35Les premiers jours, Raquel alla dans le boliche. Ensuite, elle n’eut plus d’argent. — Donnez-moi un travail ! Je peux faire la vaisselle, cuisiner, passer le balai… — Moi je donne de la nourriture, pas du boulot ! avait répondu la patronne grassouillette. Et ne remets plus les pieds ici, si tu n’as pas d’argent à dépenser. Après deux jours de jeûne et de vagabondage pendant lesquels elle avait cherché en vain un emploi quelconque, Raquel avait faim. Une faim atroce qui lui rappelait sa vie au shtetl, lors des hivers de famine. Mais à l’époque, elle avait son père. Cette fois, elle errait seule dans un monde inconnu et hostile. Autour d’elle la vie bouillonnait. Il y avait comme une trépidation dans l’air. Noël approchait. Et comme c’était l’été, les vitrines des magasins étaient déco