IVLe long du trottoir, les pauvres vieux allaient machinalement, songeant au dernier malheur qui mettait le comble à leur misère. Une pensée douloureusement persistante les torturait, offrant à leur esprit comme un miroir où toute leur vie était représentée : une longue suite de souffrances et de déceptions, le renouvellement monotone des mêmes efforts, des mêmes échecs, de pareilles infortunes… Ces barques insubmersibles étaient leur seul espoir, leur suprême ressource, toutes les autres se trouvant épuisées. La nourrice, irrégulièrement payée, avait rapporté la veille l’enfant de Lise, que les seins taris de la mère ne pouvaient pas nourrir. Et voilà que l’abandon du bailleur de fonds précipitait la catastrophe, que le refus du ministère la rendait irrémédiable. Demain le brevet non reno