Le matin du retour au travail, Éléa se tenait devant le bâtiment de l’entreprise, le cœur battant à tout rompre. Elle avait passé quelques semaines à se reconstruire chez ses parents, loin des tensions et des incertitudes. Mais aujourd’hui, revenir ici, dans cet environnement chargé de souvenirs avec Alexandre, faisait monter une vague de sentiments contradictoires. Peur, appréhension, peut-être un brin de nostalgie. Elle n’arrivait pas à définir exactement ce qu’elle ressentait. Tout ce qu’elle savait, c’est que son cœur était en train de tambouriner dans sa poitrine.
Elle inspira profondément avant de franchir les portes de l’entreprise. À chaque pas dans les couloirs familiers, les souvenirs lui revenaient, la submergeant. Chaque coin, chaque bureau évoquait un moment de sa relation secrète avec Alexandre, un sourire échangé en cachette, une complicité professionnelle qui avait rapidement dérivé en une attraction irrésistible. Elle sentit un nœud se former dans son ventre alors qu’elle s’approchait de l’ascenseur.
En montant dans l’ascenseur, seule, Éléa ne pouvait s’empêcher de repenser à la dernière fois qu'elle avait vu Alexandre. Il lui avait promis qu’elle changerait de service, une façon de mettre de la distance entre eux, d'effacer leur passé trouble. Pourtant, maintenant qu’elle était là, elle ne savait pas vraiment à quoi s’attendre. L’ascenseur semblait grimper trop lentement, chaque étage ajoutant une nouvelle couche d’appréhension.
Quand les portes s’ouvrirent enfin à son étage, Éléa prit une grande inspiration et sortit. Les couloirs menant au bureau d'Alexandre lui parurent interminables. Son cœur battait si fort qu’elle craignait que quiconque puisse l’entendre. Elle ne savait pas ce qu’elle allait découvrir, ni comment Alexandre allait réagir en la voyant.
Éléa arriva devant la porte du bureau. Elle inspira profondément, hésita un instant, puis frappa doucement avant d'entrer.
— Alexandre ? appela-t-elle doucement.
Alexandre se retourna brusquement en entendant sa voix, son regard s’agrandissant sous l’effet de la surprise. Mais avant qu’elle ne puisse comprendre quoi que ce soit, il se dirigea vers la porte de son bureau et la claqua avec force. Le bruit résonna violemment dans la pièce, et Éléa fit un bond, totalement déconcertée. Son cœur s’accéléra encore davantage. Pourquoi était-il si en colère ? Qu’est-ce qui se passait ?
Alexandre, visiblement furieux, se rapprocha d’elle à grands pas, les mains enfouies dans ses poches, sa mâchoire serrée.
— Mais où étais-tu, bon sang ? s’écria-t-il, sa voix tremblant de frustration. Je t'ai cherchée partout ! Je t'ai appelée, et aucune réponse ! Qu'est-ce qui s'est passé ?
Éléa, encore plus déstabilisée par ce brusque changement d’attitude, resta figée, incapable de comprendre la situation. Elle balbutia une réponse.
— Je... j'avais besoin de quelques jours... Je suis partie chez mes parents.
Mais Alexandre ne semblait pas vouloir entendre cette explication. Son visage était crispé de colère, et il ne laissa pas Éléa terminer.
— Pourquoi n'as-tu pas répondu à mes appels ? insista-t-il, sa voix montant d’un cran.
Elle prit une profonde inspiration, essayant de garder son calme, mais elle sentait la colère monter en elle. Elle n’avait rien fait de mal. Elle avait pris du recul pour se ressourcer.
— J'avais besoin d'être seule, répondit-elle avec fermeté. J'ai éteint mon téléphone. Je t'avais prévenu que je prenais quelques jours.
Mais Alexandre semblait implacable. Il continua à lui faire la morale, critiquant son absence et l’accumulation de travail qu’elle avait laissée derrière elle. La patience de Éléa commençait à s’effriter. Elle sentait la frustration monter, son cœur battant de plus en plus fort sous l’effet de la colère refoulée.
— Arrête ! cria-t-elle soudain, la voix tremblante d’émotion. Ça suffit, Alexandre !
La pièce se figea dans le silence. Alexandre se stoppa net, surpris par l’intensité de son cri. Il la regarda, abasourdi. Éléa, les yeux brillants de larmes qu’elle s’efforçait de retenir, se reprit d’une voix plus calme, mais encore teintée de colère.
— Je t'ai dit que j'avais besoin de me retrouver seule. De prendre l'air. Alors laisse-moi tranquille.
Elle essayait de contenir ses émotions, mais ses mains tremblaient légèrement. Le silence dans la pièce était lourd, tendu, jusqu'à ce que la porte du bureau s’ouvre brusquement.
— Qu'est-ce qui se passe ici ? s’écria Sophie, entrant précipitamment dans la pièce.
Éléa sursauta en entendant la voix de Sophie. Elle se tourna rapidement, essuyant ses larmes d’un geste maladroit. Sophie fixa Éléa puis regarda Alexandre avec une expression perplexe.
— Pourquoi est-ce qu'Éléa pleure ? demanda-t-elle d'un ton sec, les sourcils froncés.
Alexandre, qui semblait avoir repris son calme, lui répondit d'une voix plus posée, bien que toujours tendue.
— Je suis en train de clarifier certaines choses avec elle. Elle a été absente pendant plusieurs jours, et à cause de ça, le travail s’est accumulé.
Sophie croisa les bras, secouant la tête.
— Mais Éléa avait pris des jours de repos, non ? La direction était au courant. D’ailleurs, tu avais une remplaçante pour l'occasion, n’est-ce pas ?
Alexandre soupira, visiblement contrarié.
— Oui, mais la remplaçante n’était pas à la hauteur. Il n’y a que Éléa qui sache gérer ce travail correctement, vu son expérience.
Le cœur d’Éléa se serra encore plus. Elle se trouvait là, coincée entre Alexandre et Sophie, incapable de dire un mot. Elle savait qu’elle aurait dû changer de service, mais rien ne s’était encore concrétisé. Elle avait besoin de savoir ce qu’elle devait faire maintenant.
Sophie posa une main apaisante sur le bras de Alexandre.
— Elle est là maintenant, alors arrête de stresser. Elle vient juste d’arriver, et tu lui cries déjà dessus.
Puis elle se tourna vers Éléa.
— Va travailler, Éléa. Ignore-le, il est de mauvaise humeur en ce moment.
Alexandre, regardant Éléa droit dans les yeux, reprit d’un ton plus sec.
— Maintenant que tu es là, retourne travailler. Il y a beaucoup à faire. Tout s'est accumulé sur ton bureau.
Éléa resta figée un instant.
— Sur mon bureau ? murmura-t-elle, incrédule.
— Oui, sur ton bureau. Tu peux y aller maintenant, répéta Alexandre.
Elle se tourna vers la porte, confuse et déconcertée. N’avait-il pas dit qu’elle changerait de service ? Pourquoi la gardait-il encore ici, près de lui ? Tandis qu'elle s'éloignait, les questions tourbillonnaient dans sa tête, la laissant encore plus perdue.