Chez BérangerLes vieux s’arrogent le privilège de raconter à la jeunesse des histoires de l’autre temps. Si je ne cédais à cette irritante manie, on ne m’en saurait aucun gré ; donc, imitant les vieux, je commence mon petit récit. Dans mon enfance, mon père, montagnon franc-comtois, me mit en pension chez un de ses anciens amis, imprimeur de la petite sous-préfecture où se trouvait un collège communal. Très versé dans les belles-lettres, poète aimable, philosophe voltairien, c’est au brave père Renaud, qui surveillait mon éducation, que je dois les vices qui me distinguent, c’est-à-dire le mince souci de la fortune, la modestie ridicule et la courtoisie narquoise qui caractérisent si fréquemment les gens de ma race. Vous m’excuserez peut-être, lecteur, quand je vous avouerai que plus tard