Passion dans l'Ombre

Épisode 13

Elle avait vécu l’un des moments les plus effroyables et les plus incroyables de sa vie durant cette mémorable soirée, et bien que ce soit de sa faute d’être restée là à attendre et écouter les plaintes de son ancien amant, elle n’était pas prête à entendre ce que cette personne avait à lui dire, elle ne le supporterait pas, qu’elle que soit sa teneur, bien ou mal, aussi dit-elle les seuls mots qui serait capable de l’arrêter dans son élan. Elle était injuste, effroyablement injuste et mauvaise, mais elle ne pouvait arrêter ses mots, elle ne pouvait s’arrêter. Elle lui en voulut de tout. De l'ignorer aussi odieusement, de ne pas lui parler, de ne plus lui accorder la moindre sorte d'importance. Je le déteste, s’écria-t-elle en elle. Aussi voulut-elle le blesser.

— Tu n’es rien d’autre qu’un assassin.

Son expression après qu’elle lui eut dit cela, et après que le choc fut passé lui fut intolérable. Plus intolérable encore que la violence dont elle fut le témoin direct quelques instants plutôt, encore plus que la mise à morts de ces maudits bandits. Elle avait raison, elle était aussi mauvaise qu’eux, sinon plus.

Elle n’attendit pas qu’il lui réponde si jamais il en avait eu l’intention. Elle tourna les talons et partit, suivi par son fiancé qui lui aussi fut terrassé par ce qu’elle venait de dire à son ancien amant.

— Crystal. appela Nathan, mais cette dernière ne fit que secouer la tête.

— Je t’en prie, pas maintenant. Je t’en prie.

***

Cette nuit, quand enfin, ils arrivèrent à leur appartement comme s'ils l’avaient quitté il y a de cela un siècle, pour la première fois, le couple demeura dans le silence, Crystal ne souhaitant nullement parler, mais seulement prendre une douche, aller au lit et dormir, et Nathan, simplement effrayé de briser le silence que sa fiancée lui imposait. Elle refusa de prendre une douche avec lui. Elle y resta longtemps, d’abord avec sa robe, puis sans, comme pour se laver de toute souillure, puis elle se sécha les cheveux, et se mit enfin au lit. Quand Nathan la rejoignit, elle n’était pas encore endormie, et ne fit rien pour s’endormir.

Elle restait allongée là, sur le côté, les yeux grands ouverts. Nathan fit de même. La jeune femme dut quand même trouver le sommeil à un moment, car elle fut bientôt plongé dans un rêve, un rêve auquel elle s’y attendait et qui fut cauchemardesque, du moins du point de vue du rêveur. Elle se retrouvait prisonnière d’une b***e de malfaiteurs qui désirait son corps et son argent. Elle se débattait pour s’échapper, criant et pleurant pour pouvoir fuir. Elle était en mauvaise posture. Mais à aucun moment, elle ne ressentit de la peur, malgré la gravité du danger dans lequel elle se trouvait, elle savait qu’il viendrait. Il viendrait pour la sauver. Peut-être le fera-t-il en tuant tous ces hommes et en laissant leurs cadavres pourrir au grand air, mais il le fera. Et il le fera en arborant sur son visage magnifique cette expression de froideur effroyable, ne trahissant nul doute ou hésitation pour exécuter un être vivant comme lui et mettant ainsi fin à sa vie de manière définitive.

Crystal n’en serait jamais capable, ni Léonie, Ni Ronnie, ni Nathan, son merveilleux tant aimé Nathan, mais Nicky lui le fit sans faillir, sans reculer et sans éprouver la moindre compassion.

Il leur ont tous sauvé la vie certes, et à elle plus qu’à tous les autres puisque l’un de ces criminels comptait clairement la v****r avant de la tuer, mais la manière dont il le fit était malgré tout discutable, voire condamnable. La question était, Crystal le condamnait-il ?

Nathan lui poserait surement cette question. C’était inévitable. Car qu’il le fasse lui était sans grand intérêt, mais elle, Crystal, qui fut une fois sa fiancée, et qui avait tant signifié pour lui, sa réponse à elle importait primordialement.

Alors qu’elle dérivait encore, inlassablement dans les méandres de son rêve, se laissant sauver par lui, elle le savait qu’elle serait, elle se rendit compte qu’il ne lui avait jamais révélé avoir eu un frère, et encore un jumeau. Elle avait bien sûr quelques fois essayé de connaitre sa famille, mais il ne lui révéla jamais rien, presque rien. Elle ignorait si ses parents étaient encore vivants, si en plus de Ronald, il avait encore des frères et sœurs, s’il avait toujours su se battre ou si c’était seulement récent, s’il avait déjà tué quelqu’un au temps où ils étaient encore ensemble. Tant de questions et aucune réponse.

Le lendemain, le couple prit le petit déjeuner à dix heures du matin, café, jus de fruits frais, scone et confiture avec de l’omelette. Ils étaient attablés dans la cuisine comme à leur habitude, mais avec une atmosphère tout à différent. Le silence était présent, oppressant, tangible, insupportable. Ce fut évidemment Nathan qui finit par le briser. Il n’en pouvait plus. Reposant sa tasse avec force sur la table en bois blanc, il se récria.

— D’accord ! J’en ai assez !

Crystal sursauta et releva vivement la tête pour le regarder. Le jeune homme arborait une expression de colère mais aussi un air décidé. Il continua donc,

— Je sais que ce que nous avions vécu hier était extraordinaire pour ne pas dire terrible, et sans doute indélébile, mais je refuse d’en être à ce point affecté. Et toi aussi, tu ne devrais pas te laisser l’être ainsi.

Cette fois, Crystal émit un rire amèrement narquois.

— Tu plaisantes, j'espère ! Ne pas en être affecté. Ne pas se laisser affecter. Mais c’est tout bonnement impossible. Nous sommes humains, je te signale. On a failli mourir, hier soir ! On a été pris en otage, moi j’ai failli être violée et tuée, et toi seulement tué. Mais au final, le résultat est le même. Alors s’empêcher d’être affecté par cela, ce n’est tout simplement pas une option !

Nathan l’écouta avec une patience exemplaire compte tenu du bouillonnement d’émotion dont il semblait être la proie.

— Je le concède, nous avions vécu tout cela hier soir !