La Saint-AntoineC’est samedi prochain la fête de mon père. Ma mère me l’a dit soixante fois depuis quinze jours. « C’est la fête –de – ton – père. » Elle me le répète d’un ton un peu irrité ; je n’ai pas l’air assez remué, paraît-il. « Ton père s’appelle Antoine. » Je le sais, et je n’éprouve pas de frisson ; il n’y a pas là le mystérieux et l’empoignant d’une révélation. Il s’appelle Antoine, voilà tout. Je suis sans doute un mauvais fils. Si j’avais du cœur, si j’aimais bien mon père, ce qu’elle dit me ferait plus d’effet. Je me tords la cervelle, je me frappe la poitrine, je me tâte et me gratte ; mais je ne me sens pas changé du tout, je me reconnais dans la glace, je suis aussi laid et aussi malpropre. C’est pourtant sa fête, samedi. « As-tu appris ton compliment ? » Je me tr