Anna :
Alors que je regardais le paysage défilé, je repensais à cette année qui venait de s'écouler. Je me demandais ce que j'avais pu bien faire pour que Dieu s'acharne sur moi, comme il l'a fait... La route caillouteuse me secouait par moments et me sortait de mes sombres pensés.
_ Y-en a-t-il encore pour longtemps cocher ?
_ Une bonne heure, Mademoiselle.
Je retournai dans le fond de mon siège et patientai en sortant un livre. Accepter le poste d'institutrice dans une petite ville perdue au beau milieu de nulle part n'était peut-être pas l'idée la plus judicieuse que j'ai eue. Mais je ne pouvais plus supporter tout ça. Je ne voulais plus les laisser me détruire à petit feu. Je préfère supporter des personnes moins civilisées que de continuer à écouter tous ses dires à mon sujet...
_ On arrive à Wolfsburg d'ici à cinq minutes, Mademoiselle.
_ Oh, bien. Merci cocher...
Peu après, la diligence ralentit pour finir par se stopper complètement. Le cocher descendit du véhicule et m'ouvrit la porte, pour m'aider à descendre de la diligence. Après quatre jours de voyage. Je n'attendais plus qu'une chose, un bon bain et une bonne nuit dans un bon lit. Le révérend s'avança vers moi pour m'accueillir.
_ Mademoiselle mec... Mil... Eu...
_ Milysente. Anna Milysente. Mais je vous en prie, appelez-moi Anna.
_ Anna, avez-vous fait bon voyage ?
_ Un peu remuant, mais très agréable. Et la vue est splendide par ici.
Je le suivis jusqu’à son chariot et il m’aida à m’y installer. Je pensais que j’habiterais au-dessus de l’école ? Vais-je devoir faire la route tous les jours à pied ?
_ Excusez-moi de vous poser la question, mais où allons-nous ?
_ Mais, à votre logis. Il me semble avoir précisé dans la lettre, que nous vous fournissions le gîte.
_ Oui, effectivement. Je pensais qu’il se situait au même endroit que l’école.
_ Je crains que non, mademoiselle. Il se trouve à une petite demi-heure de la ville. Vous m’en voyez navré, mais c’est tout ce dont nous pouvons vous procurer.
_ Dans ce cas, je vais ouvrir l’œil afin de me repérer pour le chemin.
_ Celui-ci n’est pas bien difficile, il vous suffit d’aller tout droit en sortant de chez vous. Savez-vous conduire un chariot ?
_ Oui, j'en ai eu l’occasion dans mon ancienne chez moi.
_ Il me semble qu’il y a une carriole dans la grange, je demanderais que l’on vous procure un cheval.
_ Je vous en remercie, mais… Je n’ai pas vraiment les moyens de m’en acheter un.
_ Oh, mais ici. Il vaut mieux pour vous de ne pas vous promener à pied. Comme nous sommes assez éloignés des plus grandes villes, le secteur est assez sauvage et leur habitant peu aimable entre les ours, les coyotes et les loups…
_ Des ours, des coyotes et des… Loups ? Risquent-ils d’attaquer ?
_… Eh bien, cela dépend des saisons… Mais barricadé bien vos portes et vos fenêtres le soir et il ne devrait pas y avoir le moindre problème…
_ Mais, si cela est si dangereux. Avoir un cheval, ne risquerait-il pas de les attirer davantage ?
_ Pas vraiment, il ne s’attaque pas aux chevaux.
_ Vraiment ? Pourquoi cela ?
_… Eu… Disons que nous les tenons éloignés, le plus possible de la ville et ses alentours… Nous y voilà.
La maison était assez petite, mais semble confortable. Cela allait beaucoup me changer de la grande maison qui fut la mienne autrefois... Cela me semble si lointain, et pourtant, il ne s'est écoulé qu’une seule année depuis ce jour… La maison comprenait qu’une grande pièce avec un petit coin cuisine, une table sur la gauche et un grand lit dans le fond séparé par de grands doubles-rideaux… Une trappe se trouvait près d’un poêle, celui-ci menait à un garde-manger, qui servait aussi d’abri à tornade.
_ Cela vous satisfait-il ?
_ C’est parfait, je vous remercie mon révérend.
_ Oh, je n’y suis pour pas grand-chose, quand les parents des environs, on apprit qu’une institutrice avait accepté de venir ici, ils ont voulu vous remercier à leur manière.
_ Était-ce si dur de trouver, quelqu’un ?
_ Oui, je dois vous avouer que oui. Cela fait cinq ans que nous cherchons quelqu’un et à chaque fois, elle ne reste jamais bien longtemps… J’espère que vous, vous resterez.
_ Les enfants d’ici sont-ils si turbulents ?
_ Non, ce n’est pas cela, disons que… Soit, elle se marie, soit elle s’ennuie de la ville et de tout ce que l’on y trouve.
_ Dans ce cas, cela devrait aller. Je ne compte pas me marier et je n’ai jamais aimé la ville.
_ À la bonheur. Je m’en vais vous laisser vous installer. Demain, je vous présenterai à vos nouveaux élevés et je vous envoie un cheval dès la fin de l’après-midi ainsi, vous pourrez venir avec la carriole dès demain… Et ne refusez pas le cheval. S’il vous plaît.
_ Je ne pourrais accepter autant de bonté. Un cheval, coûté si cher. Je ne peux accepter, mais plus tard, quand j’aurai économisé assez…
_ Dans ce cas, que l’on vous le loue… Vous le paierez comme vous pourrez.
_ … Très bien, à qui devrais-je donner l’argent ?
_ Oh… Nous verrons cela plus tard. Quand vous serez installé.
_ Dans ce cas… Je vous raccompagne.
Alors que le révèrend retour d’où il vient, je visite mon nouveau domaine. La maison est entourée d’un jardin sur la droite, d'une grange à sa gauche et d’un poulailler plus entre les deux. La grange était tout aussi propre que la maison, deux boxes sur la gauche, une échelle qui permettait d’aller dans le grenier et la carriole bien ranger sur la droite. L’un des boxes pouvait déjà accueillir un animal, car de la paille fraîche y avait été déposée… En retournant vers chez moi, je vis au loin plusieurs loups qui scrutaient vers la maison. À leur vue, je retroussai le bas de ma robe et courus m’enfermer dans la maison. Suivant le conseil dû révèrent, je barricadai chaque fenêtre, ainsi que les deux portes. J’avais complètement oublié la présence de ses animaux ! Il faut dire que ses loups sont d’une corpulence impressionnante. Cela doit venir de leur environnement… En fin d’après-midi, un homme peu social m’apporta un magnifique cheval marron. D’une beauté si belle que je lui en donnai ce nom… À peine le cheval eut-il été installé que l’homme s’en retourna d’où il vient. Sans même m’adresser la parole…
_ Eh bien, j’espère que les élèves seront plus sociables. Me dis-je en caressant le museau de beauté.
Après avoir vérifié que beauté ne manquait de rien, je retournai chez moi et partie me préparait un petit repas avant d’aller me coucher. Demain serait une journée chargée nouveauté…