Mardi 17 septembre (1)

1449 Words
7h, Hier soir, après m'être glissée sous la couette et enfoncée dans les gros oreillers, ce qui fut très agréable après une si longue journée, tout était calme et silencieux. Je repensais, malgré la colère que je ressentais à cause du fait qu'il m'ait littéralement volé mon premier b****r, au désespoir incompréhensible que j'avais lu dans les yeux de Tayron, et à la tendresse qu'il avait eue pour moi toute la soirée, en me demandant si ça ressemblait à ça quand on plaisait vraiment à quelqu'un, quand j'ai entendu un bruit de moteur. Par curiosité, je me suis levée pour aller regarder par la fenêtre. En y repensant, c'est idiot, j'aurais dû m'en douter. La place de parking 9B était occupée par une grosse berline noire reluisant sous la lumière des réverbères. D'ici, impossible de dire de quelle marque il s'agit. Soudain, j'ai eu la sensation d'avoir froid et j'ai entendu du bruit dans le couloir. Je me suis alors approchée de la porte. Il y a un œillet, mais je n'ai pas osé regarder dedans. À ce moment-là, je frissonnais et j'avais la sensation que quelqu'un était derrière ma porte. Je me suis appuyée contre, elle était froide et j'ai ressenti un v*****t coup de jus dans la main. - Aïe ! J'ai probablement crié un peu trop fort… Mais ça m'a fait super mal ! C'était dix fois pire que la fois où Rosélia et Ludovika m'ont fait faire la chaîne humaine pour tenir le fil électrique du champ des vaches du paysan qui habite proche de chez nous quand j'avais six ans ! Instinctivement, j'ai ouvert la porte, ce qui aurait pu être stupide s'il y avait eu un danger, mais là, rien, juste la porte d'en face qui se refermait doucement. Tayron, qui avait dû m'entendre, sortait de sa chambre. - Un problème ? Me demande-t-il d'un air inquiet. Je t'ai entendu crier… - Non, tout va bien, merci, répondis-je peu convaincante, puisque ma main était tout engourdie et me faisait mal. - Je me frottais la paume avec acharnement. - Tu t'es fait mal ? Insiste-t-il en s'approchant. - Pas exactement… Je me suis pris un coup de jus sur la porte. Je n'arrive même pas à comprendre comment c'est possible sur une porte en bois… - Donne-moi ta main. - Il me l'a prise sans attendre et de ses mains délicates, il l'a massée doucement. - Merci, ça va mieux, lui dis-je quand il a eu terminé. Je vais aller dormir maintenant, désolée de t'avoir dérangé. - Ne t'inquiète pas pour ça. J'allais rentrer, mais il m'a retenu par la main qu'il tenait toujours. - Kristen, s'il te plaît… J'ai tout de suite compris de quoi il voulait parler. J'ai poussé un soupir et l'ai invité à entrer. J'ai enfilé un gilet, parce que je n'étais toujours pas réchauffée, et je suis allée me percher sur mon bureau tandis qu'il était resté près de la porte. Et comme pour me donner du courage, j'ai pris mon pendentif, que j'ai serré très fort dans ma main. C'est un réflexe que je crois avoir toujours eu d'aussi loin que je me souvienne. Ça me fait du bien en général, et là, je me suis sentie réchauffée. - Très bien Tayron, puisque tu veux qu'on en parle, commence par me dire pourquoi tu m'as embrassé. Et ne me dis pas que c'était juste pour nous débarrasser de Blaise, parce qu'il y avait d'autres moyens. - C'est vrai, je savais que Blaise nous ficherait la paix après ça, mais je l'ai fait parce que tu me plais beaucoup… - Comment peux-tu dire ça ? Tu ne me connais même pas ! - Kristen, ce n'est pas dramatique, pourquoi réagis-tu si mal ! - Parce que je… Je… Je n'arrivais pas à m'exprimer, j'avais la gorge serrée, ma voix tremblait et je n'ai pas pu empêcher une larme de couler. Je me suis alors détournée pour éviter que Tayron le voit, mais c'était trop tard, il s'est rapproché. À quelques pas de moi, je lui ai fait un signe pour qu'il s'arrête. - Je n'ai jamais eu de petit ami et je n'avais pas imaginé que mon premier b****r serait un b****r volé. C'est tout, tu n'avais pas le droit, lâché-je un peu sèchement. Il m'a pris la main, l'a caressé tendrement avec son pouce. - Je te demande pardon, me souffle-t-il. Il se fait tard, tu devrais dormir, je passerai te voir demain si tu veux bien… - Bien sûr, bonne nuit. Après ça, je me suis endormie, complètement épuisée. Malgré tout, je me suis réveillée tôt ce matin, alors que j'ai toute une semaine pour découvrir l'université, trouver dans quels cours je veux m'inscrire et peut-être me trouver une activité extrascolaire… Mes sœurs ne viendront que vers neuf heures, alors ça me laisse le temps de me préparer et de descendre déjeuner. Je viens d'ouvrir la fenêtre, j'aime sentir l'air tiède et doux du matin sur ma peau. Les rayons du soleil emplissent ma chambre, c'est fabuleux. En regardant en bas, je constate que la berline noire n'est déjà plus là. 8h, Avant de m'habiller, je suis allée faire ma toilette, ça ne se bousculait pas dans la salle de bain, je n'ai croisé qu'Émilie Duncan, une étudiante en master 2 de psychologie enfantine. Elle loge dans la chambre 3B, (c'est à elle qu'appartient la Mustang rose) elle est très sympa, elle m'a souhaité la bienvenue et m'a invité à aller la voir en cas de besoin ou de conseils de filles, mais comme elle ne sera pas très disponible, je sais que je pourrai la voir le matin avant les cours entre 6 heures et 6 h 30, ou bien si on se donne rendez-vous pour déjeuner ensemble. Elle m'a donné son numéro de téléphone, puis nous avons parlé des étudiants de notre étage. - Je ne les connais pas très bien, me dit-elle. Je les vois peu, mais je sais que Nora de la chambre 5B et Travis de la chambre 2B, sont très sympas. Ils travaillent beaucoup aussi, parce qu'ils préparent un doctorat de sciences politiques. Ce sont les seniors de chez nous, si je puis dire. Globalement, on est un peu tous du même acabit. Méfie-toi quand même un peu de Tayron, le garçon de la chambre 6B avec qui tu discutais hier, c'est un excellent étudiant et très respectueux du mode de vie de notre étage, mais je l'ai très souvent vu en compagnie de filles, jamais la même plus d'un mois. Je les croisais soit tard le soir, soit tôt le matin. Mais c'était l'an dernier, peut-être a-t-il mûri durant l'été ? À ce moment-là, je me brossais les dents, je n'ai donc rien dit. - Et pour la chambre 9B ? Finis-je par demander. - Aucune idée, jamais vu en un an qu'il est là. C'est un mec avec une grosse berline noire, une Jaguar il me semble, je ne peux pas t'en dire plus. Désolée. Après lui avoir souhaité une bonne journée, je suis retournée dans ma chambre pour enfiler un corsaire en jeans, un petit haut léger blanc et une paire de ballerines. J'ai attrapé un sac, dans lequel j'ai fourré mon porte-monnaie, mon téléphone, mon journal, un bloc-notes et quelques stylos, ainsi que ma ventoline (il m'en faudrait ne serait-ce que pour monter les escaliers). Lunettes de soleil sur le nez, je suis revenue dans le petit resto d'hier soir, parce que j'avais remarqué sur la carte qu'il faisait des petits-déjeuners canadiens, avec pancakes au sirop d'érable, œufs brouillés et bacon en accompagnement. Je me suis assise à une table au fond de la salle à côté du juke-box, en plein soleil. Et j'ai flâné quelques minutes avant que la serveuse arrive. - Mais c'est ma petite demoiselle d'hier soir ! Bonjour ! - Bonjour Madame, répondis-je avec le sourire. - Oh ! Appelle-moi Cynthia ! Je sens qu'on va bien s'entendre ! S’émerveille-t-elle. Cette dame est tout à fait charmante, un peu ronde, les cheveux tirés en arrière, coiffée d'une tresse, elle porte à merveille sa tenue de serveuse, c'est un peu un personnage. Elle est très aimable et n'a pas quitté son sourire depuis la veille. Très enthousiaste, elle donnerait le sourire à n'importe qui. - Qu'est-ce que je peux te servir ce matin ? - J'ai vu que vous faisiez des petits-déjeuners canadiens, ça me ferait vraiment très plaisir, lui dis-je avec entrain. - Oh ! Marcel ! Un deuxième canadien s'il te plaît ! Hurle-t-elle en courant dans la cuisine. Je ne comprenais pas pourquoi cela lui procurait autant de joie, mais je suis ravie d'avoir commencé ma journée dans cette ambiance.
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