CHAPITRE VI L’agneau vendu au boucher Dans les grandes peines, il y a des détails qui échappent à l’œil de l’étranger, détails qu’on ose à peine s’avouer à soi-même, mais qui augmentent réellement l’amertume du chagrin. Nous avons vu le bon cœur de Madeleine rempli de tristesse à cause de la maladie de sa mère et des malheurs qui en étaient les conséquences inévitables. Eh bien, dans ce cœur dévoué à la famille, il y avait un tout petit coin occupé par le jeune agneau que Madeleine nourrissait de sa main et qui la suivait, moitié parce qu’il avait faim, moitié parce qu’il l’aimait. C’était son camarade quand elle allait sur la route faire de l’herbe pour les lapins, et, quand elle ne lui permettait pas de la suivre, il l’attendait sur le pas de la porte, et, au retour, lui disait bonjour