LETTRE I Mademoiselle d’Albémar à DelphinMontpellier, 20 juillet 1790. Après voir reçu votre lettre, j’ai passé le jour entier dans les larmes, et je peux à peine voir assez pour vous écrire, tant mes yeux sont fatigués de pleurer. Ma chère enfant, à quelles douleurs vous avez été livrée ! Ah ! que n’étais-je là pour exprimer ma haine contre les méchants, et pour consoler la bonté malheureuse ! Je m’étais attachée à Léonce, je le regardais déjà comme un époux, comme un ami digne de vous ; il a été capable d’une telle cruauté ; il a volontairement renoncé à la plus aimable femme du monde, parce qu’il avait à lui reprocher une faute dont toutes les vertus généreuses étaient la cause, une faute comme les anges en commettraient s’ils étaient témoins des faiblesses et des souffrances des homm