II-2

2875 Words
Il fallait la grande connaissance que j’avais des localités et l’habitude de franchir les passages les plus périlleux pour traverser ainsi tous les obstacles. C’était mon goût. J’avais mainte fois passé dans des endroits où personne n’avait songé à pénétrer. J’arrivai à la frontière à la nuit. Je descendis au premier gîte espagnol, une pauvre cabane, où je dormis jusqu’à la première aube. De ce côté-là, je ne connaissais plus le pays, mais je parlais facilement le patois semi-espagnol de cette région, et, à travers de nouveaux défilés de montagnes, non moins âpres que ceux du versant français, j’arrivai à Panticosa vers le milieu du jour. C’était alors un village de cabanes misérables et dégradées, abrité par des noyers magnifiques. Cette pauvreté d’aspect me donna du courage. On se présente avec plus d’aplomb dans une chaumière que dans un palais. Je demandai la maison d’Antonio Perez, on me montra au revers de la colline une petite construction en bon état, la seule du village, et j’y fus rendu en un instant. Je trouvai le patron à table, servi par une très belle fille qui ne pouvait être que la sienne, et je faillis m’évanouir ; mais le regard attentif et méfiant d’Antonio me donna la force de lutter contre l’émotion. Je présentai ma lettre, Antonio l’ouvrit et la lut comme un homme qui déchiffre péniblement l’écriture. La belle fille qui le servait me contemplait avec tant de sang-froid et de hardiesse, que j’eusse perdu contenance, si je n’eusse pris le parti de me tourner de manière à ne pas rencontrer ses yeux. Je profitai de ce moment de trêve pour examiner son père. C’était un homme trapu, d’une carrure athlétique, ayant les cheveux crépus, de beaux traits, la barbe grisonnante, le teint bronzé, et, je dois l’avouer, une expression de ruse et de férocité qui sentait le brigand plus que le contrebandier. Il me fut antipathique jusqu’à la répugnance, et je regardai sa fille, sans trouble cette fois, résolu à la fuir et à l’oublier, si elle lui ressemblait. Elle ne lui ressemblait pas, elle était pire ; elle avait, à travers sa beauté bien réelle, l’expression d’une naïve impudence. De plus elle était d’une malpropreté insigne. Guéri de ma passion comme par enchantement, honteux, mais délivré de toute angoisse, j’attendis que mon hôte eût fini sa lecture et me sentis plus que jamais décidé à ne pas me faire connaître. Il parut content des nouvelles que je lui apportais. Je le vis sourire, compter sur ses doigts à la dérobée, puis mettre la lettre bien au fond de sa poche, comme un objet que l’on ne veut point perdre. Alors il fit un signe à sa fille qui sortit aussitôt, et, se tournant vers moi : – C’est bien, mon garçon, me dit-il, tu as fait une belle course pour m’apporter cela, tu as bien gagné un verre de mon meilleur vin. Comment t’appelles-tu ? – Médard Tosas, lui répondis-je. – Tu es de Luz ? – Des environs. – Et qu’est-ce que tu fais ? – Je chasse l’ours. – Alors tu es aussi brave et adroit que beau garçon. Allons, bois à ma santé comme je bois à la tienne ! Manuela était rentrée avec un broc de vin liquoreux qu’elle versait dans un verre bleuâtre mal rincé. Pendant que j’avalais ce vin, le Perez me regardait avec malice, et, prenant un ton de familiarité protectrice qui me fit rougir de dégoût : – J’espère, canaille, me dit-il, en souriant, que tu n’es pas contrebandier ? Je le regardai entre les deux yeux. L’expression de son visage disait clairement : « Si tu es contrebandier, mon garçon, sois le bienvenu et dis-le sans crainte. » – Non, je ne suis pas contrebandier, lui répondis-je en me levant, et je ne compte pas l’être. – Tu as raison, reprit-il avec une merveilleuse tranquillité ; c’est un sale métier, – et plus dangereux que la chasse à l’ours, ajouta-t-il avec une imperceptible nuance de mépris. – Ce n’est pas le danger que je crains. Je n’ai pas l’habitude de craindre. Je n’ai pas dit que la contrebande fût un sale métier. Je dis que j’ai un autre état et que je m’y tiens, voilà tout, et là-dessus je vous salue, ainsi que la señora, à moins que vous n’ayez à répondre à la lettre que je vous ai remise. – Tu diras à Jean Bielsa que tout est bien ; mais tu dois être fatigué. Ne veux-tu point manger, te reposer, au besoin dormir sous mon toit ? Tout ici est à ta disposition. – Non, répondis-je, j’ai affaire ailleurs. Je vous remercie. Et je partis d’un bon pas, bien que je fusse brisé de fatigue ; j’allai dîner dans une bourgade voisine ; j’y dormis deux heures, et, le soir, j’avais franchi le port de Boucharo, j’allais passer la nuit à Gavarnie. Le lendemain, léger comme un oiseau, je descendais le gave par un bon chemin, et je rentrais le soir à la maison, l’oreille un peu basse, mais le cœur content et l’imagination délivrée. Comme depuis longtemps j’étais triste et bizarre, ma mère vit bientôt que j’étais guéri, et, sans savoir ni la cause de mon mal, ni celle de ma guérison, elle se réjouit et me fit fête. Je prétendis que des crampes d’estomac, auxquelles j’étais sujet depuis un an, s’étaient tout à coup et tout à fait dissipées. Il y avait du vrai dans mon explication. Quelques jours plus tard, je me retrouvai avec Jeanne sur le banc du jardin, attendant l’heure du souper. J’étais gai et je m’amusais avec un petit oiseau qu’elle élevait. – Tu es redevenu aimable, à la fin, me dit-elle ; tu n’es donc plus amoureux ? – Est-ce que tu sais ce que c’est que d’être amoureux ? lui répondis-je. Tu n’en sais rien et tu parles au hasard. – Je sais très bien, reprit-elle, que l’amour, c’est de penser toujours à une personne que l’on préfère à toutes les autres. – Tes religieuses t’ont appris cela ? – Non, mais des compagnes me l’ont dit. – Mais tu méprises cela, toi qui ne veux pas te marier ? – Je ne sais pas ! Voilà que j’ai quatorze ans, c’est l’âge de se décider. – Oh ! tu as le temps encore. – Écoute, si tu voulais me promettre de ne pas te marier, je ferais de même. – Pourquoi ? qu’est-ce que cela te fait que je me marie ? – J’ai besoin d’aimer quelqu’un. – Vraiment ! – Et je t’aimerais, si tu n’aimais que moi. – Alors tu es d’un caractère jaloux ? – Très jaloux. – Même avec ton frère ? – Surtout avec mon frère. – On te donne au couvent de bien fausses et sottes notions ! Une sœur ne peut pas être jalouse de son frère…, et d’ailleurs tu ne m’aimes pas tant que ça. – Je t’aime passionnément. Elle disait cela d’un ton si tranquille et avec une si parfaite candeur, que je ne pus me défendre d’en rire. – Et ton oiseau, lui dis-je, tu l’aimes passionnément aussi ? – Non, je ne puis avoir de passion que pour toi. L’amour est une chose folle et coupable quand ce n’est pas une chose légitime et sainte. L’amour qu’on a pour ses parents est pur et méritoire. Je puis donc t’aimer de toute mon âme sans mécontenter Dieu, et c’est ainsi que je t’aime ; mais toi, qui es de la mauvaise religion, on ne t’a pas appris cela, et tu m’aimes fort peu. – Je t’aime très tendrement au contraire. – Mais pas de toute ton âme ? – J’en dois une bonne partie à nos père et mère, s’il te plaît ! – Je te permets cela, mais je ne veux pas d’autre partage. – Tu veux que je ne me marie point ? – Non, je ne le veux pas, je te le défends ! J’en mourrais de chagrin. – N’en meurs pas, je n’ai jamais eu moins envie de me marier qu’à présent. Jusqu’à ce que l’idée m’en vienne, tu as le temps de devenir une personne raisonnable et de comprendre ce que c’est que la vie sur laquelle tu n’as, je le vois, que des idées bizarres. À mon avis, on t’élève bien mal chez les nonnes, et tu ferais mieux de rester chez ta mère toute l’année. – J’y resterai. – Cela a été décidé ? tant mieux ! – C’est moi qui le décide à l’instant même, puisque tu le désires. – Tu te moques de moi quand je te parle raison ! Elle fondit en larmes, et je n’en pus obtenir un mot de plus. Je la trouvais incompréhensible et m’alarmais un peu de la voir si fantasque. Était-ce un cœur agité par le doute ou une raison troublée par le mysticisme ? Je crus devoir en parler à ma mère, et je fus surpris de ne pas la voir plus tourmentée. – Jeanne est comme cela, me dit-elle, très singulière et toujours à côté du réel, bien qu’elle soit foncièrement bonne et sincère. Tu ne la connaissais pas ; depuis quelques années, vous n’êtes guère ensemble, tu l’observes, et tu commences à t’étonner. Ne t’en inquiète pas et sois toujours très bon pour elle ; c’est une nature qu’on ne persuade pas, mais qu’on vaincra toujours par la tendresse. On ne l’amène point à la faire penser comme l’on pense soi-même, mais l’affection l’amènera toujours à agir comme l’on veut. – Pourquoi donc alors lui as-tu laissé embrasser le catholicisme ? – J’avais promis qu’il en serait ainsi. – À qui avais-tu promis cela ? À mon père ? Il y tient si peu ! – Est-ce un reproche que tu me fais ? Je ne le mérite point. – Mais voilà des voyageurs, va vite au-devant d’eux. Nous étions ainsi interrompus à chaque instant, car mon père avait prédit juste. La vogue venait aux bains de Saint-Sauveur, et notre petit établissement avait l’air de prospérer. Pourtant, moi qui faisais les acquisitions et qui réglais les comptes, je m’étonnais de la disproportion qui s’établissait en somme entre la cherté des denrées et le bon marché de nos ventes. Mon père disait qu’il fallait agir ainsi et savoir perdre au commencement pour accaparer la clientèle et gagner plus tard. Plus tard, j’ai su que notre auberge n’était alors qu’un prétexte pour nous donner l’air de nous enrichir par le travail, et que la véritable prospérité ne nous venait que de la contrebande à laquelle mon père se livrait activement sous nos yeux, sans sortir de chez lui et sans qu’il nous fût possible de savoir quelles gens travaillaient de concert avec lui. Le fameux Antonio Perez ne paraissait jamais, et pourtant la correspondance était active entre eux. Délivré de l’obsession amoureuse que j’avais subie, je travaillai mieux que je n’avais encore fait, et l’année suivante (1840), je terminai mes études et passai bachelier. Comme je revenais chez nous avec mon diplôme et l’espoir de commencer la médecine, je trouvai ma sœur installée à la maison. Elle avait quitté le couvent définitivement, et, me prenant à part, elle me dit avec son ton calme : – Je t’avais promis de me remettre sous la tutelle de maman. Si je ne t’ai pas tenu parole tout de suite, ce n’est pas ma faute, c’est maman qui a voulu que je fisse mes réflexions avant de renoncer à mes idées. À présent nous voilà d’accord, je ne veux plus être religieuse. Je ne quitterai plus ma famille, j’étudierai chez nous. Es-tu content ? – Enchanté, lui dis-je en l’embrassant, car je pense que tu es maintenant et seras toujours aussi sensée que tu es belle et bonne. Elle rougit en répondant qu’elle n’était pas belle. – Ma foi si, repris-je. Pour une sainte comme toi, il n’y a pas à en rougir. C’est Dieu qui t’a donné la beauté ; certainement il aime le beau, puisqu’il l’a répandu à pleines mains sur l’univers. Elle rougit encore plus et alla se cacher comme si le compliment d’un frère l’eût scandalisée ou effrayée. Je ne la jugeai pas encore devenue très sensée. Mon père était alors à la maison ; mes vacances commençaient ; nous ne devions pas aller à la montagne cette année-là. Il avait trouvé à louer son auberge pour la saison moyennant un très beau prix ; nous en eûmes du regret. – Nous y retournerons l’an prochain, nous dit-il. J’étais connu et aimé là-bas pour le bon marché de mes fournitures. J’ai réussi à avoir la préférence sur tous les autres petits restaurants de la campagne. À présent, la maison est achalandée, mais je ne puis moi-même, du jour au lendemain, doubler mes prix. C’est l’affaire de celui qui me remplace. On criera contre lui, on me verra avec joie reprendre ma fonction l’an prochain : mais le pli sera pris. On payera ce qu’on doit payer pour que nos affaires marchent à souhait. Pourtant, comme elles ne marchent point trop mal, je ne veux pas vous priver devoir du pays pendant vos vacances. Je vais vous conduire à Bordeaux, où je connais du monde. C’est une belle ville. Je n’avais jamais vu la mer. L’idée d’aller jusqu’à l’Océan me transporta de joie. Ma sœur sourit mollement en disant qu’elle était contente aussi. Ma mère ne fit pas d’objection, et nous partîmes. Aussitôt notre arrivée, ma mère conduisit Jeanne dans les magasins de nouveautés et lui acheta une très jolie toilette, qu’elle endossa avec un peu d’hésitation et de crainte. Chez ses religieuses, elle avait un petit costume d’uniforme qu’elle n’avait pas encore voulu quitter. Je dus lui dire qu’elle était ridicule ainsi. J’avais sur elle non pas de l’influence, – comme avait très bien dit ma mère, on ne la persuadait point, – mais j’avais une singulière autorité. Il suffisait d’un mot pour qu’elle fît à l’instant même ce que je souhaitais. Quand je la vis habillée comme il convenait à son âge et à sa position, je fus frappé de sa grâce et de la distinction de sa personne, et, comme elle voulait toujours être pondue à mon bras, je vis, en parcourant la ville avec elle et ma mère, que tout le monde la remarquait et l’admirait. Ma mère connaissait très bien Bordeaux et les environs : aussi mon père, après nous avoir installés dans un hôtel très agréable, s’occupa-t-il fort peu de nous. Il semblait qu’il se fût établi sur le port comme sur son domaine. Nous n’y passions jamais sans l’y rencontrer, causant avec des armateurs ou des capitaines de navires marchands, quelquefois avec des hommes à figures problématiques. Il paraissait fort occupé, ne s’expliquant jamais sur la nature de ses opérations, mais toujours content et plein de confiance. Son humeur égale le rendait agréable à tout le monde ; il était le type de la bienveillance, malgré son ton brusque et sa physionomie accentuée. Je n’ai pas à raconter ici notre excursion à la mer, notre surprise devant tant d’objets nouveaux, ma joie de voir un grand théâtre et d’entendre des artistes d’un certain mérite. Ma sœur hésita beaucoup à partager cet amusement profane. Je l’y décidai, elle fut très attentive ; mais je ne pus savoir si elle y éprouvait du plaisir ou de la frayeur. Il y avait certainement en elle quelque chose de mystérieux qu’il ne fallait pas froisser par trop de questions. Nous avions tout vu et nous étions à la veille de retourner chez nous lorsque, me trouvant seul sur le port avec mon père, je vis venir à nous un homme d’une figure non pas vulgaire, mais inquiétante, que je ne reconnus pas tout de suite. Dès qu’il fut à deux pas de nous, je m’éloignai, ne voulant pas être reconnu moi-même ; c’était le fameux contrebandier Antonio Perez. Comme j’avais beaucoup changé depuis deux ans et que mon costume différait autant que le sien de celui sous lequel il m’avait vu, il ne fit point attention à moi et s’entretint vivement à l’écart avec mon père. Il y avait là tout près un beau steamer en partance pour l’Espagne, et je vis que Perez se disposait à y prendre passage. Mon père paraissait lui faire beaucoup de questions et de recommandations. Ils furent interrompus par l’arrivée de deux femmes : l’une de moyenne taille, voilée à l’espagnole d’une mantille rabattue jusqu’à la lèvre supérieure, charmante de tournure et jouant de l’éventail avec une grâce adorable ; – l’autre grande, forte, belle, mais vulgaire, vêtue en fille de chambre et portant des paquets. Celle-ci, que je reconnus à l’instant même, c’était la Manuela que j’avais vue à Panticosa ; mais l’autre, qui était-elle ? Perez prit le bras de la personne voilée et monta avec elle sur le bâtiment ; l’autre suivit. Mon père les accompagna jusqu’à la passerelle, salua la première, fit un signe d’adieu familier à la seconde, serra la main de Perez et revint vers moi. – Qui donc sont ces gens-là ? lui dis-je. Et, pour motiver ma curiosité insolite, j’ajoutai que je croyais les avoir vus quelque part. – Tu te trompes, répondit mon père, tu ne les connais pas. C’est mon ami et associé Antonio Perez avec sa fille Manuela. – Laquelle ? – Peux-tu le demander ? Celle qui est jolie et porte la mantille. L’autre n’est que la servante. – Cette servante-là a l’air bien effronté, répondis-je pour dire quelque chose qui ne laissât pas tomber la conversation. – Ah ! dame, reprit mon père en souriant, elle est un peu gâtée ! Maître Perez est… c’est-à-dire il n’est pas comme ton père. Il est veuf, pas bien recherché dans ses goûts, et cette montagnarde… Mais à qui diable as-tu donné ton attention ? C’est la Manuela que tu aurais dû regarder ; c’est celle-là qui est jolie et bien élevée ! – Je n’ai pu voir que son menton. – Pourquoi diable t’es-tu sauvé ? – Par discrétion. Je ne suis pas au courant de tes affaires. – C’est bien, mais j’aurais aimé à te présenter à elle et à son père ! Tiens ! le vapeur n’a pas sonné son dernier coup. Montons à bord ! Je refusai. Perez m’eût sans doute reconnu, et j’eusse été fort embarrassé d’expliquer mon escapade de l’année précédente. C’était un hasard que rien ne l’eût trahie, et puis j’avais grand-peur de retomber dans ma folie. Le nom et le fantôme de cette Manuela m’avaient tant troublé ! Pour la voir, j’avais fait trente lieues à travers les glaciers, les torrents et les abîmes ; elle était là, je n’avais qu’un pas à faire pour la connaître, je n’osais plus. Il faut dire aussi que le Perez, cet homme qui voyageait impudemment avec sa fille et sa concubine, me devenait de plus en plus odieux. – Où donc vont-ils ainsi ? demandai-je à mon père d’un air d’indifférence. – Ils vont faire un voyage d’agrément et de santé, me répondit-il : je crois qu’ils comptent faire le tour de l’Espagne et qu’ils reviendront par Gibraltar, à moins qu’ils ne s’arrêtent quelque temps à Cadix. Je ne sais, ils sont riches, ils font ce qui leur plaît. – Grand bien leur fasse ! pensai-je. Il me tardait qu’ils fussent partis, et pourtant je ne m’éloignais pas. Mes regards étaient comme rivés à la dunette de ce steamer où j’avais vu entrer les deux femmes. Enfin le dernier signal fut donné, et, comme le bâtiment commençait à agiter ses roues, je vis le Perez saluer mon père, et sa fille accourir sur le pont pour lui dire aussi adieu avec la main. Elle avait relevé son voile, elle me parut belle comme un ange ; mais le vent rabattait sur elle la fumée du steamer, un nuage l’enveloppa, je ne la vis plus que comme une ombre légère, bientôt elle disparut ; je ne conservai de ses traits qu’une très vive impression et aucun souvenir assez net pour que je pusse évoquer son image dans mes rêves.
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