Ce qu'ils ignoraient, c'était que depuis peu, j'attendais la nuit noire pour tomber dans la tristesse et l'angoisse.
J'entendais alors ma mère et mon père faire des bruits qui me tétanisaient. Là, près de moi, je savais juste que je devais faire semblant de dormir.
Et dans ce mensonge, la vérité m'avait plus tard enveloppé. En effet, je ne sais à quel moment je m'étais endormie, mais j'avais finalement réussi à le faire.
Ainsi, le dimanche enfin arrivé, comme plusieurs derniers dimanches d'ailleurs, aucune mention de l'église dans la maison. Pourtant, il y avait un semblant de joie.
Mes frères faisaient une grâce matinée pendant que ma sœur et moi n'en n'avions pas le droit. Nous nous étions donc retrouvées à aider notre mère du mieux qu'on le pouvait, à accomplir les tâches ménagères.
D'ailleurs, Elena qui paraissait être saoulée par ces tâches éveillait grandement ma curiosité. Je ne comprenais pas pourquoi, comme moi, elle ne voulait pas être une femme. Une vraie. Comme maman l'était.
Cette dernière avait préparé du riz cantonais ce jour-là pour nous, et pour papa, du Eru avec du fufu.
Ce met, paressait si délicieux, mais aucun de nous ne pouvait le toucher tant que notre père ne s'était pas servi en premier lieu. Et malheureusement pour nous, il était rentré beaucoup trop tard.
Je ne me questionnais sûrement pas de savoir quel travail mon père avait cherché au point de ne rentrer qu'après minuit.
Car ma conscience n'avait pas des capacités assez développées pour délimiter les activités de la société.
En revanche, je n'étais pas la seule à ne point trouver cela étrange puisque ma mère, évasive, le comprenait.
Nous étions donc dans nos chambres et mes yeux étaient déjà fermés depuis bien longtemps, lorsque mon père rentrait à la maison.
Maman l'avait attendue et malgré sa fatigue, l'accueillait avec un sourire radieux.
Elle courut réchauffer la nourriture et il ne manqua pas de lui faire une remarque incohérente 'pourquoi ne l'as-tu pas fait plus tôt ?' Comme s'il avait pris la peine de la prévenir de l'heure à laquelle il devait rentrer.
Et simplement, elle répondit, 'désolée... ' ne voulant pas créer une dispute et briser ce moment de joie.
Enfin, elle allait pouvoir ressortir de chez elle la tête haute, sans avoir à se cacher. Elle ne pouvait donc qu'encourager son époux. Même si cela ne faisait qu'embraser son égo mal placé.
Elle apporta la nourriture sur la table et pendant que mon père mangeait avec son imbattable appétit habituel, elle l'observait.
'Ç'a dû être une terrible journée.' Commenta-t- elle finalement, venant briser le silence qui tuait depuis bien longtemps leur couple. Surtout qu'elle pouvait voir combien son époux était ivre de son plat si bien fait.
'Femme... ' Commençait-il, 'ton mari est riche !'
'Comment ça ?'
'Figure-toi que j'allais de quartier en quartiers et... ' s'arrêta-t-il, 'un dieu a eu pitié de moi.'
'Dieu soit loué !'
'Que mon dieu soit loué.' Précisait-il.
'Amen'
'Pas le tien !'
'Chéri... ' ne comprenait-elle pas. 'Il n'y en a qu'un seul !'
'Alors pourquoi n'a-t-Il jamais rien fait pour ma situation... jusqu'à aujourd'hui ?'
'Je ne te comprends pas.'
'Écoutes... ' levait-il le doigt, huileux et agressé par du fufu. 'Vous les femmes, c'est ça votre problème. Il est vrai que jamais, vous n'aurez de sagesse, mais essayez d'écouter et de vous taire quand les sages parlent pour au moins mieux comprendre.'
'Désolée, chéri. Je t'écoute.'
'Je marchais et transpirais comme un moins que rien. Moi, Sincère, fils de monsieur Blanc Kogué.'
'Eh mon chéri, je suis tellement désolée.'
'Tu dois l'être.... puis, j'ai rencontré un ancien ami à moi.'
'Qui ça ?'
'Vincent !'
'Oh Vincent Simba ?'
'Tu le connais ?' S'étonnait-il.
'Oui, il prie dans notre ancienne église.'
'Humm... '
'Tu vois chéri, on a tous le même Dieu. Le Seul et l'Unique. Qu'Il soit loué ! Enfin mon heure est arrivée.' Se réjouissait elle, avant même d'avoir entendu la fin de l'histoire.
'Bref... ' Continuait papa. 'Il m'a invité dans un restaurant et je ne pouvais pas refuser. On a échangé et il m'a dit qu'il sait qui j'aurai dû être. Il a reconnu mes capacités et s'est incliné devant mes diplômes.'
'Seigneur... mes ennemis sont vaincus.'
'Arrêtes de tout ramener à toi... c'est mon moment !' Se fâchait-il. 'N'as-tu pas eu le tien ?'
'Excuses moi amour, c'est la joie.'