Eléa ne pouvait plus ignorer l’intensité du moment. Alexandre était si près d’elle, son souffle chaud effleurant sa peau. Ce b****r qu’ils partageaient, celui qu’ils s’étaient interdit pendant si longtemps, brûlait de passion et d’interdits. Tout dans cet instant semblait irréel, comme s’ils étaient les seuls à exister dans cet espace clos.
Mais soudain, un son, faible mais distinct, parvint à ses oreilles. Le cliquetis caractéristique de talons frappant le sol lisse du couloir, se rapprochant à mesure que chaque seconde passait. Son corps se raidit instantanément. Sophie.
Elle sentit Alexandre réagir au même moment. Leur proximité, si intime quelques instants plus tôt, se brisa soudainement. Alexandre recula précipitamment, ses yeux s’écarquillant alors qu’il comprenait la gravité de la situation. Ils avaient été sur le point de franchir une limite irréversible, mais la réalité venait de les rattraper.
— Sophie est là, murmura-t-il d’une voix à peine audible.
Eléa, le cœur battant à tout rompre, se redressa rapidement, lissant nerveusement sa jupe, tentant de reprendre contenance. La porte était encore fermée, mais les pas de Sophie se faisaient de plus en plus proches. Leurs regards se croisèrent une dernière fois, empreints d’une tension mêlée de panique. Ils savaient tous deux qu’ils avaient frôlé le désastre.
Un instant plus tard, la porte du bureau s’ouvrit doucement, laissant apparaître Sophie Zervaine, impeccable comme toujours, dans son tailleur élégant. Son visage affichait son habituelle assurance froide, mais ses yeux balayaient la pièce d’un air scrutateur. Eléa sentait son estomac se nouer tandis que Sophie avançait vers eux, ignorant d’abord son mari, comme si elle sentait qu’il y avait quelque chose à découvrir.
— Oh, vous êtes là, Eléa, dit Sophie, son ton poli mais détaché. Je ne vous avais pas vue à la réunion ce matin.
— Oui, j’ai eu beaucoup de travail à terminer, répondit Eléa en s’efforçant de paraître aussi professionnelle que possible.
Sophie ne semblait pas totalement convaincue, mais elle ne dit rien de plus. Elle détourna enfin son regard d’Eléa pour se tourner vers Alexandre, qui avait réussi à retrouver une certaine contenance. Il lui sourit, bien que légèrement crispé.
— Sophie, qu’est-ce qui t’amène ?, demanda-t-il, tentant de maintenir une voix calme.
— Je voulais te parler de la soirée de charité de la semaine prochaine, répondit-elle simplement, en jetant un coup d'œil autour de la pièce, comme si elle cherchait quelque chose. J’aimerais que nous y allions ensemble. C’est important pour l’entreprise.
Alexandre hocha la tête, mais Eléa pouvait voir la tension sur son visage. La présence de Sophie, si proche après ce moment qu’ils venaient de partager, rendait chaque seconde plus pesante. Eléa, quant à elle, se sentait coincée dans cette pièce, piégée entre deux mondes.
— Bien sûr, répondit-il. Nous pourrons en discuter ce soir.
Sophie, semblant satisfaite de cette réponse, jeta un dernier regard à Eléa, avant de sourire, bien que ce sourire ne parvienne pas à masquer une certaine froideur.
— Je vais te laisser travailler, alors. Eléa, bonne journée.
Eléa lui répondit d’un faible sourire, soulagée que Sophie ne semble rien avoir découvert, mais le cœur toujours lourd d’angoisse.
Une tension palpable
Lorsque la porte se referma derrière Sophie, Eléa poussa un soupir qu’elle ne savait pas retenir. Elle s’appuya contre le bureau, tentant de calmer son cœur battant encore furieusement. Alexandre, lui, se passa une main sur le visage, visiblement soulagé d’avoir échappé de justesse à une catastrophe.
— C’était… trop proche, murmura-t-il.
Eléa hocha la tête, son esprit encore sous le choc de la tension du moment. Ils avaient frôlé l’irrémédiable, et elle se demandait comment ils en étaient arrivés là.
— Je devrais y aller, dit-elle enfin, sa voix à peine un murmure. Nous ne pouvons pas continuer comme ça, Alexandre.
Il ne répondit rien, mais elle pouvait voir dans son regard qu’il comprenait. Il se rapprocha d’elle, mais cette fois, pas pour la toucher. Seulement pour échanger un dernier regard, rempli de tout ce qu’ils ne pouvaient se dire.
— Je sais, murmura-t-il finalement, sa voix basse et lourde de regret. Mais… c’est plus fort que moi.
Eléa ferma les yeux un instant, essayant de contenir les émotions qui la submergeaient. Elle savait que cela ne pouvait pas durer. Pas ainsi. Mais en même temps, elle savait qu’elle n’était plus maîtresse de ses sentiments.
— Je ne veux pas… mais je ne peux pas m’empêcher de…, commença-t-elle, mais elle ne termina pas sa phrase.
Elle se détourna et se dirigea vers la porte, prête à partir, à s’échapper de cette situation avant qu’il ne soit trop tard. Mais elle savait que cette situation n’était pas terminée. C’était comme une tempête qui continuait à grandir, et elle se demandait combien de temps ils pourraient encore résister avant que tout n’éclate.
La porte se referma doucement derrière elle, et Eléa se retrouva dans le couloir, tentant de reprendre son souffle. Elle avait l’impression de flotter entre deux mondes, incapable de trouver son équilibre. La présence de Sophie, l’apparition soudaine qui avait interrompu ce moment avec Alexandre, lui avait rappelé brutalement la réalité de la situation. Alexandre était marié, et malgré tout ce qu’elle ressentait, malgré tout ce qu’ils avaient failli partager, cette vérité ne pouvait être ignorée.
Elle savait qu’elle devait prendre ses distances, qu’elle devait se protéger avant que les choses ne tournent encore plus mal. Mais au fond d’elle, quelque chose continuait de l’attirer vers lui, irrésistiblement.
De son côté, Alexandre resta un long moment immobile dans son bureau après le départ d’Eléa. Il savait qu’ils avaient échappé de peu à la découverte de leur relation naissante, mais cela n’apaisait pas la tempête qui faisait rage en lui. Son mariage avec Sophie n’avait plus rien de sincère, de vivant, mais il savait aussi qu’il ne pouvait pas simplement tout laisser derrière lui. Il avait des responsabilités, une image à maintenir. Mais avec Eléa, tout semblait différent. Il pouvait être lui-même, sans masque, sans compromis.
Il repensa à ce moment, juste avant que Sophie n’entre. Ce b****r, cette chaleur qu’il avait ressentie… cela avait tout changé. Mais pouvait-il vraiment continuer ainsi ? Pouvait-il sacrifier sa vie, son mariage, pour quelque chose qu’il ne pouvait même pas encore définir ?
La question restait suspendue dans l’air, sans réponse. Et pour la première fois depuis longtemps, Alexandre ne savait pas quelle direction prendre.