Kelan Harris.

3091 Words
Il faisait nuit, des milliers d'étoiles brillaient dans le ciel. À côté de moi, un ange. Un ange magnifique, dont les ailes étaient si grandes que j'aurais pu m'envelopper dedans, faites de grandes plumes d'un blanc immaculé dont les contours étaient colorés d'un vert de jade. Je frémissais en touchant du bout des doigts les plumes, d'une douceur incomparable. L'ange me regardait, blond aux yeux verts… Rowan  ?...ou… Peter  ?... Peter  ?... Ou Rowan  ?... J'étais perdue, il l'a compris et dans un sourire, il m'a dit de sa voix chantante « Destinée  ! ». Il s'en est allé et je me suis retrouvée seule. J'avais froid. J'ai entendu une voix au loin qui m'appelait, je voulais y répondre, mais n'y arrivais pas, j'ai sursauté quand une main chaude s'est posée sur moi. J'ai ouvert les yeux, ce n'était qu'un rêve. C'était la voix de ma mère et sa main chaude qu'elle avait posée sur mon front en me voyant grelotter, qui m'en avait sorti. - Maman  ? - Oui chérie, je suis là, comment te sens-tu  ? - Mieux, je crois. Les contours sont flous, mais à part ça, je vois à nouveau bien. J'ai également besoin de prendre une douche, j'ai l'air d'avoir beaucoup transpiré, et ça me réchauffera. - Attends, il faudrait que tu manges avant de te lever, Tamy est allée te chercher quelque chose à grignoter et un verre de jus de fruits, tu es sûr que ça va ? - Bien sûr, pourquoi ? - Sélena, tu as dormi trois jours ! - Quoi  ?  ! Quel jour sommes-nous  ? - Dimanche. Il est une heure du matin. - Je l'ai regardée attentivement, tout était parfaitement net à présent. - Oh, zut  ! ! Kelan va être furieux, je devais lui transmettre les cours à rattraper, vendredi ! - Ne t'inquiète pas, Rowan lui a donné ton numéro de téléphone et il a appelé pendant que tu dormais, il me semble être un garçon tout à fait charmant, pourquoi ne m'en as-tu pas parlé ? - Parce que je l'ai à peine vu en cours d'histoire et depuis j'ai dormi trois jours ! Lui dis-je, un peu sur les nerfs en repensant à ce qui s'était passé trois jours plus tôt. Exaspérée, j'ai replié les genoux et enfoui mon visage dans mes mains. - Mes lunettes  ? Où sont mes lunettes ? J'ai tout à coup été prise de panique. - Sur ta table de chevet, pourquoi  ? - Maman, je te dis que je vois parfaitement bien, alors que je ne porte pas mes lunettes et tu ne réagis pas ? ! ! - Parce que nous nous doutions que cela arriverait bientôt. En revanche, nous ne savions pas comment. - De quoi tu parles  ? Et puis d'abord, comment ça NOUS ? Tamy aussi est de mèche avec toi ? La colère et l'incompréhension résonnaient. - Depuis que nous sommes ici, j'ai l'impression que tu me parles en langage codé, ou en chinois, mais là, c'est carrément de l’extraterrestre ! Quand vas-tu enfin me dire les choses clairement ?  ! ! - Pardonne-nous Sélena, est intervenue Tamy en entrant dans ma chambre avec un bol de lait, des céréales et un verre de jus d'orange, mais il y a des choses que tu comprendras toi-même et que nous ne pouvons t'expliquer. - Super  ! Je vais aller loin avec ça ! J'ai avalé mon en-cas en silence et je suis allée me faire couler un bain pour me détendre. J'ai terminé par une douche bien fraîche qui m'a revigorée. Je me suis enveloppée dans un drap de bain et me suis enfoncée dans le canapé, en zappant les chaînes de la télévision, à la recherche d'un bon film. J'ai fini par regarder une pièce de théâtre burlesque que je ne connaissais pas, mais il fallait bien se douter qu'au milieu de la nuit le choix ne serait pas énorme, au moins elle avait le mérite de me changer les idées. Mon téléphone a sonné. J'ai regardé l'heure, mon réveil indiquait trois heures et demie. En décrochant, je n'ai pas identifié le numéro de mon correspondant. - Allô  ? Qui est-ce  ? - C'est Kelan Harris, je te réveille ? - Non, j'ai dormi trois jours durant alors, je ne compte pas me recoucher maintenant. Et pourquoi ne dors-tu pas, toi ? - Je voulais savoir comment tu allais. - Vraiment  ? Pourtant, ma mère m'a dit que tu comptais passer cet après-midi pour récupérer les leçons, que je suis d'ailleurs désolée de ne pas avoir pu te donner vendredi, tu aurais su à ce moment-là. - Tu sais, tu as le droit de respirer quand tu parles. - Désolée, lui dis-je d'un rire nerveux. - Je suis heureux de voir que tu as retrouvé ta bonne humeur, et effectivement, j'avais prévu de venir cet après-midi, mais puisque tu es réveillée, puis-je venir maintenant ? - Euh… Oui, si tu veux… Tu seras là dans combien de temps ? - De combien de temps as-tu besoin pour être décente ? - Cinq minutes, dis-je légèrement perplexe. Mais pourquoi serais-je indécente, d’abord ? - Alors vient m'ouvrir dans cinq minutes. En riant, il a raccroché avant même que je réagisse. J'ai sauté sur mes pieds, ouvert mon armoire à la volée et y ai déniché un chemisier blanc et un mini-short en jeans, mon maillot de bain blanc et mes tongs blanches, (Tenue adéquate pour un temps si lourd et humide). J'ai filé dans la salle de bain pour m'habiller et me démêler rapidement les cheveux avant de les attacher en un chignon lâche. Ceci terminé, je me suis hâtée de descendre au rez-de-chaussée. J'ai constaté au passage que ma mère, qui devait être épuisée d'avoir veillé trois jours durant, avait dû aller se coucher. Je me suis précipitée sur la porte d'entrée que j'ai ouverte avec un peu trop d'enthousiasme. Il était là, appuyé contre sa voiture garée dans la rue, les yeux rivés sur moi, et il riait de mon enthousiasme débordant. - Il faut que je vienne te chercher où tu viens toi-même ? Il a ri de plus belle et s'est avancé dans l'allée. J'ai alors réalisé, que c'était la première fois que je le voyais de toute sa personne. Ses cheveux bruns légèrement longs encadraient son visage parfait, il devait faire environ une tête de plus que moi. La chemise blanche dont il avait retroussé les manches sur ses avant-bras, laissait transparaître son torse musclé et ses épaules carrées. Un bermuda en jeans et une paire de tongs en cuir marron complétaient sa tenue. Je suis restée bouche bée, en pleine admiration, pendant cinq bonnes minutes. - Puis-je entrer, où allons-nous discuter sur le pas de la porte ? M'a-t-il demandé avec douceur. Sa voix était encore plus voluptueuse que dans mon souvenir. On aurait dit une mélodie envoûtante. - Oui bien sûr, excuse-moi de mon impolitesse, dis-je en m'empourprant. - Je ne vais certainement pas me plaindre quand une jolie fille reste en admiration devant moi, s'amusait-il. J'ai senti le feu qui m'était monté aux joues s'épanouir davantage et j'essayais, avec peu d'efficacité malheureusement, de le lui cacher. Suis-moi, je vais te donner ce dont tu as besoin pour rattraper les cours, tu as certainement d'autres choses à faire, que de traîner là au beau milieu de la nuit. - Non pas aujourd'hui, c'était peut-être un peu prétentieux de ma part, mais j'avais espéré que tu accepterais de passer la journée en ma compagnie. J'ai stoppé net en haut de l'escalier. - Ne t'affole pas, si tu n'es pas d'accord, je m'en irai de suite après que tu m'aies donné les fiches. - Ce n'est pas ça, dis-je en me retournant pour le regarder en face. Mon cœur s'est affolé sous ma poitrine et j'ai croisé les doigts pour qu'il n'ait pas l'ouïe assez fine pour l'entendre. - Qu'est-ce alors ? - C'est juste que je n'arrive pas à comprendre comment quelqu'un comme toi, qui ne me connaît pas, peut bien avoir besoin de prendre de mes nouvelles au beau milieu de la nuit quand je vais mal ou bien avoir envie de passer du temps avec moi, alors que tout le lycée a dû te donner son point de vue à mon égard, et que la parfaite Ambre Watson t'a certainement déjà fait ses avances… J'ai repris mon souffle en pensant à mes paroles et me suis sentie nulle. Je suis entrée dans ma chambre, Kelan sur les talons, je sentais son regard vrillé sur mon dos. Il n'avait toujours pas répondu à ma question. Je me suis dirigée vers mon bureau et j'ai fouillé rapidement dans mes affaires pour y trouver quelques fiches d'histoires, de maths et de sciences, que je lui ai tendues. Il les a posées sur la table basse et est venu s'appuyer contre mon bureau les bras croisés sur son torse. Le silence commençait à devenir gênant. - Pardonne-moi si je t'ai offensé, ce n'était pas ce que je désirais. - Je ne t'en veux pas. Et saches que je ne prête pas attention aux bruits de couloir, je préfère me forger ma propre opinion. De plus, c'est vrai qu'Ambre a jeté son dévolu sur moi, mais c'était déjà trop tard, j'avais remarqué une autre fille qui m'a l'air beaucoup moins superficielle et plus agréable qu'elle. Il m'a gratifié d'un sourire en coin. Idiote comme je suis, je n'ai pas compris tout de suite à quoi il voulait en venir. - Je veux bien que tu veuilles te faire ta propre opinion, mais pourquoi camper devant chez moi au milieu de la nuit sans savoir si j'accepterais de t'ouvrir ma porte ? Cette remarque l'a rendu un peu trop sérieux. - Tu n’as vraiment pas une petite idée ? - Non… Et puis à la réflexion, je préfère ne pas le savoir, ça m'évitera les ennuis. - Avec ta mère  ? - Si c'était ma mère le problème, tu ne serais pas dans ma chambre à quatre heures du matin ! Cette réplique a eu le mérite de le dérider, même si son visage affichait clairement de la tristesse. - J'étais en train de regarder une pièce de théâtre quand tu m'as appelé, tu veux la regarder avec moi, elle est bientôt finie ? - D'accord, mais après, on va regarder le lever du soleil sur la plage. - Ça marche  ! Nous nous sommes installés chacun à un bout du canapé. J'essayais de suivre ce qui se passait à l'écran, mais je n'arrivais pas à me concentrer. Il avait vissé son regard sur moi, cela me mettait mal à l'aise, à tel point que j'ai fini par me lever. J'ai ouvert les rideaux de toutes les baies vitrées et apercevant une lueur à l'horizon, je me suis retournée : - Tu viens, l'aube commence. Je ne lui ai pas laissé le temps de répondre, j'ai attrapé un plaid et suis descendue jusqu'à la plage. J'ai étendu le plaid sur le sable et me suis assise dessus. Je l'attendais depuis déjà cinq minutes et toujours personne. J'ai ratissé la plage des yeux et l'ai trouvé, debout, loin derrière moi, près de la terrasse, perdu dans la contemplation du soleil levant. Furieuse contre moi-même d'avoir osé penser, qu'il voulait rester pour moi en dépit du fait qu'il ait affirmé être attiré par une fille du lycée, je me suis relevée et sans même ramasser le plaid, je suis rentrée à la maison et je suis montée m'allonger dans ma chambre. Il n'a pas bougé d'un sourcil quand je suis passée devant lui. Je suis restée là un long moment, à ne plus savoir quoi faire ni quoi penser, seulement que j'étais une idiote égoïste. Au bout d'un moment, j'ai réalisé qu'il n'était pas remonté pour récupérer ses fiches et me suis décidée à aller voir s'il était encore là. À mon grand étonnement oui et il n'avait pas bronché. J'ai traversé la terrasse, ai descendu quelques marches et de mon perchoir, lui ai tendu les feuilles : - Je ne voudrais pas que soit moi qui t'empêche de les récupérer et donc de réviser. Et si tu as rendez-vous avec ta copine sur la plage, évite de le faire devant chez moi s'il te plaît, je ne tiens pas à ce que tout le lycée sache où j'habite. De plus c'est une plage privée. Sur ce, je lui ai tourné le dos et ai commencé à remonter les marches quand une main, d'une douceur et une texture impensable, m'a attrapé le poignet et m'a obligé à me retourner pour me retrouver face à lui. De son pouce, il essuya des larmes que je n'avais pas senties couler. - Je ne suis pas là pour profiter de l'accès à une plage privée et j'ai encore moins de petite amie… - Dans ce cas pourquoi es-tu venue ? Tu ne me parles pas, tu passes ton temps soit à me fixer, soit à m'ignorer. Comment peux-tu expliquer que tu savais que c'était mon anniversaire, et que tes yeux m'ont brûlé la cervelle la première fois que je t'ai regardé ?  !  !  ! Et que justement, tu te trouves là à mon réveil ! Mes émotions reprenaient le dessus et les larmes repartaient de plus belle. - Pardonne-moi je ne voulais pas te faire souffrir, mais je dois avouer que tu es magnifique sans tes lunettes. Un brin d'espoir dans les yeux, il m'a souri. - Je ne peux pas tout t'expliquer pour le moment, mais une chose est sûre, je ne veux pas te perdre. - Je ne sais pas quoi te dire… - Alors ne dis rien et viens avec moi. Il a pris ma main, ce qui a provoqué en moi une irrésistible attirance envers lui, tel un aimant, et m'a entraîné sur la plage, là où j'avais laissé le plaid. Je me suis assise et sans lâcher ma main, il s'est installé derrière moi et m'a serré tout contre lui. Je ne saurais expliquer cette sensation de bien-être que j'ai ressenti et qui a envahi mon corps tout entier en cet instant. Je n'avais pas imaginé qu'une relation puisse être aussi intense, bien que nous nous connaissions à peine. Il devait être environ huit heures trente quand Tamy nous a proposé le petit-déjeuner. - Merci Tamy, on arrive dans une minute, lui répondis-je. À genoux, face à Kelan cette fois, je le regardais intensément et découvrais les contours de son visage sous mes doigts. Il me sourit, déposa un b****r sur ma joue et m'aida à me relever. Sur la terrasse, nous avons découvert un salon de jardin, qui n'y était pas deux heures plus tôt, où Tamy nous avait servi le petit-déjeuner. - Tamy  ! Depuis quand maman a-t-elle acheté un salon de jardin ? Et tu as acheté des croissants, on fête quelque chose ? Elle a regardé Kelan et a souri avant de nous laisser. - Pas si tu ne le veux pas  ? Me dit-il en me caressant la joue. - Pendant combien de temps vais-je encore devoir supporter votre langage codé ? - Quel langage codé ? - Vous ne faites jamais de phrases explicites, vous ne dites les choses qu'à moitié et ne m'expliquez jamais rien ! Quand il n'y avait que ma mère, c'était déjà étrange, quand Tamy s'y est mise, j'ai littéralement pété les plombs et maintenant toi… ça m'exaspère. - Je te promets de faire des efforts. - Alors dis-moi clairement ce qu'on est censé fêter, pour commencer. - Nous. - Mais cela ne fait que quelques heures, et rien n'est officiel que je sache. Qu'est-ce qui nous prouve que le « nous » existera encore demain ? - Rien, si ce n'est peut-être le destin. - Pourquoi moi  ? Soufflais-je. Il a haussé les épaules, je n'ai eu pour seule réponse qu'un large sourire éblouissant. Encore une fois, j'avais raté une occasion de me taire, et de me contenter de ce que j'avais au moment présent. - Je n'ai pas très faim, tu veux venir te baigner ? L'eau est encore fraîche à cette heure-ci, lui demandais-je en feignant l'enthousiasme. - Ce sera avec plaisir si tu me promets de chasser tes idées noires de ta tête. Je ne veux que du positif, seulement toi et moi. Promis  ? - Promis. Nous avons délaissé notre petit-déjeuner, et semant nos vêtements derrière nous, nous nous sommes jetés à l'eau. Je me laissais flotter au rythme des vagues, le soleil réchauffant ma peau, je réfléchissais aux événements de ce matin. Kelan me sortit de ma rêverie, en effleurant mon bras. Je me suis redressée, et encore une fois, je suis restée admirative devant sa beauté. L'eau faisait miroiter sa peau au soleil. Voyant que je ne me lasserai pas de le regarder, il s'est avancé vers moi, prudemment, afin de me laisser le choix de réagir ou non, de ne pas m'offusquer. J'ai répondu favorablement à sa requête, silencieuse et pourtant explicite, en avançant également vers lui. Il a franchi le dernier pas qui nous séparait. Alors, j'ai osé laisser courir mes doigts sur son torse et senti un léger frisson le parcourir. Lui, a détaché mes cheveux et a retenu son souffle quelques secondes : - Je crois qu'ils ont poussé, me dit-il en respirant à nouveau et en passant une de mes mèches par-dessus mon épaule pour que je constate les faits. - En effet, ils ont pris environ dix centimètres depuis que tu es arrivé cette nuit, lui dis-je calmement. Il m'a regardé avec étonnement. - Tu ne t'affoles pas  ? Pas de crise d’hystérie ? - Non, il me semble que tu as sous-entendu qu'il fallait te faire confiance et tu m'as clairement demandé de ne penser qu'à nous en chassant mes idées noires, alors j'obéis. De plus, sans savoir bien pourquoi, j'ai l'impression que cela ne fait que commencer… Il m'a souri, l'air d'être ravis de ce qu'il venait d'entendre et j'ai vu une lueur s'allumer dans ses yeux. - Dans ce cas, je n'ai qu'une seule chose à ajouter… Il s'est penché vers moi et a déposé un délicat b****r sur mes lèvres. Mon cœur a explosé de joie et la lueur de ses yeux s'est transformée en flamme scintillante de mille feux. Je me suis collé à lui, qui m'a entouré de ses bras, et j'ai ressenti à cet instant, jusqu'au plus profond de mes entrailles que là où il serait, là serait ma « Destinée ».
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