LETTRE II Réponse de Delphine à mademoiselle d’AlbémarBellerive, ce 26 juillet 1790. Oui, j’irai vous rejoindre, et pour toujours ; cependant pourquoi dites-vous qu’il ne m’a jamais aimée ? Je sais bien que je n’ai plus d’avenir, mais il ne faut pas m’ôter le passé. Au concert, au bal, la dernière fois que je l’ai vu, j’en suis sûre, il m’aimait ! Il y a maintenant douze jours que je ne fais plus que repasser les mêmes souvenirs ; je me suis rappelé des mots, des regards, des accents dont je n’avais pas assez joui, mais qui doivent me convaincre de son affection. Il m’aimait, j’étais libre, et il est l’époux d’une autre ; ne croyez pas que jamais ma pensée puisse sortir de ce cercle cruel que les regrets tracent autour de moi. Depuis le jour où j’aurais dû mourir, j’ai vécu seule, je n’