Chapitre premier-1

552 Words
Chapitre premier Gio D’abord la brûlure. Puis le sang qui suintait entre mes doigts. Et toujours la voix de Paolo qui prononçait mon prénom d’un ton rauque par-dessus les coups de feu. « Gio, non ! » « Gio est touché ! » C’était l’horreur de perdre quelqu’un qui résonnait dans sa voix, faisant tambouriner mon cœur. Pas la douleur. Pas ma propre peur de la mort. Je ne pensais pas à mon décès en cet instant. Je n’y avais pas pensé quand ça s’était passé, et je n’y pensais pas durant les cauchemars qui m’assaillaient chaque nuit. Et toujours cette fille. Elle se trouvait dans chaque rediffusion nocturne. Parfois, elle se faisait tirer dessus aussi. C’étaient les pires. Mon incapacité à la sauver, à la protéger de la violence me donnait envie de mourir sur place. D’autres fois, elle courait vers moi, après que je m’étais fait tirer dessus. Elle passait ses bras autour de moi et nous tombions tous les deux. Ses grands yeux bleu turquoise se soudaient toujours aux miens à l’instant où le premier flingue tirait. Je voyais la terreur les emplir alors que la balle me transperçait le ventre. C’était cet instant précis qui la retenait dans mes rêves. Durant cette fraction de seconde, dans ce créneau où j’étais sûr que j’allais mourir, c’était son visage que je voyais. Mes peurs concernaient sa sécurité, et mon supplice à l’idée de m’être fait descendre venait de ce que je ne pouvais pas la protéger. Dans son regard, j’aurais juré voir toutes mes émotions se refléter. Elle aussi pensait que j’allais mourir, et son supplice venait de ce qu’elle ne m’avait pas averti à temps. Parce qu’elle avait essayé. Je me souvenais de chaque milliseconde de cette partie-là. Les cinq respirations avant que je ne fasse trouer la peau. Je me souvenais de la manière dont elle avait essayé de me faire signe avec les yeux. La manière dont elle avait refusé de partir et de se mettre en sécurité, même si elle devait savoir que son café était sur le point d’exploser en morceaux de verre et de bois sous les balles et le sang. Elle était comme un ange dans ces rêves… son visage pâle était le phare qui me guidait pour comprendre ma propre mort. Seulement, je ne mourais pas. Je n’étais pas mort. Et on aurait pu croire que tout serait devenu clair comme de l’eau de roche, après cette expérience de mort imminente. C’était censé vous aider à vous rendre compte de ce que vous regrettiez, de ce que vous désiriez. Puis, vous aviez une seconde chance de faire honneur à cette vie. Mais à la place, j’étais piégé dans un brouillard provoqué par les cauchemars, essayant d’en comprendre la signification pendant que je faisais semblant de vivre. La fille du Caffè Milano n’avait pas les réponses… Je ne savais pas pourquoi ni comment mon inconscient lui avait attribué autant d’importance. Elle s’était simplement retrouvée au milieu d’une situation qui avait mal tourné entre la bratva russe et notre équipe. Et pourtant, je ne pouvais pas me la sortir de la tête. Mon ange de la mort. Enfin, de la mort imminente. Marissa. Une fille innocente que je n’avais aucun droit de salir. Une fille qui en avait déjà trop vu. Un point faible.
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