Alors qu’Éléa et Katie dansaient et riaient, oubliant le reste du monde, Alexandre, installé à quelques tables de là avec ses amis, continuait de poser son regard sur elles. Un de ses amis, remarquant son air distrait, lui donna un coup de coude.
— On dirait que tu ne peux pas quitter des yeux la jolie demoiselle en rouge, Alex. Allez, viens, on va danser ! lança-t-il avec un clin d'œil complice.
Alexandre hésita une seconde, ses pensées visiblement ailleurs, puis poussé par l’ambiance et par l'insistance de ses amis, il finit par céder. Avec un sourire presque joueur, il se leva et se dirigea vers la piste de danse. Lorsqu’Éléa aperçut Alexandre s’approcher avec son groupe, elle sentit son cœur s'accélérer malgré elle. Elle échangea un regard complice avec Katie, qui comprit tout de suite qu'il s’agissait de « l'homme mystérieux » dont elles avaient discuté plus tôt.
La musique devint plus rythmée, emplissant la salle d'une énergie contagieuse. Alexandre et ses amis dansaient non loin d’Éléa et Katie, et bien qu'elle fût déterminée à l'ignorer, Éléa sentait son regard posé sur elle, l'observant à chaque mouvement. L’ambiance semblait s’intensifier, chaque geste de danse devenant plus fluide, plus insistant, et Éléa essayait de ne pas trop y prêter attention.
À un moment donné, la foule les rapprocha, et Éléa et Alexandre se retrouvèrent face à face, presque côte à côte. Un instant, ils échangèrent un regard intense. Sans un mot, Alexandre tendit la main vers elle, l’invitant discrètement à danser. Éléa hésita, un mélange de curiosité et de défi dans le regard. Après tout, il avait choisi de rester avec Sophie, alors pourquoi ce jeu ? Sa main glissa dans celle d’Alexandre, et ils dansèrent dans une proximité chargée d’ambiguïté, se laissant porter par la musique et la tension du moment. Alexandre la fixait, un léger sourire au coin des lèvres, son regard s’attardant sur chaque détail, chaque expression d’Éléa.
Pour elle, chaque mouvement réveillait des souvenirs enfouis et des sentiments qu’elle avait tenté d’oublier. Leur lien, qu’ils avaient mis de côté, semblait pourtant ne pas avoir faibli. Ils dansaient sans un mot, la musique couvrant le silence qui en disait long. Finalement, Éléa finit par rompre le moment, sentant son cœur battre trop fort. Elle esquissa un rire léger, presque nerveux, et s’éloigna doucement pour rejoindre Katie, laissant Alexandre sur la piste avec un sourire énigmatique.
Katie, amusée, ne put s'empêcher de commenter :
— Eh bien, c’était intense, non ? On dirait que tu as allumé un feu !
Éléa leva les yeux au ciel en souriant.
— Peut-être, mais c’est un feu que je n’ai aucune intention de raviver.
Katie éclata de rire, et elles continuèrent de danser et de profiter de la soirée. Pourtant, Éléa sentait encore le regard persistant d'Alexandre. Ce mélange de nostalgie et de trouble, familier et étranger à la fois, ravivait malgré elle des émotions enfouies.
Lorsque la soirée toucha à sa fin, Éléa et Katie quittèrent le bar, leurs éclats de rire résonnant encore dans la rue. La légèreté de leurs échanges et la musique avaient balayé les tracas d’Éléa le temps d’un instant. Pourtant, en jetant un dernier coup d'œil à l'intérieur du bar, elle aperçut Alexandre, toujours attablé avec ses amis. Il la fixait d'un regard intense, empreint de pensées secrètes et de mille choses non dites.
Le lendemain, Éléa et Katie décidèrent de prolonger leur complicité et de passer le week-end ensemble. Pour Éléa, ces moments de légèreté étaient une bouffée d’air frais, loin des tensions du bureau. Le samedi, elles se lancèrent dans une journée de détente : flâneries dans de nouvelles boutiques, déjeuner dans un restaurant aux spécialités exotiques, et balade dans un parc tout en échangeant rires et anecdotes. L’ambiance était légère, une vraie pause bienvenue.
Cependant, alors qu’elles partageaient un café en fin de journée, Éléa ressentit le besoin de se confier à son amie de longue date. Elle soupira, hésitante, mais finit par se lancer :
— Katie, tu te souviens de cet homme qui n’arrêtait pas de me regarder hier soir ? demanda-t-elle en baissant les yeux.
Katie esquissa un sourire amusé.
— Oui, bien sûr ! Il n’avait d’yeux que pour toi.
Éléa prit une inspiration avant de répondre, sa voix plus basse :
— C’est… mon patron. On travaille ensemble depuis des années, et… on a eu une histoire. C’était intense, passionné… Mais il est marié, et il a décidé d’arrêter pour sauver son mariage.
Katie fronça les sourcils, surprise, et posa une main compatissante sur celle d’Éléa.
— Et toi, comment tu vis ça ? Ça ne doit pas être facile, surtout si vous devez vous croiser au bureau chaque jour.
Éléa soupira, jouant distraitement avec sa cuillère.
— C’est vraiment dur, Katie. Je me suis attachée à lui, et je n’arrive pas à tourner la page. Travailler ensemble chaque jour, voir sa femme régulièrement… c’est épuisant. J’ai demandé à changer de service, pour mettre de la distance, mais j’ai l’impression qu’il ne veut pas me laisser partir. Il trouve toujours une excuse pour repousser.
Katie hocha la tête en signe de compréhension et ajouta doucement :
— Je comprends mieux pourquoi il te fixait ainsi hier. Malgré sa décision de rester avec sa femme, ça se voit qu’il a encore des sentiments pour toi. Mais est-ce juste pour toi, Éléa ?
Éléa baissa les yeux, une expression amère sur le visage.
— Je me dis la même chose. Mais chaque fois que je commence à croire qu’il m’a oubliée, il fait quelque chose, me regarde d'une certaine manière… C’est comme s’il voulait me garder près de lui sans faire un vrai choix. Et ça me bloque, Katie. Je n’arrive pas à avancer.
Katie lui serra doucement la main.
— Tu mérites quelqu’un qui sait ce qu’il veut, Éléa. Pas quelqu’un qui te laisse dans l’incertitude. Une relation où tu te demandes chaque jour ce qu’il veut, c’est épuisant.
Éléa sentit les larmes monter, mais elle les ravala, inspirée par les paroles de Katie.
— Tu as raison. Je ne peux pas rester éternellement dans l’attente. Il doit accepter de me laisser partir ou clarifier ses sentiments. Mais ce flou… je n’en peux plus.
Katie sourit avec tendresse.
— Tu as pris la bonne décision en demandant ce changement de service, Éléa. Il est temps de penser à toi et de cesser de tourner en rond.
Pour la première fois depuis longtemps, Éléa se sentit apaisée. Le soutien de Katie et ses conseils lui donnaient la force de poser des limites et de faire passer son bien-être en priorité. Le week-end s’acheva en beauté, ponctué de rires et de souvenirs d’adolescence. Éléa réalisa qu’il était temps pour elle de reprendre le contrôle de sa vie et de tracer son propre chemin, sans attendre une décision d’Alexandre.