I

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I Ô Printemps d’antan ! m’écriai-je. Printemps aux tièdes haleines emportant, par les nues, l’âme parfumée des lilas ! Printemps aux cieux déchirés par les flèches révoltées du soleil longtemps captif des ombres ! Réveil de toutes choses sous la caresse dorée de la lumière ! Frémissement des feuillages sous le pied rose des amours ! Regards étonnés des sources sous leurs longs cils de roseaux verdoyants ! O Primavera, giuventu del anno !… – As-tu fini ? me dit Jacques. – Eh quoi ! g*****e mal promu à la dignité humaine, tu ne regrettes pas ces avrils d’autrefois et ces mais abolis, en tout conformes au programme divin des poètes ! Tu leur préfères peut-être les capricieuses humeurs d’une planète refroidie et les humides bourrades d’un ciel ignorant du calendrier ! Elles sont pour te plaire ces pluies froides qui semblent un reliquat de décembre, et tu te délectes aux gelées tardives qui figent la sève au cœur des bourgeons ! C’est peut-être à tes prières, animal, que nous devons ce renversement des principes et ces anormales calamités ! ouf ! Jacques était visiblement accablé par mon éloquence. – N’étaient-elles pas douces, continuai-je sur un ton moins accablant – car je suis généreux, en somme, et ne frappe jamais un ennemi à terre parce que j’ai horreur de me baisser – ces journées de renouveau tout imprégnées de paresse et d’odeurs énervantes, baignées de langueurs et de vagues désirs ? As-tu donc oublié leur longueur délicieuse entre les crépuscules lointains d’une aube et d’un couchant tous deux argentés et qu’on pouvait prendre l’un pour l’autre, tous deux frissonnants et enveloppés de brumes légères, tous deux étonnés, celle-ci de venir si tôt et celui-là de s’en aller si tard ? Les belles journées que c’était vraiment et que la vie en est tristement découronnée ! – Si l’une d’elles t’avait coûté aussi cher qu’à moi, répondit enfin Jacques, tu en parlerais d’une moins dithyrambique façon. – Veux-tu me conter ça décemment ? Car tu le sais, je n’aime pas les graveleux récits. – Je ferai de mon mieux. Tu m’arrêteras si ta pudeur s’offense. – Tu peux y compter ! Il me semble la sentir déjà qui s’effarouche. Ah ! qu’un homme est malheureux de ne se complaire qu’aux honnêtes histoires ! Va, mon garçon !
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