Chapitre 2 : Renégat?

3547 Words
∞ Jack Les flics humains ne m'appréciaient pas en général. Il faut dire aussi qu'en dépit du fait que nous soyons du même côté, j'étais un peu comme un fédéral à leurs yeux... Un fédéral capable de leur souffler une affaire sous le nez en embarquant leurs dossiers et les heures de travail qui allaient avec mais pire encore, un change-forme tout comme celui qui avait massacré l'un de leur citoyen. Pire encore, j'étais un homme animal qui avait le droit de vie et de mort sur des gens de leur race comme de la mienne. Et pourtant... C'est avec un soulagement sincère et une joie évidente que le shérif fit signe à son adjoint de me laisser passer. — Bonsoir, Lunari. — Shérif Wakson. le saluais-je. Je m'accroupis à côté du corps calciné. Il n'en restait plus grand chose et, comme d'habitude, ni odeur, ni poil, ni quoique ce soit qui me permette de remonter jusqu'à ce fichu Renégat. Les Renégats étaient des change-formes qui avaient pété un câble et qui laissaient leurs animaux intérieurs tuer et détruire tout ce qui se trouvait sur leur chemin. Ils n'épargnaient rien, ni personne mais celui-ci en revanche... Il paraissait froid, méthodique et ne s'en prenait qu'à une victime à la fois, plus rarement à deux, avant de disparaitre mystérieusement. Il n'y avait jamais de témoins directs de la scène mais certains voisins des précédentes victimes avaient vu des flash de couleur avant et parfois après les meurtres. C'est ce qui avait conduit les autorités sur l'hypothèse que le meurtrier était un change-forme... Enfin ça, et le fait que les parties génitales des victimes masculines semblaient avoir été dévorées. C'est ce qui les avait conduits à appeler les Meneurs, mes Alphas. — C'est lui, ça ne fait aucun doute! dis-je en me relevant pour étudier la foule de gens qui se pressait autour des rubalises policières. — On a peut-être un témoin mais elle est trop choquée pour être utile pour l'instant. dit le shérif en montrant une vieille dame qui caressait un minuscule chien tremblant dans ses mains. Joan Triest, 78 ans, elle promenait son chien... Il se racla la gorge pour réprimer un rire et reprit. — Elle promenait son chien "Brutal" quand elle est tombé sur son voisin, notre victime : Hector De La Vila, 47 ans, juge aux affaires familiales du district, marié et père de trois enfants. — Et qu'est-ce que votre témoin a vu exactement? Le shérif reprit son calepin et consulta ses notes. — Ah, voilà! "Brutal s'est mis à grogner et à aboyer vers la haie, puis j'ai entendu un grondement. J'ai cru que c'était Kiko, le doberman de Monsieur De La Vila donc je n'ai pas prêté attention et c'est en passant devant le portail que je l'ai vu. Il y avait tellement de sang... Du sang partout! Il en était recouvert de la tête aux pieds. Alors je suis vite rentrée et je vous ai appelés." cita le shérif. — La victime avait un chien? Où est-il? — Il était dans la maison avec l'épouse et les enfants qui n'ont rien vu et rien entendu. — Dommage, j'aurais pu sentir une odeur sur ses poils. grognais-je. — Ça, ça m'étonnerait. Il est quasiment enragé ce clébard! Il a même voulu mordre un des enfants, on l'a enfermé dans les toilettes du rez-de-chaussée pour le moment. On attend les gars de la fourrière pour qu'ils le récupèrent. — Bizarre! — Quoi? — Si quelqu'un de votre famille venait à se faire dévorer dans votre jardin et que vous aviez un doberman un peu agressif, vous l'enverriez à la fourrière vous? — Ce chien-là? Oui! Surtout avec des enfants et les risques de morsures. Apparemment, seul monsieur De La Vila s'occupait de Kiko. Il n'écoute absolument pas sa veuve. On dirait même qu'elle craint plus le chien que la bestiole... euh... pardon, que le Renégat change-forme qui a boulotté son époux. — Une seconde! Vous avez bien dit que votre témoin avait vu du sang? — C'est exact! — Comment? — Comment quoi? — Comment a-t-elle pu voir du sang sur un corps carbonisé comme celui-là? dis-je en montrant les résidus noir de ce qui avait été Hector De La Vila. Vous voyez du sang vous? — Non. — Merde! Il était là! Il a laissé la vieille partir et il a cramé le corps entre le moment où elle a vu le corps et celui où vous êtes arrivés. Combien de temps entre l'appel et l'intervention? — 22h08, appel entrant de madame Triest pour signaler son voisin décédé. La patrouille a indiqué être arrivée sur place à 22h23. Ils ont immédiatement gelé la scène du crime. dit-il en consultant de nouveau son calepin. — Je peux leur parler? — Bien sûr, Lunari. Il saisit sa radio d'épaule et contacta les policiers en question qui n'étaient pas très loin. — Maltigue, Grinder. dit le shérif en me les présentant rapidement. Le Lunari a des questions pour vous! — Vous êtes sûrs de l'heure à laquelle vous êtes arrivés? — 22:22 à l'horloge du tableau de bord quand nous sommes arrivés à l'angle de la rue, j'étais en train de signaler notre arrivée quand c'est passé à 22:23. J'avais l'œil dessus! s'énerva aussitôt le premier. — Il suffisait de dire "Oui". répondis-je calmement. Je ne mets pas votre parole en doute, messieurs. Je cherche juste à déterminer en combien de temps le corps a brûlé. — Il fumait encore mais il n'y avait pas de trace de flammes. me dit l'autre. — Ouais, mais son visage... On aurait dit un tison. Il brûlait encore comme un morceau de charbon chauffé au rouge. Vous voyez ce que je veux dire? — Il avait prévu son coup, Wakson. dis-je au shérif. Sauf s'il a trouvé un accélérant dans les environs mais ça m'étonnerait. L'appel a eu lieu à 22h08, enlevons cinq minutes le temps que la vieille rentre d'ici à chez elle. Il n'y avait personne à votre arrivée je suppose? demandais-je aux gars de la patrouille. — Pas un chat! confirma celui qui avait été agressif au début. — Donc retranchons deux ou trois minutes pour que le Renégat se barre avant votre heure d'arrivée. Ça fait treize minutes. Même pas un quart d'heure pour brûler complètement le corps. Les gars, essayez de trouver un bidon ou un jerrican qui aurait contenu de l'essence ou un produit du même genre dans les alentours s'il vous plaît! Les hommes regardèrent leur supérieur qui hocha la tête en guise d'assentiment et ils partirent pour fouiller les environs. — Si on ne trouve rien, c'est qu'il est parti avec sous forme humaine! dis-je au shérif. — Et ça change quoi? — Ça change tout! Un Renégat ne fait pas ce genre de choses! Je crois qu'on a affaire à un tueur en série, Wakson. lui répondis-je. Je le soupçonne depuis quelque temps mais si on ne trouve pas ce fou.tu accélérant, on pourra en être sûrs! — Je vois pas bien ce que ça change. dit le shérif, troublé par mes propos. — Un Renégat tue sans discernement. Je me demandais pourquoi il n'y avait qu'une victime à chaque fois. Mais, si c'est un tueur de sang froid en revanche... — Ça explique pourquoi il brûle les corps, c'est pour ne pas laisser de trace. Ce n'est pas simplement sous l'effet de la rage parce qu'il n'y a personne d'autre à tuer. — C'est ça. Il va falloir étudier la victimologie pour comprendre ce que ses victimes ont en commun et pouvoir prévoir qui sera sa prochaine cible. — Et donc l'attraper avant qu'il ne la tue! comprit-il aussitôt. — Oui mais ça veut aussi dire qu'il faut recommencer l'enquête du début. Interroger les proches des victimes pour savoir s'ils ont un point commun entre eux. Ça peut être n'importe quoi : une salle de sport, un dentiste, le même club de golf, le même opérateur téléphonique... N'importe quoi! Pour l'instant, la seule chose qu'ils aient en commun, c'est qu'ils ont été tués par la même personne. En trouvant pourquoi, on trouvera qui! — Ce sont tous des gens plutôt aisés! Des notables. indiqua le shérif après avoir réfléchi. — Ceux qu'on a trouvé en tout cas. Les corps de ceux-là n'étaient pas dissimulés mais je parierais ma chemise que ses premières victimes n'ont pas eu le même traitement. Ce sont sans doute des proches de notre tueur : de la famille ou des voisins. Allons à votre bureau, nous avons des coups de fil à donner! — Vous ne voulez pas attendre de voir si mes gars trouvent l'accélérateur d'abord? — Je suis presque certain qu'ils ne trouveront rien. Il est venu et reparti avec! Mais vous avez raison, attendons! Inutile de nous jeter sur des fausses pistes en sautant à des conclusions trop rapides. Nous sommes restés bien après que les légistes aient finalement enlevé le corps calciné. — Qui dois-je appeler? demanda le shérif en voyant son dernier homme revenir, les mains vides lui aussi. — Le FBI et vos collègues des comtés voisins. Il faut qu'on sache combien de victimes il y a et si c'est cantonné ici ou si le tueur est du genre mobile. Je vais contacter mes Meneurs pour voir s'il n'y a pas des affaires similaires dans le pays ou ailleurs. — Et s'il est "mobile" comme vous dîtes, comment va-t-on faire pour l'arrêter? — Ça ne va pas vous plaire mais il ne sera jamais jugé par un tribunal humain, vous en êtes conscient? Quand je lui remettrai la main dessus, je le tuerai, il a déjà été condamné. — La seule chose qui me réconforte, c'est qu'il n'aura ni remise de peine, ni liberté conditionnelle comme certains de nos criminels. Mais je regrette qu'il faille en arriver là. Pour les familles. Elles ont le droit de savoir pourquoi il a fait ça, de comprendre pourquoi. soupira-t-il. C'est aussi à ça que sert un procès. — Je comprends, croyez-moi, mais les Renégats sont simplement des bêtes sauvages et enragées. Il n'y a ni raison, ni explications à chercher dans leurs actes. — Mais celui-ci n'est pas un Renégat... — En effet! Si c'est bien un tueur en série, c'est le premier cas connu de notre race. En tout cas, le premier dont j'ai entendu parler. Je vais me renseigner et voir avec les Meneurs pour peut-être, et j'insiste sur le peut-être, mettre un procès en place pour les proches de ses victimes s'il s'avère que j'ai raison au sujet de notre assassin. Ça vous va? — Ouaip! — Bien! Allons-y, on a des téléphones à faire chauffer. — Vu l'heure, ça m'étonnerait qu'on obtienne des réponses ce soir. soupira Wakson en regardant sa montre. — Oui, c'est vrai. On peut faire ça demain matin, si vous préférez. — Oui, demain c'est mieux. Là j'ai juste envie de rentrer chez moi et de me prendre une bière fraîche et de m'abrutir devant la télé. — Je vais me changer et faire un tour par là, histoire de voir si mon loup sent une piste. Je n'y crois pas de trop mais sait-on jamais. — Vous ne vous reposez donc jamais? J'eus la brève vision de jambes serrées autour de ma taille et de deux yeux bleu nuit plongés dans les miens. Elle était la seule chose qui me permettait de souffler un peu, d'oublier quelques instants qui j'étais et toute l'horreur de mon travail. Maria. — Je suis insomniaque. dis-je simplement après avoir chassé son image de ma tête avant de céder la place à mon loup. Le shérif baissa le bras qu'il avait mis instinctivement devant ses yeux pour ne pas être ébloui par le flash de la transformation et poussa un sifflement admiratif. Mon loup blanc était plutôt balèze donc je comprenais parfaitement sa réaction. — Wouah! Jolie bête! On se voit demain matin au poste, Lunari. dit le shérif, un peu troublé en reculant doucement. Mon loup le regarda et hocha la tête puis partit vers l'arrière de la maison. Il tomba sur une faible odeur de chair brûlée mais celle-ci était déjà partiellement dissipée et la légère brise qui soufflait ne nous aidait pas puisqu'elle éparpillait l'odeur dans toutes les directions où elle soufflait. Je me morigénai violemment pour n'avoir pas fait ça dès mon arrivée, j'aurais peut-être eu enfin une piste à suivre. Quel idiot! J'eus beau faire le tour, examinant attentivement la lisière du bois qui bordait l'arrière de la somptueuse maison et par où le tueur était probablement venu et reparti mais rien! Pas la moindre trace ni visuelle, ni olfactive. Comment pouvait-il faire pour ne laisser aucune odeur? Il faudrait que j'aborde ce sujet avec les Meneurs parce que, si consciencieux soit cet assassin, il ne pouvait quand même pas faire disparaitre sa fragrance, surtout sous forme animale! Je finis le tour de la propriété et fus surpris de voir que le shérif était toujours là, sous le porche. Il tentait de réconforter la veuve si j'en jugeais par leur langage corporel. Elle poussa un hurlement strident en apercevant mon loup mais se calma bien vite sous les paroles rassurantes du shérif... Pour pousser un autre cri de frayeur en se cramponnant à ce dernier lorsque deux hommes sortirent de chez elle en tenant un magnifique doberman qui se débattait, grognant et grondant, entre deux lances de métal munies de colliers étrangleurs. Il cherchait à mordre tout ce qui passait à sa portée et je compris mieux ce que le shérif voulait dire en parlant de bête enragée. Le chien écumait littéralement et, lorsqu'il aperçut sa maîtresse, il se désintéressa des hommes de la fourrière pour se précipiter vers elle, les tirant derrière lui. Ses intentions étant clairement hostiles à l'encontre de la femme, mon loup sauta la barrière de bois du porche et fit barrage entre eux. Il poussa un grondement d'avertissement au chien tout en projetant ses ondes de Domination sur lui. L'animal s'affala au sol et se mit à geindre vers moi puis à grogner vers elle avant de couiner à nouveau. Son regard me disait son incompréhension. Pour lui, il ne faisait rien de mal et ne comprenait pas qu'on le punisse. — Et bin! dit l'un des gars de la fourrière au shérif en retirant sa casquette d'une main pour se gratter le crâne. C'est efficace comme méthode, quoi qu'il ait fait! C'est un change-forme? — Oui. C'est le Lunari du secteur. Jackson Butter. — Enchanté Lunari! Si vous avez du temps un de ces quatre, je veux bien que vous fassiez votre magie sur certains corniauds comme celui-ci. Regarde Mitch, il est doux comme un agneau maintenant. ajouta-t-il pour son collègue en montrant le doberman allongé. Je me transformai et regardai l'animal. — N'essayez pas de le caresser! dis-je à l'homme qui venait de m'inviter dans sa tournée. Il est dressé au mordant et à l'attaque! Je jetais un regard sur la femme apeurée derrière moi, elle était blanche comme un linge et tremblante comme une feuille. Si le shérif ne l'avait pas maintenue, elle se serait écroulée par terre. Je sentais même une odeur d'urine provenant d'elle. Elle avait peur de ce chien, une peur telle qu'elle s'était faite dessus quand il avait cherché à l'attaquer. Elle hocha la tête en entendant mon affirmation. Je m'accroupis près de l'animal et serrai doucement sa truffe dans ma main en projetant encore un peu de Dominance vers lui pour lui faire comprendre que c'était moi le chef de meute, pas lui. Il cessa de grogner et remua même son moignon de queue. Je claquai des doigts et il s'assit à côté de moi, sa gueule à hauteur de mon visage sans rien tenter. Je me relevai et accompagnai les hommes jusqu'au camion, le chien me suivant docilement. J'ouvris une des cages vides et lui fis signe de monter, ce qu'il fit sans problème. J'enlevais les colliers étrangleurs de son cou et caressai son museau allongé, le grattant un peu entre les yeux puis derrière les oreilles. — Ne le mettez pas à l'adoption celui-là. Il va falloir le réformer d'abord. Il est obéissant mais il a été dressé à l'attaque! Vous avez de quoi noter? demandai-je aux deux hommes. — Oui monsieur. dit l'un d'eux en sortant un petit carnet. — Appelez ce numéro de ma part demain matin! dis-je en montrant l'écran de mon téléphone. Expliquez-lui pour le chien. Il viendra le récupérer. — C'est qui? — Un Solitaire que je connais et qui sauve d'anciens chiens de combats avec son association. Gardez son numéro, si vous tombez sur des cas similaires, vous saurez qui contacter. Je n'ai pas vraiment le temps de faire des tournées avec vous. dis-je en souriant à celui qui avait proposé ça. Mais lui, c'est son taf, il vous aidera s'il peut! — Merci monsieur. — De rien. Si ça peut vous aider, c'est bien, mais si ça peut sauver un animal qui ne fait qu'obéir aux ordres stupides de son maître, c'est encore mieux. Ce chien ne mérite pas d'être euthanasié. — Il paraît que le juge s'est fait becter les valseuses avant de finir en rôti. Vous croyez que quelqu'un en a donné l'ordre à ce chien? Je regardais les hommes, puis l'animal et tournais les talons sans répondre. — Shérif Wakson! hélais-je mon collègue humain qui raccompagnait la veuve jusqu'à sa porte. — J'arrive! me dit-il avant de parler encore un peu à la femme. — Est-ce que les autres victimes avaient des chiens? lui demandai-je dès qu'il arriva à ma hauteur. — Euh... Je sais pas trop. Je vérifierai ça. Pourquoi? — Parce que je viens de réaliser qu'on n'a peut-être pas à faire avec un change-forme finalement. — Quoi? — C'est peut-être un tueur en série humain qui se sert d'un animal qu'il a dressé ou de l'animal qui appartient à sa victime. Un dresseur peut-être. Je ne suis pas sûr, mais c'est une possibilité. Pour l'instant, on va partir du principe que c'est un change-forme mais n'écartons pas l'hypothèse d'un humain. — Merde alors! dit-il en passant la main sur son visage fatigué. — Allez vous reposer! On vérifiera ça demain matin avant de passer nos coups de téléphone. 8h30, ça vous va? — Ouais, ça me va! Merde alors! répéta-t-il en regardant le fourgon de la fourrière partir. Je crois bien que je vais avoir besoin de quelque chose de plus fort qu'une bière finalement. Je vous invite? — Non merci. Les change-formes boivent rarement de l'alcool, ça leur fait perdre leur contrôle sur leur animal. — Oh! Ok, je comprends. — Mais merci pour la proposition. ajoutai-je. D'habitude, les flics humains, moins ils me voient, mieux ils se portent. — Bah... On enquête ensemble! Et puis, vous n'agissez pas du tout comme je m'y attendais! Pour être honnête, j'ai déjà bossé avec des fédéraux et eux, je les porte pas vraiment dans mon cœur. Ils nous ont pris de haut comme si on était des bouseux incompétents, nous ont virés de l'affaire sans nous informer de son évolution et nous ont traités comme leurs secrétaires personnels. J'avoue que j'ai cru que l'histoire allait se répéter avec vous Lunari. — Appelez-moi, Jack. — John. se présenta-t-il en me serrant la main comme si c'était notre première rencontre. — Et bien, John, ne vous inquiétez pas, je ne suis pas vos fédéraux, moi! — Ouais, j'ai vu. — Rentrons chez nous! Vous avez l'air crevé! — Je le suis! Je ne pense pas me représenter au prochain mandat, j'ai vu trop d'horreurs ces dernières années. Beaucoup trop! J'ai divorcé à cause de mon travail, je vois plus mes gosses... Et je dors de moins en moins. J'ai l'impression d'être au bout du rouleau alors que je n'ai que la quarantaine. me confia-t-il en se dirigeant vers sa voiture de fonction. — Je comprends. — Vraiment? — J'ai une femme dans ma vie... en quelque sorte. Je refuse de m'investir dans notre relation parce que je sais à quel point mon boulot est prenant et difficile à gérer. Je ne veux pas qu'elle tombe sur des dossiers de gens éventrés ou égorgés sur la table de mon salon. Je n'ai même pas 60 ans encore et j'ai vu moi aussi trop d'horreurs pour dormir sereinement. — 60 ans? — 57 pour être précis. Notre espérance de vie est plus longue que la vôtre. Notre vieillissement ralentit avec l'arrivée de la puberté. Si vous tombez sur un change-forme qui ressemble à un cinquantenaire, vous pouvez être sûr qu'il a déjà plus d'un siècle, peut-être même deux. — Wouah! Tu veux que je te dise, Jack, je crois que vous auriez moins de problème avec les suprémacistes si certains des vôtres donnaient des conférences pour parler de ce genre de choses. dit-il en ouvrant sa portière. — On a déjà essayé, ils ont été tués! La plupart des informations concernant ma race que vous pourrez trouver dans vos livres d'histoire viennent de ces gens-là. Ce sont nos Martin Luther-King à nous. lui dis-je en prenant mon casque sur la selle de ma Suzuki. À demain John! — À demain! me salua-t-il en levant sa main dans ma direction tandis que je démarrais ma bécane. ∞
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