Edward et Catherine :
Le matin se leva sur la demeure des Vanier, mais il n’apporta avec lui aucun soulagement. Les lourds rideaux de velours laissaient à peine filtrer la lumière du jour, comme pour refléter l’atmosphère oppressante qui régnait dans la maison. Catherine et Edward s’étaient assis dans le salon, les yeux cernés, le visage marqué par une nuit sans sommeil. La nuit précédente, les cris et les pleurs de Peter, enfermés dans sa chambre, résonnaient encore dans leur esprit.
Catherine brisa le silence en premier. « Edward, nous avons été trop loin. » Sa voix tremblait encore des émotions de la veille. « Nous avons toujours voulu ce qu’il y avait de mieux pour lui, mais… » Elle baissa la tête, les larmes menaçant de couler à nouveau. « Je n’ai jamais vu Peter dans un tel état. Qu’est-ce que nous lui avons fait ? »
Edward, les traits tirés, regarda sa femme avec une tristesse qu’il avait rarement montrée. « Tu as raison. Nous avons été durs. Trop durs. Nous avons pensé que ce projet était la meilleure chose pour lui, mais nous n’avons jamais pris en compte ce qu’il voulait vraiment. » Il soupira profondément, se frottant le visage de ses mains tremblantes. « Nous pensions que nous savions ce qui était bon pour lui, mais… nous avons oublié qu’il avait ses propres rêves, ses propres désirs. »
Ils restèrent silencieux un moment, chacun perdu dans ses pensées, revoyant les éclats de colère de la veille. Edward reprit, plus déterminé. « Ce projet à Lyon est important, mais il ne l’est pas plus que notre fils. S’il veut terminer ses études, alors nous devons le laisser faire. Ce n’est que trois ans. L’entreprise peut attendre. »
Catherine hocha la tête, son regard se durcissant. « Oui. Et pour cette Clara… » Elle marqua une pause, réfléchissant à ses mots. « Nous ne l’aimons pas, mais nous ne pouvons pas forcer Peter à se séparer d’elle. S’il veut la fréquenter, qu’il le fasse. Ce n’est qu’un passe-temps, une distraction. Il s’en lassera bien assez tôt. Kéllia sera toujours là, prête à prendre la place qui lui revient. »
Edward acquiesça, serrant la mâchoire. « Nous devons leur parler. Nous excuser. Montrer à Peter que nous sommes prêts à écouter ses désirs. Mais il doit aussi comprendre que le mariage avec Kéllia est une chose qui arrivera. Pas maintenant, mais il doit être conscient que c’est ce que nous attendons de lui à terme. »
Ils échangèrent un regard résolu, puis Edward se leva. « Allons le chercher. Il faut qu’il comprenne que nous sommes de son côté, même si nous ne voyons pas les choses de la même manière. »
Quelques minutes plus tard, Edward et Catherine se dirigèrent vers le bureau familial, un endroit où les discussions sérieuses avaient toujours eu lieu. Ils firent appeler Peter, le cœur lourd, mais déterminés à apaiser les tensions.
Peter :
Peter, qui n’avait pas trouvé le sommeil non plus, entra dans le bureau familial, le visage fermé, les épaules encore lourdes de la colère et de la tristesse de la veille. Il s’assit en face de ses parents, les regardant avec méfiance.
Edward prit la parole en premier, d’une voix plus douce qu’à l’habitude. « Peter, nous avons longuement réfléchi à ce qui s’est passé hier soir. Nous comprenons que nous avons été trop durs, que nous n’avons pas respecté tes choix et tes envies. » Il marqua une pause, cherchant ses mots. « Nous voulions que tu saches que nous avons décidé de te laisser poursuivre tes études. Si c’est ce que tu veux vraiment, alors tu peux rester ici et terminer ton diplôme. Le projet à Lyon peut attendre. »
Peter, surpris, les fixa sans comprendre. « Vous… vous êtes sérieux ? » Sa voix était empreinte de scepticisme, comme s’il n’osait pas croire ce qu’il entendait.
Catherine hocha la tête, son visage empreint d’une émotion sincère. « Oui, mon chéri. Nous avons compris que ce projet n’est pas aussi important que ton bien-être. Si tes études sont ce que tu veux vraiment, alors nous te soutiendrons. »
Peter se sentit submergé par un flot d’émotions contradictoires. Il avait rêvé d’entendre ces mots, mais il y avait une ombre dans leur voix, une condition implicite qui planait dans l’air.
« Mais, » continua Edward, brisant le fragile espoir qui commençait à naître en Peter, « il faut que tu saches que le contrat de mariage avec Kéllia tient toujours. Nous n’allons pas te forcer à te marier maintenant, mais cela se fera. Nous sommes convaincus que c’est ce qui est le mieux pour toi et pour la famille. »
Peter serra les poings, sentant la colère monter à nouveau. « Et Clara ? » demanda-t-il, sa voix pleine de défi. « Que comptez-vous faire à son sujet ? »
Catherine leva les mains dans un geste apaisant. « Clara… Clara n’est qu’un passe-temps, Peter. Nous le comprenons. Tu peux la fréquenter si cela te fait plaisir. Mais tu finiras par te lasser d’elle. Ce n’est pas une fille pour toi. Un jour, tu verras qu’elle n’a pas sa place dans ton avenir. »
Peter se leva brusquement, le cœur battant à tout rompre. « Vous vous trompez ! Clara est bien plus qu’un passe-temps pour moi. Elle est tout ce que j’ai jamais voulu. » Sa voix tremblait de rage et de désespoir. « Je ne vous laisserai pas décider de qui je dois aimer. »
Edward, qui avait gardé son calme jusque-là, se leva à son tour. « Calme-toi, Peter. Nous te laissons faire tes choix pour l’instant, mais il y a des responsabilités auxquelles tu ne pourras pas échapper. Nous espérons que tu comprendras cela avec le temps. »
Peter les regarda, incrédule. Il avait l’impression de se noyer dans un océan de contradictions. Ils lui laissaient la liberté de rester, mais l’enfermaient dans un avenir qu’il refusait. « Vous pensez vraiment que Clara n’est qu’un jeu pour moi ? »
Catherine fit un pas vers lui, mais il recula. « Peter, tu es jeune. Tu es amoureux, c’est normal. Mais avec le temps, tu comprendras que ce genre de relation est éphémère. »
Peter les fixa, dévasté. « Vous ne comprenez rien. » Il se détourna, se sentant piégé, étouffé. « Vous ne me connaissez même pas. »
Il quitta le bureau, le cœur brisé, laissant ses parents seuls, leur décision prise, mais leur fils encore plus éloigné qu’avant.
Edward et Catherine :
Ils restèrent là, silencieux, observant la porte par laquelle leur fils venait de sortir. Un poids pesait sur leurs cœurs. Avaient-ils fait le bon choix en le laissant poursuivre ses études ? En lui permettant de continuer à fréquenter cette Clara, espérant qu’il finisse par la laisser tomber de lui-même ?
Leur plan était-il vraiment sage, ou couraient-ils le risque de perdre leur fils pour de bon ? Une question, sombre et inquiétante, les hanta : Est-ce une erreur que nous faisons ? Clara n’est-elle vraiment qu’un passe-temps pour Peter, ou représente-t-elle bien plus que cela à ses yeux ?