ÉPISODE 21
Sur ces mots du roi, le prêtre du Fa qui est en même temps le marabout spécial du roi enlève de sa tête le chapeau qu’il a porté. C’était en effet son petit sac appelé Fakpo qui contient ses accessoires de consultation, notamment le tableau divinatoire sur lequel il va dessiner des signes, des cauris, des graines, des feuilles d’hysope, des plumes d’oiseaux, des ossements, du cola, de la coque, des capsules, mais surtout le chapelet qui va lui permettre de faire la consultation. Il les étales devant lui sur la natte où il est assis. Le devin dans son accoutrement propre à un devin, il entonne une chanson pour invoquer des esprits et rendre hommage.
- C’est comme ça que cela doit se passer dans cette maison, laisse entendre le roi quand il entend les paroles de la chanson du devin.
Le devin rassemble les cauris qu’il met sur un tissu blanc. Il les couvre de sa mère puis se met à les taper très légèrement et la consultation commence. C’est alors qu’il commence la consultation proprement dite par l’invocation de Dieu Sêgbolissa, de tous les dieux qui existent dans le royaume et qu’ils vénèrent. Il invoque ensuite tous les devins décédés puis tous les vivants qui font partie de sa promotion et de son collège initiatique, le prêtre initiateur qu’on appelle Tobokon. Il invoque enfin tous les grands prêtres initiateurs. Il invoque leur concours pour la bonne réussite de la consultation et c’en est suivi de longues incantations. Il ramasse les cauris avec la main droite et montre les quatre points cardinaux avec, le ciel et la terre puis il commence ses manipulations dont lui seul a la connaissance. Il les jette sur le tissu disposé sur la natte en face lui pour obtenir le premier signe. Il observe la disposition des cauris puis les ramasse à nouveau. Le roi lui par contre observe en silence la consultation. Avec les cauris enfermés dans sa main cette fois-ci, le devin reprend avec les incantations en patois une nouvelle fois. Il dirige sa main droite contenant les cauris vers les quatre points cardinaux à nouveau puis vers le ciel et la terre et les jette sur le tissu blanc en face de lui. Il observe la disposition des cauris et dit au roi sans lever la tête :
- Ce que révèlent les ancêtres, dit le devin puis se tue d’abord.
- Qu’est-ce que les ancêtres ont dit ? Demande le roi, pressé de découvrir celui que les ancêtres ont choisi pour prendre la veuve comme femme.
Toujours avec ses yeux sur les cauris, le prêtre du Fa entame des incantations pour bien voir dans ce que révèlent les anciens avant de le transmettre fidèlement au roi sans faute. Il se saisit encore des cauris avec sa main droite et reprend avec le même geste de tout à l’heure une troisième fois. Il oriente sa main droite qui contient les cauris vers les quatre coins du monde à nouveau puis vers le ciel et la terre et les jette sur le tissu blanc en face de lui. Il observe la disposition des cauris et s’écrie :
- Ah !
- Qu’est-ce qu’ils ont dit ? Interroge le roi une deuxième fois alors que le devin de son côté poursuit ses manipulations.
Après observation de la disposition prise par les cauris, le devin lève ses yeux et fixe le roi dans les yeux et lui dit :
- Votre majesté !
- Parle-moi Awogbogbo.
- C’est ce que l’oracle a dit ça hein.
- Qu’est-ce que l’oracle a dit suite à tes nombreuses tentatives de trouver réponses à mes inquiétudes ?
- L’oracle est en train de dire ici que c’est à l’enfant de soi qui est le benjamin de tous les enfants qu’on a remis une pareille femme pour avoir la paix au champ et à la maison.
- Je te remercie énormément. Donc, si je regarde bien dans ce que tu viens de dire, pour faire plus simple, c’est à mon fils Adivê qu’il faut confier de pareille bagage pour que tout se passe bien !
- C’est exactement cela.
- Je remercie beaucoup les ancêtres et je te remercie beaucoup également pour avoir tranché cette situation qui m’a pendant longtemps donner trop de réflexion. Je vais de ce part charger le crieur public d’alerter tous les habitants du royaume pour qu’ils me rejoignent sur la place publique pour être informés de ce qui sera fait. Je te remercie beaucoup d’être venu.
- C’est toujours un grand plaisir de vous servir mon roi. Je pense que s’il n’y a plus rien, je vais demander à prendre la route.
- La voie est libre. Merci beaucoup à toi et bon retour à toi. Je te ferai appel dès que j’aurai à nouveau besoin de tes nobles services.
- C’est sans problème votre majesté. Je suis là pour vous quand le voudrez. Disons d’ailleurs que c’est tout un honneur pour moi de vous être utile et de vous rendre service.
- Rentre bien. Je vais aller régler certaines choses en urgence.
- D’accord, votre majesté.
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- J’ai des enfants, mais pourtant je continue de me déranger autant à faire tous ces travaux comme si je n’ai jamais enceinté, laisse entendre Dah Anagonou qui était allé chercher des feuilles fraiches d’arbre pour les animaux de son bétail. Mais par contre, si c’est pour se nourrir et crier qu’ils ont faim, ils ne savent que faire ça et à se plaindre tout le temps à moi. En dehors de leur ventre, ils ne savent faire rien d’autres de leurs cinq doigts. Purée.
Il se met ensuite à ranger des bois de fagot. De loin, une voix d’homme en train de chanter venait vers la cour de la maison de Dah Anagonou. C’était en fait Gangnon qui venait le voir son ami pour prendre connaissance de la situation de leur cotisation pour savoir s’il pouvait déjà avoir son argent qu’il a cotisé auprès de Dah Anagonou…