— Bonjour Messieurs, salua la réceptionniste alors qu'Alonzo et Henrik pénétraient l'hôtel.
Henrik la salua de la main ; quant à Alonzo, il était trop préoccupé pour répondre. Ils prirent l'ascenseur pour réintégrer leur suite. Le téléphone portable d'Alonzo sonna une nouvelle fois. Il s'empressa de décrocher et son visage se crispa lorsqu'il reconnut la voix du ravisseur. Cette fois-ci, il avait appelé avec un autre numéro.
— J'espère que vous n'avez fait aucun mal à Anastasia. Elle porte mon enfant.
— Ça, je le sais. Empresse toi pour me donner ces quarante millions de dollars si tu ne veut pas avoir sur ta conscience la mort de ta femme et celle de ton enfant.
— Je vous enverrai cet argent comme prévu, mais s'il vous plaît ne lui faites aucun mal.
— Cela dépendra de toi.
Henrik s'approcha de lui pour lui murmurer quelque chose à l'oreille.
— Cet homme, je ne lui fais pas du tout confiance. Demande-lui de te montrer des preuves qu'Anastasia est bien avec lui et vivante.
— Écoutez, avant que je ne vous envoie cette somme, prouvez-moi que vous avez ma femme et qu'elle se porte bien.
Un silence se fit entendre. Henrik et Alonzo se regardaient comme s'ils pensaient à la même chose. Serait-il en train de le duper ? Vu qu'il ne disait plus rien Alonzo était certain qu'il voulait lui faire croire qu'il détenait Anastasia juste pour lui soutirer de l'argent. Après tout il était un homme très réputé et c'était une raison valable pour qu'un malfaiteur lui réclame de l'argent. Cet homme devrait probablement connaître tout sur lui. Il avait peut-être su qu'Anastasia avait disparu et voulait en conséquence profiter de la situation. Cet homme voulait tout simplement lui jouer un tour et s'il s'avérait que ses suppositions étaient justes, il ne comptait pas se laisser faire.
— Alonzo ! Fit Anastasia.
Le concerné ferma ses paupières et serra les poings. Cet imbécile tenait effectivement sa femme. Il aurait voulu que ça ne soit le cas. Henrik lui tapotait l'épaule tandis qu'il baissait furtivement la tête.
— Alonzo, je t'en supplie sors-moi de là. Je sais que tous deux, nous avons eu des moments difficiles mais ne me laisse pas dans les griffes de cet homme. Je porte après tout ton enfant. Pense au moins à lui. Fais ce qu'il te demande, envoie lui cet argent, cria-t-elle en sanglots.
Son cœur s'alourdit lorsqu'il entendit la voix de sa femme qui la suppliait de lui venir en aide. Tout était de sa faute, ne cessait-il de se répéter. S'ils ne s'étaient disputé cette nuit là, Anastasia n'aurait pas quitté l'hôtel et serait certainement en ce moment avec lui.
— Calme-toi Anastasia, je ferai n'importe quoi pour te faire sortir de là, rassura t-il. Il t'a fait du mal ?
— Non, mais si tu ne lui envoies pas ce qu'il demande, je crains qu'il mette sa menace à exécution.
— Ça suffit maintenant, pesta le ravisseur. Maintenant tu as une preuve qu'elle est avec moi. Il ne te reste plus qu'à m'envoyer l'argent si tu veux la récupérer. Tu as de quoi noter ?
Henrik fouilla dans l'un de ses tiroirs et en ressortit un stylo et de quoi noter. Il le donna ensuite à Alonzo.
— Oui.
Il nota le numéro de compte dans lequel il devait envoyer l'argent.
— Ta femme t'attendra près du grand dépotoir de la ville. Tu viendras seul.
Il raccrocha tandis qu'Alonzo se frottait le visage. Plus vite il enverrait ce qu'il demandait, plus vite ce cauchemar sera terminé.
***
Calypso ramassa les billets qu'Henrik avait laissés sur la table et rangea le verre et le plat qu'il n'avait pas touché. Ce qu'elle trouvait bizarre. C'était vraiment dommage de gâcher un si bon plat, pensa t-elle la mine serrée. Si ça ne tenait qu'à elle, elle le mangerait mais Teddy s'y opposerait. Jeter la nourriture était un grave péché. Mais qu'est-ce ce qu'il lui avait pris d'en faire la commande s'il n'avait pas du tout faim ? Quand elle y pense, dehors des personnes misérables mouraient de faim et luttaient pour manger à leur faim pendant que des personnes riches gaspillaient de l'argent d'un plat qu'ils touchent à peine. La nature devait absolument revoir ses lois.
Le restaurant se remplissait à petit coup. Elle se remit au travail en passant de table à table pour prendre les commandes. Il arrivait parfois qu'elle repense à cet homme à l'apparence glaciale qui l'avait regardée froidement sans même daigner lui répondre à chaque fois qu'elle lui avait demandé ce qu'il voulait commander. Elle était loin d'imaginer qu'il existerait encore des hommes sauvages dans un monde si évolué.
Il sonnait huit heures du soir lorsque Calypso entrait la clé dans la serrure de son appartement. Elle déposa les sacs plastiques qu'elle tenait dans la cuisine. Cette journée l'avait complètement exténuée et même si son nouveau boulot l'épuisait elle était quand même heureuse de pouvoir travailler. Elle en avait marre de rester chez elle toute la journée sans rien faire. À présent, elle pourrait payer régulièrement le loyer, les factures d'eau et d'électricité. Elle pourrait également manger à sa faim et Blair pourrait arrêter de lui tendre la main pour lui venir en aide.
Elle retirait ses cuissardes et traînait ses pieds nus sur la moquette du salon en regagnant sa chambre. Phineas en ressortait avec une bouteille d'alcool à la main presque soûl. Elle était surprise de le voir de si tôt. D'habitude il rentrait toujours tard. Il s'adossa contre la porte et vidait outrageusement le liquide alcoolisé dans sa gorge puis essuya du revers de sa main sa bouche après avoir poussé un soupir de satisfaction. Elle l'observait d'un air dégoûté ; elle le toisait. lorsqu'elle voulut passer, il l'arrêta d'un geste de la main. Il posa ensuite sa main sur l'encadrement de la porte pour lui barrer le chemin.
— D'où viens-tu comme ça ? Interrogea-t-il en poussant un hoquet. Ces quatre derniers jours tu t'absentes de la maison.
— Cela ne te regarde pas, cracha Calypso.
—Bien-sûr que ça me regarde tant que tu vis sous mon toit. Alors j'attends.
— Eh bien comme tu es incapable de te trouver un emploi pour payer nos factures, Calypso, ta chère épouse frappait de porte à porte depuis près d'un mois à quémander du boulot. Au cas où tu ne l'aurais pas remarqué espèce de bon à rien, le frigo est complètement vide et il fallait que l'un de nous deux bouge son c*l pour le faire remplir.
— C'est bien et je suppose que tu as finalement trouvé du boulot, dit-il en poussant la jeune femme de son chemin.
Il s'avança vers la cuisine, Calypso le suivait.
— Des provisions ! S'exclama-t-il lorsqu'il jeta un coup d'œil à l'intérieur des sacs plastiques.
Il en ressortit une pomme et la croqua.
—Ma tendre épouse pourra t-elle bien me faire à manger ? S'enquit-il en prenant un air puéril.
Elle s'approcha, les traits déformés vers l'évier et se servit un verre d'eau.
— Tu as même acheté des pattes alimentaires !
Il avait déjà vidé tout le contenu sur le comptoir.
— J'aimerais bien que tu me fasses des Spaghettis, renchérit-il en frottant ses mains.
— Tu n'as qu'a les faire toi-même, beugla t-elle en reposant le verre après avoir bu le contenu.
Fugace, elle quitta la cuisine. Elle sentait le regard meurtrier de son mari sur son dos. Elle s'enferma dans sa chambre en l'insultant intérieurement.
Le lendemain matin, Calypso se réveilla par les cris de son mari qui ne cessait de l'appeler depuis le salon.
— Qu'est-ce qui lui prend de me réveiller à une heure pareille ? Grogna-t-elle lorsqu'elle regarda son réveil qui sonnait sept heures.
Elle sortit de sa chambre d'un pas nonchalant pour aller le rejoindre. Elle fût horrifiée lorsqu'elle vit qu'il tenait un de ses livres avec un briquet allumé.
— Tu me prépares le petit déjeuner ou je te jure que tes précieux bouquins que tu chéris tant partiront en cendres, menaça-t-il.
— Très bien. Je te prépare le petit déjeuner mais avant ça tu les pose sur la table, fit-elle posément.
Il éteignit son briquet et balança le livre dans un coin de la pièce. Elle accourut pour le récupérer et s'assura qu'il n'était pas abîmé. Elle remit le livre à sa place et se rendit à la cuisine. Pendant ce temps-là Phineas s'assit sur le canapé, les pieds posés sur la table basse. Il attrapa la télécommande et défilait les chaînes jusqu'à s'en lasser.
Calypso cassait les œufs dans le saladier en repensant à ce que son mari avait tenté de faire. Quel imbécile ! D'abord il ne faisait rien pour acheter de quoi se faire un repas et il se permettait de la forcer à lui faire la cuisine. Elle coupa furieusement les oignons et manqua de se couper les doigts. Elle était fatiguée de cette situation. S'il ne la battait pas, il faisait tout pour la mettre en colère. Qu'est-ce qui la retenait ? Elle pouvait bien ramasser ses affaires et le laisser tout seul dans sa vie de m***e. Après tout, elle ne ressentait plus rien pour lui. Elle s'était mise à le détester depuis le premier jour où il avait osé porter la main sur elle parce qu'il n'avait pas trouvé de l'argent dans son sac pour s'acheter une bouteille. Vraiment ! Qu'est-ce qui la retenait ? Se demandait-elle amèrement en plantant agressivement le couteau dans la planche à découper.
Elle sortit du placard la bouteille contenant du piment et une idée machiavélique lui vint soudainement à l'esprit. Elle souriait dangereusement telle une personne qui voulait prendre sa revanche. Elle vida tout le contenu dans le liquide et pouffa.
Elle se présenta devant lui plus énervée que jamais. Elle posa son plat sur la table tandis qu'il la regardait avec un sourire narquois dans le coin.
— Tu vois quand tu veux, fit-il en souriant.
Elle ramassa ses livres pour les éloigner le plus loin possible de lui, de peur qu'il ne mette sa menace à exécution après qu'il eût gouté son plat.
— Ça sent vraiment très bon. Il y a longtemps que je n'ai plus gouté à tes plats.
— Normal, puisque que tu n'apportes plus rien dans cette maison. Comment veux-tu que je te fasse des repas si tu ne me donnes pas de quoi acheter des provisions.
—Je te rappelle qu'on m'a viré de mon poste, s'indigna t-il.
— En tout cas, bon appétit, fit-elle avec un sourire qui ne présageait rien de bon.
Il haussa les épaules et Calypso rejoignit sa chambre. Après avoir fermé la porte à clé, elle rangeait ses livres dans l'un de ses tiroirs et s'assit en tailleur dans son lit, les bras croisés, les yeux rivés au plafond attendant qu'il exprime sa colère.
— Calypso!!!
Elle ricanait jusqu'à en couler les larmes et se laissa tomber dans le lit. Elle riait plus fort au fur et à mesure que ses cris s'élevaient. Ce dernier frappa contre le bois de sa porte en la fulminant des menaces.
_ Tu l'as bien mérité, murmura-t-elle. Tu n'aurais jamais tu t'enprendre à mes précieux livres. Jamais!
— Calypso, je te jure que tu vas me le payer. Tu ne perds rien pour attendre.