CHAPITRE II : LA COURONNE D’OR PERDUE-1

3004 Words
CHAPITRE II LA COURONNE D’OR PERDUE « Eh bien, dans les vieux temps anciens, avant que saint Patrick bannisse les serpents hors d’Irlande, la colline là-bas était un endroit d’une importance tout à fait formidable. Car, plus que certain, c’était le Roi des Serpents lui-même, et personne d’autre, qui y vivait. Dans ces temps-là, il y avait, tout en haut de la colline, un p’tit lac de rien du tout, avec des arbres et des laiches et des choses com’ça qui poussaient autour, et c’était là que le Roi des Serpents faisait son nid, ou quel que soit le nom que les serpents donnent à leur maison. Gloire à Dieu ! Mais tous autant que nous sommes, nous ne savons rien du tout d’eux, rien du tout, depuis que saint Patrick les a pris en main. Ici, il fut interrompu par un vieil homme dans le coin de la cheminée : – Tu as raison, acushla1, le petit bout de lac est toujours là, sauf que probable qu’il est à sec à présent, à sec, et tous les arbres ont disparu. – Bon, poursuivit Jerry, pas mécontent qu’on corrobore son histoire, le Roi des Serpents était formidablement important, vraiment. Plus de dix fois plus gros que n’importe quel serpent que n’importe qui ait jamais d’ses yeux vu, et il avait sur le dessus de sa tête une couronne d’or avec dedans une grosse pierre précieuse qui prenait la couleur de la lumière, qu’elle vienne du soleil ou de la lune, et tous les serpents, chacun son tour, devait apporter de la nourriture et la laisser pour lui le soir à la fraîche, alors il sortait la manger et il retournait chez lui. Et on dit que chaque fois qu’deux serpents s’disputaient, ils devaient venir vers le Roi qui tranchait entre eux, et il disait à chacun où il devait vivre et ce qu’il devait faire. Et, une fois par an, on devait lui apporter un bébé vivant, et on dit qu’il attendait jusqu’à la pleine lune, et alors on entendait une plainte déchirante qui faisait frémir tout le monde à des milles à la ronde, et puis il y avait un mauvais silence, et les nuages venaient cacher la lune, et pendant trois jours on ne la revoyait plus. – Oh, grand Dieu ! murmura une des femmes, mais c’était épouvantable, et elle se balança d’avant en arrière, tout son instinct maternel en éveil. – Mais, il n’y avait pas un homme pour faire quelque chose ? dit un jeune garçon solidement bâti, portant le maillot orange et vert du Gaelic Athletic Club, les yeux étincelants et les dents serrées. – Musha ! Comment il aurait fait ? Certain qu’aucun homme n’a jamais vu le Roi des Serpents ! – Alors, comment savait-on quelque chose sur lui ? demanda-t-il d’un air de doute. – Voyons, un d’leurs enfants n’était-il pas enlevé chaque année ? Mais, de toute façon, maintenant, c’est fini tout ça ! Et c’est un fait qu’un homme n’y est jamais allé. Et on dit qu’une femme qu’avait perdu son enfant, elle a monté sur la colline en courant ; mais c’qu’elle a vu, personne n’a pu le dire, car quand on l’a retrouvée elle était folle à lier, les cheveux blancs et des yeux de cadavre, et le matin d’après on l’a trouvée morte dans son lit, une marque autour du cou comme si elle avait été étranglée, et la marque avait la forme d’un serpent. Alors, il y a eu bien des peines et bien des peurs, et quand saint Patrick s’en prit aux serpents, on alluma des feux de joie partout dans le pays. Jamais on n’avait vu un déménagement comme quand les serpents s’en sont venus de partout, en frétillant, en rampant et en s’tortillant. Ici le narrateur prit une pose théâtrale et, avec l’habileté d’un véritable improvisateur, par ses attitudes et ses gestes, avec les bras et les jambes, mima dans le détail les évolutions des serpents. – Ils sont tous partis vers l’ouest, en semblant se diriger vers cette montagne qu’est ici. Du nord et du sud et de l’est ils sont arrivés par millions et par milliers et par centaines, car quant saint Patrick leur a donné l’ordre de sortir, il leur a juste dit de s’en aller, mais il n’a pas nommé l’endroit, et il était là-haut, sur le sommet du Mont Brandon2, avec ses habits religieux, la crosse à la main, et les serpents qui se déplaçaient au-dessous de lui et qui partaient tous vers le nord, et il s’dit : « Il faut que je m’occupe de ça. » « Et il est descendu de dessus la montagne pour suivre les serpents, et il les a vus partir vers la colline après celle qu’on appelle Knockcalltecrore. Et à c’moment, ils étaient tous venus de toute l’Irlande, et ils étaient tous autour de la montagne, sauf du côté de la mer, tous la tête pointée vers le haut de la colline et la queue en direction du Saint, si bien qu’ils ne le voyaient pas, et ils ont émis un grand sifflement, et puis un autre, et un autre, comme un, deux, trois ! Et, au troisième sifflement, le Roi des Serpents s’est dressé hors du p’tiot marécage au sommet de la colline et sa couronne d’or étincelait ; et, sûr que c’était le temps des moissons, et la lune était levée, et le soleil se couchait, si bien que la grosse pierre de la couronne avait la lumière du soleil et de la lune à la fois, et elle brillait si fort que jusque dans le Lenster les gens croyaient que tout le pays était en feu. Mais quand le Saint l’a vu, toute sa personne a paru s’enfler et devenir de plus en plus grosse, et il a levé sa crosse, et il a montré l’ouest et il a dit, d’une voix comme une tempête : « Tous à la mer, vous les serpents ! Tout de suite ! À la mer ! » « Et à l’instant, d’un seul mouvement et avec un sifflement tel que l’air a paru s’remplir de cascades, tous les serpents qu’étaient autour de la colline sont partis vers la mer en se tortillant comme s’ils avaient le feu à la queue. Il y en avait tant qu’ils remplissaient la mer jusqu’à plus loin que Cusheen Island, et ceux qu’étaient derrière ont dû glisser sur leur corps. Et la mer s’est remplie jusqu’à ce qu’elle envoie une vague haute comme une montagne rouler à travers l’Atlantique et finir par toucher le rivage de l’Amérique, sauf que, plus que probable, c’n’était pas l’Amérique alors, parce qu’on ne l’a découverte que bien après. Et il y avait tant de serpents qu’on dit pour de bon que tout le sable blanc emporté sur la côte depuis les Blasket jusqu’à Achill Head est fait avec leurs os. Ici Andy l’interrompit : – Mais, Jerry, tu ne nous a pas dit si le Roi des Serpents était parti lui aussi. – Musha ! mais c’est qu’t’es bien pressé ! Comment est-ce que je peux vous raconter toute la légende d’un seul coup ; et, en plus quand j’ai la bouche si sèche que je peux à peine parler… et qu’j’ai bu tout mon punch… Il retourna son verre sur la table d’un air de résignation comique. Mrs Kelligan saisit l’allusion et lui remplit son verre tandis qu’il continuait : – Bon ! Quand les serpents se sont mis aux bains de mer en oubliant de revenir pour se sécher, leur vieux Roi s’est enfoncé d’nouveau dans le lac, et saint Patrick roule les yeux et se dit : « – Musha ! Est-ce que je rêve, ou bien quoi ? Ou c’est qu’il se moque de moi ? Il a l’intention de me défier ? » « Et voyant qu’on ne lui prêtait aucune attention, il lève sa crosse et crie : « – Hello ! Toi ! Viens ici. Je veux te voir ! » En parlant, Jerry se livra à toute une pantomime appropriée, illustrant par chacun de ses gestes les paroles du Saint et du Serpent. « Alors le Roi des Serpents sort la tête du lac et dit : « – Qui m’appelle ? « – C’est moi, dit saint Patrick, et il était si déboussolé que le Serpent prétende rester après qu’on lui ait dit de s’en aller que, pendant un moment ça ne lui a pas même semblé bizarre qu’il puisse parler. « – Alors qu’est-ce que tu veux de moi ? dit le Serpent. « – Je veux savoir pourquoi tu n’as pas quitté le sol irlandais avec tous les autres serpents, dit le Saint. « – Tu as dit aux serpents de s’en aller, dit le Roi, et je suis leur Roi, voilà ce que je suis ; et tes paroles ne s’appliquaient pas à moi. Et là-dessus, comme un éclair, il replonge dans le lac. « – Ça alors ! » Saint Patrick a été si déconcerté d’cette impudence qu’il lui a fallu réfléchir un instant avant de crier de nouveau : « – Hé ! toi, écoute ! « – Qu’est-ce que tu veux encore ? dit le Roi des Serpents, en r’sortant la tête. « – Je veux savoir pourquoi tu n’as pas obéi à mes ordres, dit le Saint. Et le Roi l’a regardé en riant, et il avait l’air terriblement mauvais, je peux vous le dire, car à c’moment le soleil était couché et la lune était levée, et la pierre de sa couronne jetait une lumière pâle et froide à vous faire frissonner que d’la voir. « Et, dit-il, aussi lentement et sèchement qu’un procureur (sauf votre respect) quand il a une mauvaise affaire. « – Je n’ai pas obéi, dit-il, parce que j’dénie cette juridiction. « – Que veux-tu dire ? a demandé saint Patrick. « – Parce que, qu’il dit, c’est ma propriété, qu’il dit, par droit de prescription, qu’il dit, j’suis tout l’gouvern’ment ici, et j’ai lancé un exeat m’donnant l’ordre à moi-même de n’pas partir sans ma permission à moi, et il se renfile dans la mare. « – Ça alors ! Le Saint commençait à être fichtrement en colère, et il lève sa crosse et il le rappelle : « – Hé ! viens ici, toi ! Et le Serpent fait surface. « – « Alors ! le Saint, que veux-tu à présent ? Est-ce que je n’vais pas être débarrassé de toi pour de bon ? « – Tu pars ou tu ne pars pas ? dit le Saint. « – Je suis Roi ici, et je ne pars pas. « – Alors, dit le Saint, je te dépose ! « – Tu ne peux pas, dit le Serpent, tant que j’ai la couronne. « – Alors, je te la prendrai, dit saint Patrick. « – Attrape-moi d’abord ! » dit le Serpent. Et là-dessus, il replonge sous l’eau, et voilà qu’elle commence à faire des bulles et à bouillonner. Vraiment, le bon Saint était abasourdi, car sous ses yeux l’eau commençait à disparaître du p’tit lac, et le sol de la colline commençait à être secoué comme si le gros Serpent allait et venait à toute allure au plus profond de la terre sous la colline. « Alors le Saint, debout au bord du lac vide, leva sa crosse et ordonna au Serpent d’apparaître. Et en baissant les yeux, voyez donc ! il y avait le Roi des Serpents enroulé au fond du lac, et pourtant comment il était venu là, le Saint n’en avait pas la moindre idée, car il n’était pas là quand il avait commencé à l’appeler. Puis le Serpent leva la tête et, voilà qu’il ne portait pas de couronne ! « – Où est ta couronne ? dit le Saint. « – Cachée », dit le Serpent avec un regard mauvais. « – Où est-elle cachée ? « – Elle est cachée dans la montagne ! Enterrée là où ni toi ni tes semblables n’pourront y toucher d’ici mille ans, et il eut encore le même regard mauvais. « – Dis-moi où on peut la trouver ? dit le Saint d’un ton sévère. « Alors, avec le même regard mauvais et un sourire encore plus méchant qu’avant, le Serpent dit : « – As-tu vu l’eau qu’était dans le lac ? « – Bien sûr, dit saint Patrick. « – Alors, quand tu trouveras cette eau, tu pourras aussi trouver ma couronne ornée de joyaux. Et avant que le Saint puisse dire un mot, il continua : « Et jusqu’à c’que tu trouves ma couronne, je continuerai d’être roi ici, même si tu me bannis. Et peut-être que j’reviendrai sous une forme que tu ne soupçonnes pas, car je dois veiller sur ma couronne. Et maintenant je m’en vais, d’mon plein gré. » Et sans un mot de plus, bon ou mauvais, il s’en est allé tout droit s’glisser dans la mer, coupant dans le rocher une brèche qu’on appelle Shleenanaher (et c’est de l’irlandais pour le Défilé du Serpent) jusqu’à aujourd’hui. « Et maintenant, Monsieur, si Mrs Kelligan n’a pas avalé tout le tonneau, j’aimerais bien une goutte de punch, parce que d’parler ça déssèche, et il enfouit la tête dans le bol fumant que l’hôtesse avait déjà préparé. La compagnie se mit alors à discuter de la légende. Une des femmes dit : – Je m’demande quelle forme il a pris quand il est r’venu ! Jerry répondit : – Sûr qu’on dit que la tourbière mouvante, c’est la forme qu’il a prise. La montagne et le lac sur le dessus étaient jadis le coin le plus fertile de toute la région ; mais depuis que la tourbière a commencé à bouger, ça n’a jamais été pareil. Ici, un homme au visage sévère du nom de McGlown, silencieux jusque-là, l’interrompit d’une question : – Mais qui sait quand la tourbière a commencé à bouger ? – Musha ! Désolé, mais moi j’le sais ; c’est quand l’vieux serpent a chassé l’eau du lac dans la colline ! Il y avait une étincelle dans les yeux du conteur qui vous faisait douter du crédit qu’il accordait à son histoire. – Eh bien, en ce qui me concerne, dit McGlown, j’crois pas un seul mot de ça. – Et pourquoi pas ? dit une des femmes. Est-ce que, jusqu’à c’jour, on n’appelle pas la montagne « Knockcalltecrore », ou « La Colline de la Couronne d’Or Perdue » ? Un autre dit : – Musha ! Comment M’sieu McGlown pourrait croire quelque chose, lui qu’est protestant ! – Moi, j’vous dis que j’préfère les faits, dit McGlown. Tant qu’à croire une histoire, j’préfère plus l’histoire qui m’est r’venue d’un vieux. Que l’diable m’emporte ! J’crois qu’il est assez vieux pour s’rappeler la chose elle-même. En parlant, il montrait de la main Mr Moynahan, un petit vieux ratatiné aux cheveux blancs qui, blotti dans un coin de la cheminée, tenait tout près du feu ses mains ridées et tremblantes. – Quelle est l’histoire que connaît Mr Moynahan, puis-je le demander ? S’il vous plaît, ne voulez-vous pas m’être agréable ? Je suis très désireux d’apprendre tout ce que je peux sur cette montagne, car elle m’a singulièrement captivé. Le vieil homme prit le verre de punch que Mrs Kelligan lui tendait comme condition nécessaire à tout récit, et il commença : – Désolé que j’sais rien d’autre que c’que j’tiens de mon père. Mais j’l’ai souvent entendu dire qu’on lui avait dit qu’on disait que pendant l’invasion française qu’a mal tourné sous l’général Humbert, quand la tentative a échoué et que tout espoir a été perdu, les soldats anglais étaient sûrs d’avoir une grosse part de prise quand ils mettraient la main sur le coffre au trésor. Car on savait qu’il y avait beaucoup d’argent en circulation et qu’ils en avaient apporté bien plus qu’ils en auraient jamais b’soin pour la solde et les dépenses, afin d’aider à soudoyer certains qui s’étaient tenus à distance d’un côté ou de l’autre… s’ils ne pouvaient pas s’arranger pour être achetés par les deux. Mais, sûr et certain, ils étaient tous vendus, que l’diable les emporte ! et ils n’ont pas pu mettre la main sur le moindre sou. Là, le vieil homme prit une lampée de punch, et son désir qu’on continue à l’interroger était si transparent qu’un sourire fit le tour de la compagnie. Distinctement, l’une des petites vieilles dit sotto voce : – Musha ! Bat, certain, c’est le plus malin des conteurs ! Il faut tout lui arracher ! Continue, Bat, continue ! Dis-nous ce qu’est d’venu l’argent. – Oh, ce qu’est d’venu l’argent ? Ainsi, vous aimeriez l’apprendre ? Bon, je vais vous l’dire, remplissez mon verre encore un coup, Mrs Kelligan, puisque le monsieur désire tout savoir là-dessus, bon ce qu’on dit c’est que l’officier qui avait la charge de l’argent l’emmena bien loin avec cinq ou six autres hommes. L’coffre était très p’sant, un coffre en fer plein d’or à ras bord ! Rien que ça ! C’que c’était beau ! Un gros coffre, haut comme ça et aussi long que la table, et empli jusqu’au couvercle de monnaie d’or et de papier monnaie, et là d’dans, pas la moindre pièce de monnaie blanche ! Que de l’or, chaque billet d’une livre ! Il s’interrompit pour jeter un regard anxieux à Mrs Kelligan, qui préparait un nouveau broc de punch. – Pas trop d’eau, pour l’amour de moi, Katty ; tu connais mon point faible ! Bon, on dit qu’ça a été dur de hisser le coffre dans la barque ; ensuite ils ont mis un affût de canon pour le transporter, et ils ont pris deux chevaux, et quand la fumée était partout et qu’était arrivée l’obscurité de la nuit, ils ont gagné le rivage et s’en sont allés plein sud de l’endroit où ils avaient touché terre à Killala. Mais, de toute façon, on dit qu’on n’a jamais plus entendu parler d’aucun d’eux. On suit leur trace à travers Ardnaree et le Lough Conn, à travers le lac de Castlebar et le Lough Carra, et à travers le Lough Mask et le Lough Corrib. Mais ils n’ont pas paru à Galway car les soldats les guettaient sur le fleuve nuit et jour ; et comment ils s’en sont tirés, Dieu seul le sait, car on dit qu’ils en ont vu de drôles. Ils ont emmené le coffre, l’affût de canon et les chevaux dans la barque, et, quand ils n’ont pas pu aller plus loin, ils ont tiré la barque sur la terre ferme jusqu’au prochain lac, et ainsi de suite. Ce qui est sûr c’est que pendant une saison sèche, quand les eaux du Corrib étaient descendues de plusieurs pieds en dessous de tout c’qu’on avait connu auparavant, on a trouvé au bout du lac, du côté de Bealanabrack, une barque qui était là depuis des années ; mais on n’a jamais eu de nouvelles, depuis ce jour jusqu’à aujourd’hui, ni des hommes, ni des chevaux ni du trésor et on dit… ajouta-t-il, d’un air mystérieux en redoublant d’attention pour le punch, comme si le récit était fini. – Mais c’est pas possible ! dit McGlown, c’n’est qu’une partie de l’histoire. Continue, grand Dieu ! et finis le punch après. – Oh, oh ! oui, bien sûr, vous voulez savoir la fin. Eh bien, personne ne connaît la fin, Mais on disait dans le temps que quand les hommes ont hissé la barque, ils sont partis plein ouest jusqu’à ce qu’un soir ils atteignent la montagne là-bas, et alors ils ont enterré le coffre et tué les chevaux, ou bien ils ont sauté en selle pour s’en aller. Mais, de toute façon, on ne les a jamais revus, et aussi vrai que vous êtes en vie, l’argent est là dans la colline ! Car regardez son nom ! Pourquoi tout le monde l’a toujours appelé « Knockcalltecrore », et c’est de l’irlandais pour « La Colline de l’Or Perdu », si l’argent n’est pas là ? – C’est bien vrai ! dit une vieille femme avec un brûle-gueule. Pourquoi, en effet ? Y a des gens qui veulent rien croire même si c’est sous leur yeux, et elle tira sur sa pipe dans un silence réprobateur à l’adresse de l’esprit de scepticisme qui, soit dit en passant, n’avait été manifesté par aucune des personnes présentes. S’ensuivit un long silence, brisé seulement par une des vieilles femmes qui occasionnellement poussait un demi-grognement ou un demi-soupir comme pour combler inconsciemment le hiatus dans la conversation. Elle était keener3 de profession et, à l’évidence, avait pour sa fonction toutes les aptitudes et l’expérience nécessaires. Bientôt, le vieux Moynahan rompit le silence : – Bon, c’est d’toute façon une chose rudement bizarre d’avoir choisi la colline là-bas pour des légendes, des histoires et des commérages de toutes sortes concernant serpents et compagnie. Et j’suis pas très sûr non plus qu’un d’eux n’y soit pas encore, car, attention ! c’t’une chose rudement curieuse que la tourbière là-bas continue à bouger jusqu’à c’jour. Et je ne suis pas sûr non plus qu’à présent les serpents ont tous quitté la colline ! Il y eut un concert de « Bien dit, ça ! » – Oui, et en plus c’est un serpent noir ! dit quelqu’un. – Et avec des favoris ! dit quelqu’un d’autre. – Parbleu ! on a de nouveau besoin de saint Patrick pour regarder à ça ! dit un troisième.
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