Anna
Quand je me réveille le lendemain, je prends le temps de déjeuner, je me fais un brin de toilette et m’habille. Terminant ma préparation par un chignon bien comme il faut… Je sors et prépare l’attelage, puis prends la direction de l’école. Quand j’arrive, plusieurs enfants sont déjà présents et dès qu’ils m’aperçoivent, ils se stoppent tous et me fixent. Je descends tranquillement de la carriole et suis rejointe par le révèrent…
_ Mademoiselle Mylasente…
_ Milysente. Bonjour révèrent.
_ Avez-vous passé une bonne nuit ?
_ Oui, si j’oublie là vu de ces gros loups.
_ Des gros loups… Eu… Oui, je vais vous présenter aux enfants.
Il frappe dans ses mains, demandant aux enfants de se rassembler et d’entrée dans l’école. Tous obéissent sagement.
_ Bon les enfants, je vous présente votre nouvelle institutrice. C’est elle qui vous fera la classe à partir d’aujourd’hui.
_ On ne vous verra plus révèrent.
_ Hors mi au catéchisme non. Mademoiselle, je vous cède ma place…
_ Je vous remercie. Nous nous reverrons à l’église, révèrent.
Il ressortit par la grande porte comme il était venu et me laissa face à une quinzaine d’enfants âgés entre 6 et 15 ans…
_ Bonjour, les enfants. Je suis Mademoiselle Milysente. Comme je ne connais pas encore vos prénoms, je vais vous demander de prendre un papier et d’écrit le vôtre dessus puis de le placer à votre place.
_ Et si on ne sait pas encore écrire ?
_ Dans ce cas, demander à un plus grand de le faire. Comment t'appelles-tu ?
_ Alice.
_ Alice, ton prénom s’écrit comme ça… Dis-je en l’écrivant sur le tableau noir. Tu peux t’entraîner à le réécrire.
Je regarde les enfants s’activer à leur tâche et attends patiemment qu’ils aient terminé !...
_ C’est parfait… Avez-vous des questions ?
D’abord hésitant, je vois une main, puis deux et trois. Je souris et interroge la plus proche de moi.
_ Oui Alice.
_ Vous venez d’où ?
_ De Saint-Louis, quelqu’un sait où se situe cette ville ?… Oui, Julie. Demandais-je en lisant son prénom.
_ Dans le Missouri.
_ Oui, pourrais-tu me montrer sa position sur la carte ?
La jeune fille aux couettes se leva et alla jusqu'à la carte accrochée au mur, puis à l’aide d’un bâton, me montra l’emplacement de la ville.
_ Bien, c’est exact. D'autres questions… Mmm Sam.
_ Combien de temps votre voyage a-t-il duré ?
_ Ça m'a pris, trois jours de train, quatre jours à attendre dans une ville, ensuite de nouveau deux jours de train et enfin cinq jours de diligence pour arriver ici même. Qui peut me dire combien de jour mon voyage a-t-il duré ?… Amanda.
_ Trois jours de train, plus quatre jours d’attente, plus deux jours de train, plus cinq jours de diligence, cela fait quatorze jours de voyage !
_ Bravo, je vois que vous êtes doué… Tommy, je t’écoute.
_ Vous avez quel âge ?
_ Oh ! Ceci est d’ordre privé. Mais comme nous allons passer beaucoup de temps ensemble, je peux faire une exception… Je fêterai ma vingt-cinquième année le printemps prochain.
_ Vous êtes plutôt jeune pour une maîtresse d’école.
_ J’ai eu mon certificat d’études à l’âge de seize ans. J’ai ensuite fait quelques années supplémentaires afin de me spécialiser dans certaines matières, puis j’ai obtenu mon premier poste. Chez moi, dans le Missouri.
Alors que les enfants continuent à me poser des questions, la porte d’entrée s’ouvrit et laissa place à un courant d’air tiède. Laissant apparaître un jeune garçon d’une dizaine d’années, suivie d’un homme…
_ Désolé pour le retard. Tim, c'est pas réveillé… Dit-il de sa voix grave.
L’homme don l’apparence de cow-boy ne laisse aucune place au doute, ne se formalisa pas à la politesse et ne chercha pas à se présenter davantage. Son visage caché sous son stetson ne me permettait pas de voir ses yeux. Je me racle la gorge, je repris vite un visage neutre et lui répond…
_ Il n’y a pas de mal… Monsieur ?
_ Miller, Mickaël Miller et lui, c’est Timothée.
_ Enchanter. Tu peux t’asseoir.
Alors que je relève la tête, je constate que l’homme a déjà tourné le dos et sort de la salle de classe… Il n’a même pas dit au revoir à son fils ? Sans plus de conviction, je reprends la classe qui se déroule sans encombre. À un détail près, les enfants n’arrivent pas à prononcer mon nom de famille correctement. Alors pour faire plus simple, il m’appelle Mademoiselle Mimi. À la fin de la journée, j’ai retenu la moitié des prénoms des enfants et à la fin de la semaine, je peux mettre un nom sur chaque visage qui me fait face…
_ Parfait, pour lundi, vous me résoudrez ce problème. Dis-je en l’écrivant sur le tableau.
Cinq minutes plus tard, je libère les enfants en leur disant de bien se couvrir comme il pleuvait des cordes dehors. Quand je sors, je monte sur ma carriole et prends la direction de chez moi… Au loin, je pouvais voir plusieurs enfants courir jusque chez eux. La plus par d’entre eux habitant le village. Seul quelqu'un d’entre eux vivait en dehors du village.
_ Timothée ? Tu rentres seule ?
_ Oui, mademoiselle. Mais ce n'est pas grave, vous savez, je connais le chemin.
_ Eh bien, comme nous prenons la même direction. Accepterais-tu de faire un bout de chemin en ma compagnie ?
_ … D’accord.
Il monte et s’installe à mes côtés. Depuis le début de la semaine, je n’ai pas encore eu l’occasion de mieux le connaître. Timothée est un enfant doué, il a de bons résultats. Mais à tendance à ne pas participer et reste enfermé dans sa bulle. Il n’est certes pas le seul. Plusieurs enfants, malgré un travail correct ne participent jamais en classe.
_ Alors, tu habites loin ?
_ Vers les collines, près des bois.
_ Ça fait un bout, tout de même.
La pluie continuée de tomber et j’aperçus au loin un cavalier approché, sa monture était aussi noire que la nuit. Au point que l’on aurait pu croire qu’il vole… Au fur et à mesure qu’il s’approche de nous, je pouvais voir Tim se tendre d’un seul coup.
_ Tu le connais ?
_ Ouais…
_ Tim, descend de là !
_ Oh, bonsoir. Je me suis permis de reconduire Timothée, comme il pleuvait et qu’il n’y avait personne…
_ Ça vous arrive souvent d’embarquer les gosses des autres comme vous l’avez fait ! Tim, tu devais me rejoindre au vieux chêne !
_ Désolé, Mam’zelle Mimi m’a proposé de m’emmener un bout de chemin et…
_ Et moi, je t’attends comme un c*n !! Grouille-toi.
Le garçon descendit de la carriole et atterrit aisément sur ses pieds. Cette enfant est d’une souplesse ! Il rejoignit l’homme et grimpa tout aussi facilement sur le cheval, s’accrochant au dos du cavalier…
_ Ne vous mêlez plus de Tim ! Il va à l’école et il revient de lui-même.
_ Je vous saurai gré de ne pas être aussi désobligeant ! Je voulais juste lui rendre service !
_ Dans ce cas… Évité de vouloir rendre… Service…
_ Elle ne pensait pas à mal. Dit le petit Tim derrière lui.
_ On lui a rien demandé !
_ Vous n’êtes qu’un… Goujat !! Vous pourriez penser à lui, votre fils était seul sous la pluie et…
Je m’arrête de parler alors qu’il rapproche un peu plus sa monture et se penche vers moi.
_ J’en ai rien à foutre de ce que vous pensez. Mêlez-vous de ce qui vous regarde !
Il fit reculer son cheval et disparut sous cette pluie battante. Quelle… Goujat mal élevé ! Je repris le chemin et rentrais chez moi. Après avoir mis le cheval à l’abri, je rentrai et barricadai tout, avant de retirer mes vêtements trempés. Je n’ai jamais vu un homme aussi mal poli ! J’espère ne jamais avoir affaire à nouveau à lui. Il ne reste plus qu’à espérer que sa femme soit plus conciliante.
_ Un simple merci aurait été la bienvenue. Mais non, cet homme a eu le culot de m’insulter !… Et maintenant, voilà que je me mets à parler tout seul… Tu vas finir comme cette vielle tante Huguette.
Une fois vêtu, je prends mon livre et regarde par la fenêtre, les gros loups sont encore là. Toujours à épier vers chez moi… Je ferme la fenêtre et mets la barre. Avant d’aller m’installer pour lire mon livre…
Mickaël
À peine arrivons-nous à la maison que Tim saute par terre.
_ Et merci, tu le mets dans ta poche !
_ Merci Oncle Mike !
_ De rien, bonhomme. Mais à l’avenir, évite de faire venir des inconnus sur notre territoire !
_… Mais, c’est pas une inconnue, c’est mon institutrice !
_ Ça reste une étrangère ! Et je ne tiens pas à ce qu’elle vienne ce mêlé de ce qui ne la regarde pas.
_ Mike, tu n’exagères pas un peu. Cette femme ne pensait pas à mal.
Je me tourne vers ma sœur qui arrive. Puis, elle embrasse son fils et me frappe le torse.
_ On ne peut pas faire confiance aux humains. Tu es bien placé pour le savoir !
_ Mickaël Miller ! Je t’interdis de mêler mon passé à tout ça ! Ce n’est pas parce que… Parce qu’il a refusé de faire partie de la vie de Tim, qu’ils sont tous comme ça.
_ Et à cause de lui, tu te retrouves à élever seul ton gamin !
_ Je ne suis pas seul… Tu es là et les autres membres de la meute aussi.
_… Ouais… Je me méfie quand même de cette femme. On ne sait pas qui elle est, ni d’où elle ne vient et…
_ Du Missouri…
_ Quoi ?
_ Elle vient du Missouri, elle l’a dit à ses élèves à son premier jour. Elle s'est présenté à eux et leur a autorisé à lui poser plusieurs questions.
_ Dit maman, ça veut dire quoi désobligeant ?
_ C'est quand tu n'es pas agréable avec une personne.
_ Alors oncle Mike a été méchant avec mam'zelle Mimi.
_ Normal, ton oncle réfléchi pas assez.
_ … Mouais, c'est ça. Pff… Maintenant excuse-moi, j’ai encore du boulot…
_ Mike… Tu peux peut-être te mentir à toi-même, mais tu ne me la fais pas à moi. J’ai très bien compris ce qui se passe.
Je regarde ma sœur, le visage fermé... Pas question de lui donner raison.
_ Je ne vois pas de quoi tu parles... J’ai du boulot.
Je lui tourne le dos et par finir de m’occuper des bêtes avant que la nuit ne tombe davantage. Quand je rentre, le repas se passe en silence et je ne compte pas le briser. À peine ai-je fini de manger que je pars faire le tour du territoire, arrivant à la limite de mes terres, je m’arrête face à la maison de l’étrangère… Fixant de mes yeux de loup la maison… Puis je retourne sur mes pas. Je rentre et une fois dans ma chambre, reprend mon apparence et m’écroule sur mon lit pour m’endormir à poings fermés… Les soirs de pleine lune sont toujours plus bénéfiques pour nous. Mais toujours aussi fatigante. En tant qu’homme-loup, on peut se transformer à volonté en Loup. Mais la transformation, que ce soit en animal ou en humain est douloureuse et épuisante. Dans un sens comme dans l’autre, nos os doivent se prisée, puis se reconstruire en l’apparence que l’on prend. Et durent les soirs de pleine lune, notre force en est multipliée par quarante au lieu de vingt. De même que notre vitesse et nos sens. Mais ce soir, ma moitié loup semble encore plus agitée que d’habitude et m’empêche de trouver le sommeil. Je ne sais pas pourquoi et je tente de fermer le double-rideau pour atténuer la lumière de la lune. Rien à faire, je n’arrive pas à dormir. Je me redresse et retour en bas… Je m’occupe comme je peux et pars même faire mon travail à l’avance. Ce n'est pas comme si ce sera la première fois que je ne dors pas la nuit…