Papa, Maman,
J'ai décidé de vous écrire à tous les deux aujourd'hui. Je déposerai une lettre près de la boîte aux lettres de papa, puis, je réécrirai les mêmes mots dans la lettre de maman et la laisserai là où j'ai laissé l'ancienne ; entre les mains du Père André. Je lui ai prié de chérir ses vers comme s'ils étaient une confession. Je le vois quelque part aujourd'hui, comme un membre de la famille. Certes, nous n'avons aucun lien de sang, mais je suis sûre que maman voyait en lui une copie du père qui lui avait été retirée. Ou plutôt, une excuse de la vie pour avoir fait d'elle une orpheline si tôt.
En soi, la vie n'a pas à s'excuser auprès de nous. Nous excusons nous des maux que nous causons à la terre ?
Il saura où les cacher, et le jour où il ne sera plus là, j'en ai la certitude, ces lettres continueront de vivre et referont leur chemin possiblement jusqu'à mes enfants. Qu'ils me connaissent mieux au cas où, je manque de leur apprendre qui je suis et qui j'ai été.
Parce que oui, j'en ai bien conscience, chers parents, nous sommes tous imparfaits. Et même si je donne le meilleur de moi, il y aura hypothétiquement des choses que je ne saurai pas faire. Des sujets que je ne saurai pas aborder, des questions que mes enfants me poseront auxquelles je n'aurai pas de réponses et tant d'autres.
Regardons donc l'histoire de Jacob. Béni soit le Seigneur de toujours tourner toutes mauvaises situations au bien de ceux qui croient en Son nom. Néanmoins, quelque part, Jacob a montré à ses enfants, l'amour profond qu'il avait plus pour ses derniers que le reste. Je ne sais pas comment se sentent les enfants dans ce genre de situations, mais je présume que cela doit être horrible.
Bien sûr, cela ne justifie pas le péché ignoble commis par les frères de Joseph, mais c'est pour te montrer comment Dieu ne cache pas les imperfections de ceux qu'il a choisis, combien, eux aussi, étaient imparfaits.
Il s'en sert afin de montrer sa gloire.
Que son nom soit glorifié.
Il n'y a d'ailleurs pas que Jacob qui a eu une histoire troublante avec ses enfants. Regardons donc Abraham et Sarah. Cette dernière avait douté du Seigneur et avait en conséquence poussé sa servante à avoir un enfant avec Abraham. Bien que je comprenne en tant que femme sa détresse, regarde vers quelles disputes sa décision l'avait mené plus tard.
Tout cela, maman, papa, pour vous dire que même les plus grands prophètes ne sont pas parfaits. Seulement, Dieu nous dit ce que l'on peut être et ce que l'on est. Par l'histoire de Job, on comprend que l'obéissance est la clef d'une relation en harmonie avec Dieu. Avec l'histoire du roi David, on apprend que la sincérité est une route vers le cœur du Seigneur. Par l'histoire de Josué, on apprend que le courage nous montre réellement la force qui sommeille en nous.
Ainsi, je n'aimerais point prendre ma chair comme une excuse pour ne pas être excellente. Je vais donner le meilleur de moi, et lire même des livres s'il le faut pour que mes enfants n'héritent pas de mes blessures.
Cette malédiction générationnelle s'arrête ici.
Que le Seigneur ne me permette pas de me venger sur mes enfants. Oh non, qu'ils ne boivent pas l'eau sale que j'ai bu. Non, qu'ils soient élevés par quelqu'un de nouveau. Celle que l'esprit est en train de faire de moi.
J'ai vu au cours de mon adolescence tant de lycéens devenir des géniteurs, des procréateurs. On le crie haut et fort : les enfants sont des bénédictions. Mais en réalité, si nous prenons le temps de nous asseoir dans le silence, nous réaliserons qu'avoir de quoi manger, de quoi boire sont des bénédictions aussi. Respirer, pouvoir marcher, rire, parler, avoir les gens que l'on aime à nos côtés, sont également des bénédictions.
Et il faut malheureusement souvent que des drames nous arrivent pour que l'on s'en rende compte ; que l'on aurait dû mieux chérir un défunt, que les fleurs auraient pu être achetées plus tôt, afin de décorer sa maison plutôt que pour décorer un cercueil.
La raison pour laquelle je rappelle qu'il n'y a pas que le fait d'enfanter qui est une bénédiction, c'est pour montrer notre immense appétit. Notre gloutonnerie.
Dans le tourbillon d'émotions qui entoure la vie humaine, on omet de se contrôler. Pourtant, la bible certifie que l'esprit saint nous donne un esprit de maitrise de soi. On met au monde un enfant alors que nous ne sommes ni assez matures, ni assez responsables. Ni assez matures et responsables, que ce soit sur le plan financier, spirituel, émotionnel, sentimental, éthique, social ou même encore moral. Puis, les enfants naissent alors même que les blessures de notre passé ne sont pas encore mortes.
Ces blessures assassinent plus tard la joie de nos enfants et nous permettons à l'ennemi donc d'utiliser nos faiblesses contre nous.
Tout cela, parce que nous sommes pressés d'avoir certaines choses et estimons ne pas pouvoir attendre le moment que Dieu a trouvé propice.
J'ai appris que mettre un enfant au monde ne signifie pas forcément être un parent. Ça, ça s'apprend. Mais nous les hommes avons du mal à avouer que nous ne savons pas faire et avons besoin d'aide pour apprendre.
Je ne veux pas que mes enfants passent par ce que j'ai vécu. Ils auront déjà leur propre désert à parcourir pour découvrir leur mission sur terre. Alors pour en rajouter une couche ?
J'ai une nouvelle aussi à vous annoncer ; je suis amoureuse.
Ça doit vous faire étrange, je sais. J'ai passé ma vie à détester l'amour, à renier le sentiment amoureux et voilà que Dieu m'a donné mille et une raisons d'aimer.
Il s'appelle Julien et fait partir des missionnaires qui ont été envoyés depuis l'étranger pour venir aider l'église.
Je prends mon temps et observe comment il sert Dieu, puis je prie que Dieu me révèle s'il pourrait être un époux potentiel.
Je prie de faire correctement les choses. Pas forcément de manière parfaite, mais de manière correcte. De suivre au mieux que je le peux la volonté de Dieu.
Un jour, lorsque j'aurai un mari et des enfants, je les emmènerai à vous, promis. Je leur raconterai notre histoire. Pas avec dégoût, mais avec fierté pour leur montrer qu'on n'a pas à avoir honte de nos blessures. Et pour montrer la bonté de Dieu.
Aussi, mon association va très bien. Dieu mène des personnes de bons cœurs vers nous et ils font des dons de mains d'œuvres et financiers. Je suis époustouflée de voir que certaines personnes comprennent que ce n'est pas parce qu'on n'a pas d'argent à offrir qu'on n'a rien. Le cœur et la main peuvent faire bien plus de choses que l'argent ne le pourra jamais. Chacun a ses limites et ses aptitudes. On n'est pas toujours obligé d'opérer dans le même secteur.
Nous avons un jardinier bénévole qui fait pousser des fleurs dans le jardin de notre abri pour les veuves et orphelins. Les femmes y marchent entre les fleurs colorées pendant des heures. Et on a l'impression que l'odeur et la vue arc-en-ciel les font sourire.
Des personnes envoient également des bouquins pour les enfants ; dont des bibles et des b****s dessinées. Certaines personnes se donnent à cœur joie pour aider à refaire des travaux gratuitement comme la peinture et les problèmes de plomberie.
Je sais que ce ne sera pas toujours comme ça. Il y aura peut-être des moments d'épreuves où les personnes aidantes tomberont malades et où les caisses ne seront pas assez pleines pour vivre dans l'abondance. Mais une chose est certaine, jamais Dieu ne nous laissera manquer du nécessaire pour vivre. Jamais il ne nous abonnera.
La prochaine fois qu'il pleuvra, je rirais. Car, enfin, la pluie n'est plus pour moi signe de mauvais temps ou de tristesse. Je passerai ma main à l'extérieur, et les gouttes caressant le caramel de ma peau se mueront en une valse sur la piste de danse d'un bal. Chaque goutte sera une note de musique, légère et délicate, orchestrant une symphonie au creux de mon être. Une louange à Dieu, une adoration, un chant de joie, Le remerciant pour qui Il est et pour ce qu'Il fait.
Je vous écris bientôt par la grâce de Dieu.
Liz.