AVANT-PROPOS
Cette histoire extraordinaire, moitié bretonne, moitié parisienne, me fut racontée par un Anglais, à Londres, en 1842. Mr J. N. W…y, alors protestant, a eu le bonheur de finir dans la communion catholique, à Paris, vers le commencement du second Empire. Il ne croyait pas beaucoup aux revenants, mais sa conviction était que, au début de l'institution surtout, les assurances sur la vie, qui ont leur excellent côté, furent l'origine d'un assez grand nombre de crimes.
Mr W…y avait occupé un emploi important dans les bureaux de la première en date parmi les compagnies sur la vie ; il y était chef du contentieux et avait puisé une partie des détails, qu'on va lire dans les pièces d'une enquête, poursuivie à Londres et à Paris en 1820 pour soustraire sa Société, le Campbell-Life, à l'obligation de solder le dividende énorme dont il va être question dans notre drame.
Au fond de ce récit, Mr W…y, qui avait le coup d'œil anglais, voyait surtout la menace sociale contenue dans la situation d'un homme « sans préjugés » pour qui telle somme, possible à conquérir par un méfait, dix, vingt et même cent mille francs, par exemple, devient d'une part, une fois chaque année, à jour fixe, le STRICT nécessaire indépendamment des besoins de sa vie, puisqu'elle représente pour lui sa prime à payer, — et pour qui, d'autre part, cette même somme ou prime, régulièrement payée aux échéances, représente un grand nombre de millions dans un avenir prochain.
C’est là un cas de tentation, de tentation exorbitante qui doit être rare ; mais Mr J. N. W…y (il s'y connaissait) ne regardait point comme unique le curieux exemple qu'il en citait et qui fait le sujet de la présente histoire.