pouvais vraiment pas me déplacer ce jour-là...
Moi : je l'ai compris et rassurez-vous je ne vous en tiens pas rigueur.
Elle : merci et félicitations pour ce nouveau poste, je trouve qu'il vous va bien.
Moi (flatté) : merci... Bien, alors qu'est-ce qui vous emmène ? Sans vouloir vous vexer, je ne pense pas que vous soyez venue ici juste pour vous excuser et m'adresser vos félicitations...
Elle : bien évidemment que non... Je voulais aussi vous dire merci de votre présence au deuil de mon frère. Mais plus sérieusement, je suis ici aujourd'hui parce que j'ai besoin de votre appuie.
Moi (intrigué) : euh, bien-sûr je vous écoute, en quoi puis-je vous être utile ?
Elle : je souhaiterai me présenter au poste de gouverneur de la région.
J'écarquille les yeux tellement je suis surpris par sa demande. Soit-elle au moins dans quoi elle s'embarque ?
Elle : je sais que seule je ne pourrai pas alors est-ce que je pourrais compter sur vous ?
Je la regarde tellement surpris que je ne sais quoi dire. Voir autant de détermination en elle me trouble. Contre toute attente je réponds...
Moi : êtes-vous sûre de vouloir vous présenter à ce poste ?
Elle : oui, je n'ai pas encore annoncé ma candidature mais je compte convoquer une conférence de presse demain matin pour l'annoncer. Pour le moment, j'ai besoin de savoir si je peux compter sur vous...
J'ai envie de dire, ils vont vous bouffer tout cru mais je me contente d'un ok.
Moi : ok !
Elle : ok ? Je peux compter sur vous ?
Moi : oui !
Elle : merci beaucoup... Je pense que j'ai déjà assez a***é de votre temps. Merci encore pour votre attention et pour votre soutien.
Moi : je vous en prie et je vous souhaite bonne chance.
Elle sourit en coin avant de prendre la porte. Cette femme est très intrigante. On dirait qu'elle n'a peur de rien pourtant elle devrait... Ce monde est risqué. Ici il n'y a pas d'amis, si quelqu'un veut ta place, il t'écarte sans aucun scrupule. Même moi je suis constamment sur mes gardes car je sais que cette place est contemplée par un bon nombre qui n'hésiterait pas à m'éjecter. Je me rappelle encore quand elle est devenue maire. Au début c'était pour taire les mauvaises langues qui disaient que pour faire la politique dans notre pays il faut se livrer à certaines pratiques. Et puis on était d'accord sur un point elle ne ferait pas long feu mais elle a prouvé le contraire et en même temps elle ne dérange personne à ce poste mais gouverneur ? Même moi, si on me proposait de troquer ma place de ministre pour celle de gouverneur je le ferais sans hésiter. Tu es une sorte de demi président je dirais. Je crois qu'elle ne sait pas dans quoi elle s'embarque.
ELODIE
Oui, me présenter au poste de gouverneur c'est de la folie mais je ne sers pas un Dieu faible. C'est lui-là même qui établit les rois alors qu'est-ce qui pourrait lui être impossible ?
Je sais que ce monde est plein de scorpions et serpents qui n'hésiteraient pas un instant à vous injecter leur venin mais je n'ai pas peur. Si mon Dieu m'a protégée jusqu'ici, ce n'est pas aujourd'hui qu'il va m'abandonner.
Au lieu de retourner à la maison, celle de mon père bien-sûr... J'ai décidé de rester avec lui un moment pour qu'il ne se sente pas très seul. Heureusement Olivier l'a bien pris. Je prévois faire voyager papa pour un bon moment car j'ai besoin de me concentrer sur ce nouvel objectif. Je compte lui en parler ce soir pour le moment je me rends à mon ancienne maison. Je vous disais que j'ai fait de cette maison un centre qui accueille des jeunes filles qui ont été dans la même situation que moi dans le passé. Mon travail consiste à les prendre sous mon aile, leur faire voir un psychologue puis quand elles sont prêtes à passer à autre chose, on voit ensemble ce qu'elles pourraient faire, je leur paye une formation dans le domaine choisi puis elle se lance dans la vie active. Jusqu'à présent tout se passe bien il y a plus de 10 qui sont déjà sorties d'ici et je suis très contente du résultat. Je rends grâce à Dieu.
Le pasteur Mardochée passe les voir tous les mardis pour une petite séance de prière. Ils partagent la parole et tout. Il leur enseigne les bienfaits de Dieu et tout ce qu'elles ont à savoir. Il y en a qui sont réceptives d'autres pas mais bon... On ne les juge pas et on essaye de s'y prendre avec elle d'une autre façon. Le pasteur Mardochée a un don pour ça, je crois qu'il le doit à ses études de sociologie. Il sait comment s'y prendre avec les personnes qui l'entourent je crois qu'il est l'une des clefs de réussite de ce centre.
J'ai choisi venir ici aujourd'hui justement parce que je savais que j'allais le trouver. Je dois voir les filles et prendre de leurs nouvelles mais j'ai également besoin des conseils du pasteur. Disons que je fais d'une pierre deux coups.
(...)
Je passe une bonne heure avec les filles à prendre de leurs nouvelles. Elles me racontent leurs journées. Celles qui ont commencé la formation nous racontent comment ça se passe et je suis très contente de voir qu'elles prennent leurs études au sérieux. Actuellement elles sont 15. Cinq ont commencé le travail il y a un mois, 6 sont en formation et les 4 autres viennent d'arriver mais elles semblent très réceptives et surtout déterminées à changer de vie. Depuis que j'ai ouvert ce centre je crois que j'ai assisté à 7 mariages déjà et je sais que le reste viendra. Je suis encore plus heureuse lorsque Claude l'une des cinq qui travaillent m'annonce qu'elle va laisser son lit à une autre. Ce qui veut dire qu'elle s'en va. Ça peut sembler triste mais je suis heureuse car le but ce n'est pas de les maintenir prisonnières ici mais de les aider à aller de l'avant. Comme de coutume, je vois avec les filles comment organiser une petite fête pour le départ de Claude.
Une fois que j'ai fini avec les filles, je vais retrouver le pasteur Mardochée qui m'attend sur la terrasse.
Je viens m'asseoir près de lui en observant le jardin. J'entretiens ce jardin depuis la mort de maman... Samuel et moi avions convenus de le faire ensemble chaque semaine l'un de nous venait le faire. Quand on ne pouvait pas, les filles nous aidaient... Je n'ai même pas envie d'y penser parce que toute cette histoire me rend triste et en ce moment j'ai besoin d'être forte pour la suite.
Pasteur : ça va Élodie ?
Sachant bien ce qu'il entend par ça va, je préfère changer de sujet...
Moi : je prévois convoquer une conférence de presse demain pour annoncer ma candidature.
Lui : tu t'es finalement décidée alors ?
Moi : oui...
Lui : ok, tu sais que je te soutiendrai toujours mais mon devoir aussi est de te mettre en garde. Ces gens ne te feront pas de cadeau.
Moi : oui je sais et je suis préparée
Lui : on n’est jamais assez préparé. Pour t'abattre, ils vont s'en prendre à tes proches...
Je repense un instant à Samuel, il est clair que je ne voudrais pas que la même chose arrive à Papa, Olivier ou les filles bref mon entourage.
Moi : qu'est-ce que je fais donc ? J'abandonne ?
Lui : tu as déjà décidé et le seigneur a pris note. Abandonner n'est pas l'idée. Juste soit prête moralement, psychologiquement, spirituellement et même physiquement. Je te répète ils ne te feront pas de cadeaux.
Il remarque mon air triste et indécis puis reprend.
Lui : mais si notre seigneur t'a emmené jusqu'à ce niveau c'est pour une bonne raison alors continue de mettre ta confiance en lui et demande-lui de se battre avec toi. Nous, nous te soutiendrons par la prière. L'Eternel des armées fera le reste.
Moi : merci Pasto
Lui : on prie ?
On se lance dans une prière qui dure près de 30 minutes puis je retourne au bureau. Il faut que je prépare mon staff. Ils doivent être prêt pour lancer ma campagne étant donné qu’à partir de demain, les hostilités seront lancées.
(...)
Moi : merci à tous d'être venus ce matin. Bien, si j'ai convoqué cette conférence de presse ce matin c'est pour vous annoncer que je dépose officiellement ma candidature au poste de gouverneur.
Il y a un chahut dans la salle. Je crois que j'ai surpris tout le monde par la nouvelle. Les questions fusent de partout et une attire particulièrement mon attention...
: On se demande bien qu'elles sont vos motivations madame le maire. Serait-ce parce que votre frère est mort il y a peu ?
Je crois qu'il vient de capter l'attention de tout le monde même de ses confrères journalistes.
Il reprend en disant...
: il faut avouer que c'est étrange à peine votre frère est décédé, vous annoncer votre candidature à ce poste. Profitez-vous de la situation pour gagner la faveur du publique ou alors il y a d'autres raisons plus sombres cachées ?
Je crois que là je suis prise de cours. Je commence à comprendre les propos du pasteur. On répond au genre de question ci comment ?