ArthémiseEn me voyant comme ça, les mains croisées sur ma canne avec un air bonhomme, vous ne vous douteriez jamais des trésors de férocité qui longtemps ont germé dans mon sein. Les hivers, les chagrins et la fièvre typhoïde ont, petit à petit, tari le torrent fougueux de mes passions juvéniles ; mais à votre âge, mon cher Monsieur, à votre âge, je battais les femmes ! J’avais vingt-trois ans, elle s’appelait Arthémise et nous habitions la rue des Maçons-Sorbonne. Tout s’explique, n’est-ce pas ? Corsage opulent, cheveux noirs, dents blanches, lèvres rouges, santé de fer, Arthémise était superbe. Sa voix de basse profonde avait des sons tellement cuivrés que, quand elle chantait, tout le quartier s’écriait : – Allons, bon ! voilà le vieux commandant qui répète encore ses exercices ! C’é