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Le Vice suprême

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Extrait : "Elle est seule. Plein d'ombre alanguie et de silence berceur, clos à la lumière, clos au bruit, le boudoir circulaire a le recueillement rêveur, la somnolence douce, d'une chapelle italienne, aux heures de sieste ; buen retiro, semblable à l'étage d'une tour ronde, sans baie à ses murs elliptiques, où cloutée d'argent aux plis, la pourpre héraldique étale, en un satin violet plein de rouge, son deuil royal et sa magnificence triste."

À PROPOS DES ÉDITIONS LIGARAN

Les éditions LIGARAN proposent des versions numériques de qualité de grands livres de la littérature classique mais également des livres rares en partenariat avec la BNF. Beaucoup de soins sont apportés à ces versions ebook pour éviter les fautes que l'on trouve trop souvent dans des versions numériques de ces textes.

LIGARAN propose des grands classiques dans les domaines suivants :

• Livres rares

• Livres libertins

• Livres d'Histoire

• Poésies

• Première guerre mondiale

• Jeunesse

• Policier

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I
IParmi les romans dont nous sommes si impitoyablement criblés, à cette heure, en voici du moins un que je n’attendais pas et qui n’a pas le ton des autres ! En voici un qui nous enlève avec puissance à la vulgarité des romans actuels qui abaissent la notion même du Roman et qui, si cela continue, finiront par l’avilir… Le Roman, en effet, tel que l’aime et le veut l’imagination contemporaine et tel que le lui font les serviles du succès n’importe à quel prix, n’est guère plus maintenant que la recherche et la satisfaction d’une curiosité plus ou moins frivole ou plus ou moins corrompue. Pour la forme et pour l’art, de deux choses l’une : ou il s’effeuille misérablement en œuvres courtes, sans haleine et sans portée, auxquelles l’idéal manque autant que la moralité, ou il s’allonge, plus misérablement encore, en des aventures imbéciles. Ajoutez à cela dans les très rares où l’on distingue quelque talent, tous les morcellements et toutes les pulvérisations de l’analyse, car l’analyse est le mal intellectuel d’un siècle sans cohésion et sans unité, et dont les œuvres littéraires portent, même sans le savoir, la marque d’un matérialisme qui est toute sa philosophie… On le comprend, du reste. L’analyse, cette faculté de myope qui regarde de près et ne voit les choses que par les côtés personnels et imperceptibles, se trouve beaucoup plus exactement et naturellement en rapport avec la masse des esprits faibles dont la prétention est d’être fins, que la vigoureuse et large synthèse qui voit les ensembles d’un regard et les étreint quelquefois avec la poigne du génie. Il ne faut pas s’y tromper. Le temps n’est pas à la synthèse ! Présentement, les ramasseurs de microbes et les cardeurs de riens l’emporteraient en littérature sur les plus mâles créateurs, s’il y en avait ! Je sais bien qu’on ne peut pas supprimer absolument la Synthèse dans l’esprit humain sans tuer l’esprit humain lui-même, mais dans la vaste décomposition qui s’avance sur nous, on peut très bien prévoir le moment où l’analyse qui dissout tout, dans les livres comme dans les sociétés, dissoudra aussi le roman dont la synthèse serait la beauté ; le roman, c’est-à-dire la seule grande chose littéraire qui nous reste, l’épopée des sociétés qui croulent de civilisation et de vieillesse, et le dernier poème qui soit possible aux peuples exténués de poésie ! Eh bien ! c’est ce genre de roman dont si peu d’esprits sont capables dans l’amollissement et l’affadissement universels, c’est ce genre de Roman qui fit de Balzac le plus grand romancier de tous les temps et de tous les pays, qu’un jeune homme inconnu encore – du moins dans le roman – ose, après Balzac, aborder aujourd’hui ! Tête synthétique comme Balzac, M. Joséphin Péladan n’a pas été terrorisé par cet effrayant chef-d’œuvre, le sublime diptyque à pans coupés que Balzac appela « La Comédie humaine », et il a écrit le Vice suprême, qui n’est d’ailleurs qu’un coin de l’immense fresque qu’il va continuer de nous peindre. Balzac, dans sa grande « Comédie humaine » – sur laquelle il mourut, hélas ! sans l’achever – avait donné l’éblouissante synthèse de la société de son temps, éblouissante encore. Mais après Balzac, quelques années de la plus foudroyante décadence pour la rapidité, ont élargi sa colossale synthèse, et c’est cette colossale synthèse élargie que M. Joséphin Péladan a entrepris de nous donner à son tour… Il a pris sur ses jeunes bras plus lourd que Balzac, et, disons-le, plus terrible. Ce n’est pas de la synthèse d’une société entre toutes qu’il s’agit dans son livre, comme dans la Comédie humaine, – mais de la synthèse de toute une race, – de la plus belle race qui ait jamais existé sur terre, – de la race latine qui se meurt. Formidable sujet, car il est écrasant, mais magnifique, pour l’homme qui ne restera pas dessous !

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