VElle dînait ce soir-là seule avec son mari. La table rétrécie ne portait ni la corbeille aux aigles d’or, ni les Victoires ailées. Les torchères n’éclairaient pas, au-dessus des portes, les chiens d’Oudry. Tandis qu’il parlait des choses du jour, elle s’enfonçait dans une rêverie morne. Il lui semblait qu’elle traversait un brouillard, et qu’elle allait, perdue et loin de tout. C’était une souffrance paisible et presque douce. Elle voyait vaguement, à travers les brumes, la petite chambre de la rue Spontini transportée par des anges noirs sur un des sommets de l’Himalaya. Et lui, dans le tremblement d’une espèce de fin du monde, il avait disparu, très simple et mettant ses gants. Elle se tâta le poignet pour voir si elle n’avait pas de fièvre. Brusquement, un choc clair d’argenterie sur l