Chapitre 4 Gérald

1496 Words
Ariel Enfin, je rentre. Betty m'a accompagné à la gare, vérifié mon billet et même fait monter dans le train, c’est une maman de substitution et une grande sœur. Les gens nous ont dévisagé, c'était asse drôle, elle pinup des années cinquante, sourire ravageur, provoquant une épidémie de torticolis sur son passage et moi grande brindille blanche l’air malade. C’était comme observer la fusion de deux mondes qui cohabite. Nous avons plus parlé dans la voiture sur le trajet de la gare que moi et ma mère lors de ma visite au salon. Betty est un rayon d’arc-en-ciel, je l’adore et elle me le rend mille fois. J’avais trouvé ma mère un peu fatiguée et cela m’inquiétait _Betty ? maman m'a l’aire épuisée, tous va bien au salon ou à la maison ? Je la vois réfléchir quelques secondes. _Il y a pas mal de travail au salon, c'est vrai, à la maison tout se passe bien, mais oui, je trouve aussi qu’elle est moins pétillante. Elle a prévu de venir te voir en juillet, elle s’organise pour ça. Ne t’inquiète pas, je vais surveiller de près promis. _Et toi ma belle comment ça ce passe ça fait deux ans que tu es là-bas maintenant ? Ils vont te garder combien de temps encore ? tu m’as pourtant l’aire d’aller mieux, tu pourrais reprendre des cours au lycée l’année prochaine non ? Je tourne mon visage vers la vitre de droite et soupir. _Le Docteur Miranda dit que je suis très fragile et que cela va prendre du temps, je fais encore des cauchemars et j’ai des crises de panique. Elle m’a dit que la vie est comme un fleuve, elle s’écoule pour tout le monde de façon plus ou moins calme et que je dois arrêter de lutter. Mais mon fleuve à moi doit être comme l’Amazone et traverse une mer déchainée. Quand je ferme les yeux je ne fais plus la différence entre ce qui est dans mon fleuve ou ce qui nage dans cette mer, j’en ai peur. Betty se fend d’un magnifique sourire et me répond : _Pourquoi tu ne tends pas la main dans la mer ? Soit curieuse ma belle, voyage parmi ces mondes, une fois que tu les connaîtras ils ne te feront plus peur ! J’éclate de rire en répondant. _C’est exactement ce que M. Gérald m’a dit, vous vous entendriez bien tous les deux. _Mr Gérald ! Le jardinier ? Il pourrait m’être utile, c'est vrai, une sorcière comme moi a toujours besoin de belle plante. La prochaine fois que je viens te voir, il faudra que tu me le présentes. _Je pense que tu vas lui faire peur, oui. Nous repartons pour un énième fou rire. Betty ne juge pas les gens sur leurs apparences ou leur métier, c’est ce qui me plait chez elle. Monsieur Gérald est le gardien et le jardinier du sanatorium, il n’est pas sociable, et terrifie autant les patients, leurs familles que le personnel du sanatorium. *Flash-back* Six mois que je suis ici, après ma crise à l’enterrement de Papounet, maman, sur les conseille du Docteur Miranda, m’a fait entrer dans ce sanatorium. Six mois que je ne dis pas un mot, je suis une ombre. Je prends des médicaments matin, midi, soir. Je vois le Docteur Miranda tous les 2 jours et c’est sœur Hélène qui s’occupe de moi, elle m’habille, me lave, me nourri et me fait prendre les médicaments. Je ne suis jamais sortie, je m’en fous d’ailleurs, je reste dans ma bulle de souvenir, je revis en boucle les moments avec mon Papounet. Je ne fais pas vraiment attention à ce qui se passe autour de moi, les médicaments m’assomment de toute façon. Il fait beau, le soleil réchauffe tout mon visage, le vent, léger, caresse mes cheveux. LE VENT !! Pourquoi je sens le vent ? pourquoi je sens un parfum de fleur ? De la chaleur ? Quelque chose bouge dans ma tête, une min nie moi, je la vois avancer à quatre pattes vers deux grandes fenêtres rondes, elle s’arrête, respire doucement, et s’approche encore des fenêtres. Lorsqu’elle se penche par les fenêtres mes yeux s’ouvrent en grand, je vois des couleurs comme si c’était la première fois. Je suis assise dans un fauteuil roulant, une douce couverture sur mes genoux. Je tourne la tête de tous les côtés, comment je suis arrivé là ? On m'a mise près d’un Lilas, ses fleurs embaument l’aire, à côté ce trouve un portique qui ouvre sur une roseraie, je sens le parfum de chaque fleur en bourgeons. La vue est magnifique, le soleil me réchauffe, je sens mon cœur battre, doucement, régulièrement, comme se réveillant d’un long sommeil. Puis les douleurs se réveillent, mon postérieur est douloureux, j’ai l’impression d’être assise sur des couteaux. Mes épaules sont douloureuses, même ma respiration envoi des aiguilles partout en moi, la panique commence à me prendre, je n’arrive pas à calmer tous ça. -Doucement jeune demoiselle ! penche-toi un peu, ferme tes yeux et respire doucement, ça va passer. Depuis le temps où tu es parti ton corps, c'est affaibli et tu as quelques escarres, aller respire doucement. Je suis les conseils, ferme mes yeux, je sens deux mains immenses saisirent mes épaules et me basculer en avant, ma tête repose sur un coussin vivant, la voix et rauque et rassurante. Je cale ma respiration sur ce coussin géant, mon cœur ce calme, mes poumons m’obéissent enfin, les douleurs s’atténuent un peu. _Voilà, c’est bien continu à respirer doucement, quand tu seras prête ouvre doucement tes yeux, je reste à côté de toi. Son ton est paternel, rassurant, c’est la première voix que j’entends vraiment une voix depuis une éternité. Les yeux fermés, je sens une odeur de terre, de transpiration ainsi que l’odeur d’une crème pour le corps. Après quelques minutes, je me décide à rouvrir mes yeux, doucement cette fois. Je vois la couverture sur mes genoux et un ventre ! pas énorme, mais bien présent, je vois que mon sauveur porte un vieux gilet beige pardessus un tablier vert qui a déjà bien vécu ; _On se redresse jeune fille ? me demande mon sauveur. Je fais oui de la tête. Ses deux énormes mains me redressent doucement, je grimace en sentant la douleur aigue sur mes fesses. _Je pense qu’il te faudra un coussin pour ta prochaine sorti, jeune fille, jusqu’à ce que tu puisses t’assoir normalement. Je souris et relève enfin mon visage pour découvrir celui de mon sauveur. Il est très grand, je suis un peu surprise de son visage et il le voit, comment dire ? toute la partie droite de son visage porte des cicatrices, c’est comme si la moitié de son visage avait fondu, la moitié gauche est lisse et il a un visage de poupon, son crane est entièrement chauve. Voyant ma surprise, j'aperçois de la tristesse dans son regard, il se redresse et commence à vouloir s’éloigner de moi, je retiens sa main droite sur mon épaule, elle aussi est brulée, il me regarde surpris. _Pas d’inquiétude, jeune fille, j’ai l’habitude que les gens aient peur du monstre que je suis. _Ariel, je m’appel Ariel pas jeune fille, et qui êtes-vous ? je lui demande en lui faisant un doux sourire. Il est surpris, mais me répond : _Gérald, je suis le gardien et le jardinier du domaine. Ne te force pas, je sais que je fais peur. _Non, je ne me force pas, vos yeux sont doux et vous êtes le premier avec qui je parle depuis longtemps _Tu n’as pas peur de ça ?, me dit-il, en me montrant la partie droite de son visage. Je penche légèrement la tête à droite et le regarde attentivement. _La fusion de Kruger et Oncle fétide. Ho mon Dieu, je l’ai dit à voix haute ? _Oui jeune Ariel. J’adore, me dit-il en se mettant à rire, tu es la personne la plus honnête que je rencontre depuis fort longtemps. Depuis cette rencontre chaque jour, j'ai des fleurs dans ma chambre et M. Gérald m’emmène dehors, découvrir les jardins, à chaque fois que sœur Hélène est absente. Je suis penché à la fenêtre du train pour parler avec Betty, le départ est pour bientôt. _Prend soin de toi Ariel. Me dit elle avec son doux sourire. Et je vais voir avec ta mère si on peut te faire venir plus souvent, je trouve que le Docteur Miranda est trop prudente et qu’elle te donne trop de médicament. _Promis Betty, je vais faire attention, et pour les médicaments, je ne les prends pas tous, mais ne dit rien à maman. La voix dans le haut-parleur annonce le départ de mon train, les portes ce ferment, et le train démarre. Je fais signe de la main en regardant le quai s’éloigner, Betty a peut-être raison, il va falloir que je sois prudente, je ne veux pas passer ma vie au sanatorium.
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