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2758 Words
4 Elle était grande et élégante ; sa toilette, du meilleur goût, offrait une heureuse combinaison de richesse et de simplicité : un léger voile couvrait son visage, elle le releva et s’excusa de déranger les deux amis, tandis qu’ils dégustaient leur vin, et cela avec l’aisance et la grâce sans affectation d’une femme du meilleur monde. – Acceptez, je vous prie, mes excuses pour mon indiscrétion ; je suis honteuse de venir ainsi vous importuner. Un regard jeté sur cette pièce me suffira. Jusqu’alors elle s’était adressée à Mr Delamayn, qui se trouvait placé plus près d’elle ; elle promenait son regard autour de la chambre. Tout à coup ses yeux tombèrent sur Mr Vanborough. Elle tressaillit et poussa une exclamation de surprise. – Vous ! s’écria-t-elle. Juste ciel ! Qui aurait pu penser vous rencontrer ici ! Mr Vanborough, de son côté, était resté comme pétrifié. – Lady Jane ! s’écria-t-il. Est-ce bien possible ? C’est à peine s’il osa la regarder en parlant. Ses yeux erraient, comme ceux d’un coupable, dans la direction du jardin. La situation était terrible. Également terrible, si sa femme voyait lady Jane, et si lady Jane découvrait sa femme. Personne ne se montrait sur la pelouse, et si le hasard était favorable, Vanborough avait encore le temps d’éconduire la visiteuse. Celle-ci, qui n’avait aucun soupçon de la vérité, lui tendit gaiement la main. – Je crois au mesmérisme pour la première fois de ma vie, dit-elle ; cela est un exemple de sympathie magnétique, Mr Vanborough. Une amie malade désire une villa toute meublée à Hampstead ; j’entreprends la tâche de lui en trouver une, et le jour que je choisis pour aller à la découverte est celui que vous choisissez, vous, pour aller dîner chez un ami. J’ai vu dix maisons, il n’en reste plus qu’une sur ma liste, et je vous y rencontre. C’est étonnant ! Puis, se tournant vers Mr Delamayn, elle ajouta : – C’est, je présume, au propriétaire de la maison que j’ai l’avantage de parler ? Avant que l’un ou l’autre des deux hommes eût eu le temps de répondre un mot, elle s’était tournée vers le jardin. – Quelle jolie pelouse ! Je vois là-bas une dame. J’espère que ce n’est pas moi qui l’ai fait fuir. Son regard interrogeait Mr Vanborough. – La femme de votre ami ? demanda-t-elle. Cette fois, elle attendit une réponse. Dans la situation épouvantable où se trouvait Vanborough, quelle réponse pouvait-il faire ? Non seulement Mrs Vanborough se faisait voir dans le jardin, mais on l’entendait distinctement donner des ordres aux domestiques, d’un ton qui devait faire reconnaître la maîtresse du logis. Si Vanborough disait : « Ce n’est pas la femme de mon ami », la curiosité féminine allait amener nécessairement cette autre question : « Qui est-elle ? » S’il inventait une explication, cette explication donnerait à sa femme le temps de connaître la présence de lady Jane. Après avoir envisagé toutes ces difficultés, durant l’espace d’un moment, Mr Vanborough, respirant à peine, prit à l’instant le moyen le plus court et le plus hardi de se tirer d’embarras : il répondit par un signe de tête affirmatif, qui faisait de Mrs Vanborough Mrs Delamayn. Mais les yeux de l’homme de loi toujours vigilants surprirent ce signe. Il s’arrêta peu au sentiment naturel d’étonnement que devait lui causer une si grande liberté prise vis-à-vis de lui ; mais il en tira l’inévitable conclusion qu’il se passait quelque chose de mal et qu’il y avait là une intrigue à laquelle il ne devait pas se prêter un seul instant, de peur de s’en rendre complice. Il s’avança donc, bien résolu à démentir son client en face. Heureusement, avec sa volubilité ordinaire de paroles, lady Jane l’interrompit, pour ainsi dire, avant qu’il eût ouvert la bouche. – Puis-je vous adresser une question ? L’exposition est-elle au midi ?… C’est évident… j’aurais dû voir au soleil que c’est le midi. Cette pièce et les deux autres sont les seules composant le rez-de-chaussée ?… Et la maison est tranquille ?… C’est encore évident… Charmante propriété ! Selon toutes les probabilités, elle plaira à mon amie beaucoup plus que toutes celles que j’ai vues jusqu’à présent. Voulez-vous m’accorder jusqu’à demain le droit de préférence ? Ici elle s’arrêta pour reprendre haleine, et pour la première fois elle donna à Mr Delamayn l’occasion de répondre. – J’en demande pardon à Votre Seigneurie, dit-il, je ne puis réellement pas… Mr Vanborough passa vivement derrière lui, et murmurant quelques mots à son oreille, l’arrêta avant qu’il eût pu en dire davantage : – Pour l’amour du ciel, ne me démentez pas. Ma femme vient ici ! Au même instant, et supposant toujours que Delamayn était le maître de la maison, lady Jane revint à la charge. – Vous semblez éprouver quelque hésitation, reprit-elle, avez-vous besoin de références ? Elle sourit d’un air moqueur et appela son ami à son aide. – Mr Vanborough ! Mr Vanborough, qui se glissait pas à pas pour se rapprocher de la porte-fenêtre, résolu, quoi qu’il arrivât, à empêcher sa femme d’entrer, ne l’avait pas entendue. Lady Jane le suivit et lui donna sur l’épaule un grand coup de son ombrelle. À cet instant, Mrs Vanborough apparut sur le seuil de la porte-fenêtre qui s’ouvrait sur le jardin. – Suis-je importune ? demanda-t-elle en s’adressant à son mari, après avoir arrêté son regard sur lady Jane. Cette dame paraît être pour vous une ancienne amie. Cela était dit avec un ton de sarcasme nécessairement provoqué par le coup d’ombrelle. La voix de Mrs Vanborough s’était soudain haussée au ton de la jalousie. Lady Jane ne fut pas le moins du monde déconcertée. Elle avait pour elle un triple privilège : celui d’une gracieuse familiarité envers un homme qui la courtisait, son privilège de femme de haut rang et celui de jeune veuve. Elle salua Mrs Vanborough avec toute la hautaine politesse de la classe à laquelle elle appartenait. – La maîtresse de la maison, je présume ? dit-elle avec un sourire. Mrs Vanborough lui rendit froidement ce salut, entra dans la pièce et répondit : – Oui. Lady Jane se tourna vers Mr Vanborough. – Présentez-moi, dit-elle en se soumettant avec résignation aux façons formalistes de la bourgeoisie. – Lady Jane Parnell, dit-il, passant aussi rapidement que possible sur cette présentation. Permettez-moi de vous conduire à votre voiture, milady, ajouta-t-il en offrant son bras à la jeune veuve. Je me charge de vous faire obtenir le droit de préférence pour la location de la maison. Mais non ! Lady Jane aimait trop à laisser une impression favorable derrière elle, n’importe où elle allait. Il entrait dans ses habitudes de se montrer charmante, à l’aide de procédés bien différents pour les personnes des deux sexes. La politique sociale de la haute société, en Angleterre, ne consiste-t-elle pas à savoir se faire bien voir partout ? Lady Jane refusa donc de quitter la place avant d’avoir triomphé de la glaciale réception de la dame du logis. – Je dois renouveler mes excuses, dit-elle, pour m’être présentée à une heure aussi mal choisie. Mon indiscrète arrivée semble avoir d’abord dérangé ces messieurs et Mr Vanborough a bien l’air d’un homme qui voudrait me voir à 100 miles d’ici. Quant à votre mari… Elle s’arrêta et regarda du côté de Mr Delamayn. – Pardonnez-moi de m’exprimer d’une manière aussi familière. Je ne connais pas le nom de monsieur votre mari. Les yeux de Mrs Vanborough, muette d’étonnement, suivirent la direction de ceux de lady Jane et s’arrêtèrent sur l’homme de loi, qui lui était tout à fait étranger. Et Mr Delamayn, qui attendait résolument l’occasion de parler, la saisit à l’instant même… Il n’avait garde de la laisser échapper, cette fois. – Je vous demande pardon, dit-il. Il y a ici quelque malentendu, dont je ne suis en aucune façon responsable. Je ne suis pas le mari de Madame. Ce fut au tour de lady Jane d’être étonnée. Elle regarda l’homme de loi. Inutilement ! Mr Delamayn avait rétabli sa position… Mr Delamayn se refusait à intervenir davantage ; il alla s’asseoir en silence à l’autre bout de la pièce. Lady Jane s’adressa donc à Mr Vanborough. – Quelque malentendu qu’il puisse y avoir, dit-elle, vous, du moins, en êtes responsable. Vous m’avez bien certainement dit que Madame était la femme de votre ami. – Comment !… s’écria Mrs Vanborough en élevant la voix d’un ton incrédule et véhément. L’orgueil inné de la grande dame allait se montrer sous le voile de la politesse. Lady Jane riposta : – Je parlerai plus haut, si vous le désirez. Mr Vanborough m’a dit que vous étiez la femme de Monsieur. Mr Vanborough murmura à voix basse entre ses dents serrées, en s’adressant à sa femme : – Tout cela est un malentendu. Retournez au jardin. L’indignation de Mrs Vanborough se changea un moment en une crainte mortelle, car elle voyait la colère et la terreur se livrer sur le visage de son mari un terrible combat. – Comme vous me regardez !… dit-elle. Comme vous me parlez !… Il se contenta de répéter : – Retournez au jardin ! Lady Jane commençait à voir clairement ce que l’homme de loi avait deviné quelques minutes auparavant : il y avait quelque chose qui n’allait pas bien dans la villa de Hampstead. La maîtresse du logis devait être dans une position irrégulière ; et comme la maison, selon toutes les apparences, appartenait à l’ami de Mr Vanborough, cet ami, en dépit de sa récente protestation, devait avoir dans tout cela sa part de responsabilité. Lady Jane étant arrivée assez naturellement à cette conclusion, ses yeux se fixèrent sur Mrs Vanborough et la toisèrent avec une expression méprisante qui aurait suffi pour éveiller la colère chez la femme la plus douce. L’insulte qui se lisait dans ce regard ne manqua point de blesser au vif la juste susceptibilité de l’épouse. Mrs Vanborough se tourna de nouveau vers son mari, mais cette fois sans frayeur. – Quelle est cette femme ? demanda-t-elle. Lady Jane se montra à cet instant à la hauteur de la situation. Il fallut voir la manière dont elle se drapa dans sa vertu, sans forfanterie comme sans fausse complaisance. – Mr Vanborough, dit-elle, vous m’avez offert tout à l’heure de me conduire à ma voiture. Je commence à comprendre que j’aurais mieux fait d’accepter cette offre à l’instant. Donnez-moi votre bras. – Arrêtez ! dit Mrs Vanborough. Les regards de Votre Seigneurie sont des regards de mépris ; les paroles de Votre Seigneurie ne comportent qu’une seule interprétation. Je suis ici victime de quelque lâche tromperie que je ne comprends pas. Mais ce que je sais… c’est que je ne me laisserai pas insulter dans ma propre maison. Après ce que vous venez de dire, je défends à mon mari de vous offrir son bras. – Son mari ! Lady Jane regarda Mr Vanborough… Mr Vanborough qu’elle aimait… qu’elle croyait libre… qu’elle avait tout au plus soupçonné, jusqu’alors, de chercher à cacher les torts de son ami. Elle baissa le ton ; elle perdit tout à coup ses manières hautaines. Le sentiment de son injustice, si ce qu’elle apprenait était vrai, le tourment de la jalousie, si cette femme avait réellement droit au titre d’épouse, tout cela changea la rougeur dont ses joues s’étaient colorées en une pâleur subite. – Si vous êtes capable de dire la vérité, monsieur, dit-elle avec hauteur, soyez assez bon pour le faire. Vous êtes-vous faussement présenté au monde et à moi comme un homme libre de sa personne et de sa main ? Cette dame est-elle votre femme ? – Vous l’entendez !… vous le voyez ! s’écria Mrs Vanborough, s’adressant à son tour à son mari. Puis elle s’éloigna soudainement de lui en frissonnant de la tête aux pieds. – Il hésite, dit-elle d’une voix défaillante ; grand Dieu, il hésite ! Lady Jane répéta sévèrement sa question. – Cette dame est-elle votre femme ? Il fit appel à son infâme courage et prononça le mot fatal : – Non ! Mrs Vanborough chancela et s’accrocha, pour ne pas tomber, au rideau de la fenêtre qu’elle déchira. Le regard attaché sur son mari, serrant dans sa main ce lambeau d’étoffe, elle se disait : « Suis-je folle ?… Est-ce lui qui a perdu la raison ?… » Lady Jane poussa un long soupir de soulagement. – Il n’est pas marié ! Ce n’était donc qu’un mauvais sujet. Un mauvais sujet, c’est affreux !… mais il peut s’amender. On doit lui adresser des reproches cruels et insister, dans les termes les plus absolus, pour qu’il réforme sa conduite. On peut aussi lui pardonner et l’épouser. Lady Jane prit, avec un tact parfait, la position commandée par les circonstances. Elle condamnait sévèrement le présent, sans interdire l’espoir dans l’avenir. – J’ai fait une très pénible découverte, dit-elle à Mr Vanborough. C’est à vous de me la faire oublier. Bonsoir ! Elle accompagna ces derniers mots d’un regard d’adieu qui exaspéra Mrs Vanborough jusqu’à la frénésie. La pauvre femme s’élança en avant pour barrer le passage à sa rivale. – Non ! dit-elle, vous ne sortirez pas encore ! Mr Vanborough fit un pas pour se jeter entre elles ; mais sa femme lui lança un regard terrible. – Cet homme a menti, dit-elle. Par esprit de justice, pour moi-même, je dois insister pour le prouver. Elle frappa sur le timbre posé sur une table près d’elle. Le domestique entra. – Apportez-moi mon pupitre qui est dans la pièce à côté. Elle attendit, tournant le dos à son mari, les yeux fixés sur lady Jane. Seule, sans défense, elle était debout sur les ruines de sa vie, supérieure à la trahison de Vanborough, à l’indifférence de l’homme de loi, et au mépris de sa rivale. En cet effroyable moment, sa beauté retrouvait une lueur de son ancien éclat. C’était la grande artiste, qui naguère, au temps de sa gloire, tenait des milliers de spectateurs suspendus à ses regards et à ses lèvres, le cœur oppressé par les malheurs imaginaires que subissait la reine du théâtre. Le domestique revint avec le pupitre. Elle y prit un papier et le tendit à Lady Jane. – J’étais cantatrice, dit-elle, quand Mr Vanborough m’a épousée. Les calomnies auxquelles sont exposées les femmes de théâtre faisaient mettre mon mariage en doute. Je m’armai de ce papier qui est entre vos mains. Madame, les gens même de la plus haute société respectent cela ! Lady Jane examina le papier : c’était un certificat de mariage. Elle devint affreusement pâle et, s’adressant du regard à Mr Vanborough : – M’auriez-vous trompée ? demanda-t-elle. Mr Vanborough se tourna vers l’homme de loi qui s’était assis dans le coin le plus reculé de la pièce, attendant les événements d’un air impassible. – Ayez l’obligeance de venir un moment, dit-il. Mr Delamayn se leva. Mr Vanborough se retourna vers lady Jane. – Veuillez, dit-il, en référer à mon homme d’affaires, madame. Il n’est pas intéressé à vous tromper. – Suis-je simplement invité à m’expliquer sur le fait ? demanda Mr Delamayn. Je me refuse à faire davantage. – On ne vous demande rien de plus. Après avoir écouté attentivement cet échange singulier de demandes et de réponses, Mrs Vanborough avança d’un pas. Le fier courage qui l’avait soutenue contre l’outrage faiblissait sous l’influence d’un pressentiment fatal. Elle comprenait qu’il allait arriver quelque chose qu’elle n’avait pas prévu. L’épouvante la faisait frissonner de la tête aux pieds. Lady Jane remit le certificat à l’homme de loi. – En deux mots, monsieur, dit-elle avec impatience, qu’est-ce que cela ? – En deux mots, madame, répondit Mr Delamayn, du papier gâché. – Il n’est pas marié ? – Il n’est pas marié. Après un moment d’hésitation, lady Jane se retourna du côté de Mrs Vanborough debout et muette auprès d’elle, celle-ci la regardait. Lady Jane recula de terreur. – Emmenez-moi ! s’écria-t-elle, terrifiée par ce visage livide et ces grands yeux brillants qui la regardaient avec la fixité du désespoir. Emmenez-moi d’ici !… cette femme me tuera. Mr Vanborough lui offrit le bras. Un silence de mort s’établit dans la pièce. Les yeux de l’épouse les suivaient tous deux avec la même effroyable fixité, jusqu’à ce que la porte se fut refermée sur eux. L’homme de loi, demeuré seul avec la femme reniée et délaissée, remit en silence le certificat sur la table. Les yeux de Mrs Vanborough allaient de ce personnage à ce chiffon inutile ; puis, sans un cri, sans un geste, elle tomba évanouie. Mr Delamayn la releva, la plaça sur un sofa et attendit Mr Vanborough qui allait sans doute revenir. En contemplant ce beau visage, qui gardait sa beauté même dans l’évanouissement, semblable à la mort, il s’avoua qu’il avait été cruel pour cette pauvre femme… Oui ! tout impassible qu’il était, l’homme de loi pensait qu’il avait été cruel. Mais la loi le justifiait. Il n’y avait pas de doute à avoir dans l’espèce. La loi le justifiait ! Le piétinement des chevaux et le bruit des roues se firent entendre au dehors. L’équipage de lady Jane s’éloignait. Le mari allait-il revenir ? Curieuse chose que l’habitude ! Mr Delamayn donnait encore à Vanborough la qualité du mari… en présence de la loi ! en présence des faits ! Les minutes passèrent… Vanborough ne revenait pas. Il n’était pas prudent de provoquer un scandale dans la maison. Il n’était pas désirable, pour Mr Delamayn, sous sa seule responsabilité, de laisser deviner aux domestiques ce qui était arrivé. Mrs Vanborough était toujours là, privée de sentiment. L’air frais du soir pénétrait par la fenêtre ouverte, soulevait les rubans de son bonnet de dentelle et ses cheveux dénoués qui retombaient sur son cou. Là, gisait, toujours immobile, la femme que Vanborough avait aimée… la mère de son enfant. Delamayn allait sonner et appeler du secours. Mais, au même instant, le calme de cette soirée d’été fut de nouveau troublé. L’homme de loi resta la main tendue au-dessus du timbre. On entendait de nouveau le pas d’un cheval et le bruit des roues d’une voiture qui s’avançait rapidement et s’arrêta devant la porte. Était-ce lady Jane qui revenait ? Était-ce le mari ? La cloche retentit, la porte s’ouvrit, le frôlement d’une autre robe de soie se fit entendre dans le corridor, et une dame parut. Ce n’était pas lady Jane, mais une étrangère… de beaucoup plus âgée que la jeune lady, une femme fort ordinaire peut-être, en tout autre temps, mais maintenant presque belle, grâce à la vive expression de bonheur qui rayonnait sur son visage. Elle vit Mrs Vanborough étendue sur le sofa et se précipita vers elle en poussant un grand cri… un cri d’affection et de terreur tout à la fois. Elle s’agenouilla, attira sur sa poitrine cette tête insensible et couvrit de baisers ces joues glacées. – Oh ! ma chérie, dit-elle, est-ce ainsi que nous devions nous retrouver ? Oui ! après tant d’années depuis leur séparation dans la cabine du navire, c’était ainsi que les deux amies devaient se retrouver.
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