III

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III Cette tant précieuse lumière d’en haut que je souhaite à tous mes contemporains, soleil de mansuétude, arc-en-ciel de sagesse et de miséricorde, avait visité madame Bonnefoi sous les espèces d’un beau gars de vingt ans, clerc de notaire de son état, poète aux heures perdues pour son étude, ayant nom Michel et qui, un jour, à brûle-pourpoint, lui avait adressé une déclaration rimée, comme le Fortunio du Chandelier, mais d’un caractère beaucoup moins mélancolique. Ces choses se passèrent sur un nouveau chemin de Damas. – Tiens ! s’écria en dedans madame Bonnefoi, – car, pour être muettes, les conversations que nous tenons avec nous-mêmes n’en sont pas moins susceptibles de toutes les nuances – pourquoi ferais-je à mon mari des querelles qui m’égosillent personnellement ? Il n’a pas le monopole de ce qui me manque. Ou je me trompe fort, ou ce robuste drôle me payera grassement l’arriéré conjugal. Le déficit est considérable, mais avec du courage et de la bonne volonté, quelques virements et de nouveaux impôts, les gouvernements ont soldé en recettes de plus difficiles budgets ! Vite à l’apurement de nos comptes ! – Ainsi parla la sage madame Bonnefoi et ce fut pour Michel une réelle bonne fortune d’être tombé, pour ses débuts, sur une personne aussi parfaitement sensée. Il montra beaucoup de zèle dans ses fonctions de comptable intérimaire, et la vie devint charmante pour ces trois gens de bien. Bonnefoi rentrait aussi tard qu’il voulait, couvert des bénédictions de Lemiteux, de Poussemol et de Cascaret. Son épouse, dont son absence n’avait pas laissé la couche solitaire, ne lui témoignait ni impatience ni mauvaise humeur. Quant au vertueux Michel, il possédait une très enviable maîtresse qu’il ne quittait que fort avant dans la soirée, pouvant compter absolument sur la régularité des retours du mari. Jamais cocuage se présenta-t-il sous de meilleurs auspices ? – Mais mon cher, me dites-vous, quel alea dans ce bonheur fragile ! Qu’un jour, ou mieux une nuit, votre vertueux Michel s’attarde, par une raison ou par une autre, jusqu’à la rentrée du mari ! Quel pétard ! – Moins formidable que le vôtre, idole de mon cœur ! Je veux dire moins charmant et moins délectable ! Détournez de moi votre face, si vous le voulez bien ; quand on me fait de l’œil de cette façon-là, je m’embarbouille dans tout ce que je dis. Je vous assure que leur félicité était à l’abri de tout péril, et je vais vous le prouver.
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