Chapitre 1 : La Découverte

924 Words
14 Février, Cher Journal, Je m'appelle Abigail, mais tu peux aussi m'appeler Abi. Cela me fait un peu drôle de te parler, car aux yeux du monde, tu n'es qu'un bout de papier. Or moi, j'arrive à entendre ton cœur battre à chaque fois que mon stylo effleure tes lignes. Il est vingt-trois heures au moment où je t'écris et je me suis réveillée tôt pour faire la vaisselle et nettoyer la maison. À cinq heures environ. Je suis épuisée, mais la fatigue n'a point réussi à tuer l'excitation de me confier à toi ; mon nouvel ami. À l'aube, le silence dans les couloirs me rappelait étrangement les poids portés en cours de sport à l'école. Oui, ce silence était lourd et je n'avais aucun autre choix que de le porter et de trouver la force de le jeter. Contrairement à un poids en cours de sport qui ne dure que quelques secondes dans la paume d'une main, le poids sur mes épaules a duré pendant des heures. En fait, je le ressens même encore. Et je crains qu'il ne restera avec moi encore très longtemps. Il fut un temps pourtant, cette maison était comme un parc pour les papillons. Elle vivait et le bonheur se faisait ressentir à chaque chambranle de la maison. Il suffit toujours d'un drame pour que le monde s'écroule. Le monde  ? Que dis-je ? Les âmes de ceux qui sont touchés par le fléau. Le monde lui est là, il continue de tourner dans le vide et de danser. Il le fera jusqu'à ce que Dieu décide qu'il en soit autrement. Dieu. Dieu. Dieu. Dis-moi, toi, révèle-moi donc quelque chose. Je le sais que tu es un journal intime et que ta mission principale est d'écouter, mais dis-moi, lorsque les hommes affirment : >, pourquoi penses-tu, dis-moi, qu'il donne si ce n'est que pour reprendre par la suite  ? Oh, je sais... une seule réponse ne pourrait pas suffire, car, un père ne se hâte pas d'arracher à son enfant un cadeau qu'il lui a offert. N'est-ce pas  ? Je te parle de cela parce que, c'est la même phrase qu'avait dite ma grand-mère après le décès de ma mère. > Malheureusement, après cette période, il n'y a plus eu aucune mention de Dieu autour de moi. Mes grand-parents repartirent au village et papa qui déjà ne croyait pas en Dieu, m'avait averti que > Et que dire... cela ne m'affectait pas plus que ça à cet instant. De toute façon, j'étais déjà fâchée et en colère contre tout le monde moi aussi. Dieu y compris. Après avoir astiqué les carreaux de la maison et fait le petit déjeuner ce matin, je mangeais dans la cuisine puis fit le déjeuner et le diner. Je fis la table à midi pour papa et son épouse, ensuite tout le monde fit une sieste et en après midi, alors que je sortais de la maison pour aller dans la cour, une voix tremblante m'interpella. Tante Béatrice, la femme de papa, donnait l'impression de pleurer, je me tournais donc, mais réalisais très vite que c'étaient des larmes de joie. Ses yeux brillaient comme une étoile venant de matérialiser le rêve d'un enfant ; se remplissant de tant d'excitation et de fierté. Elle tenait un bouquet de fleurs dans les mains que papa lui avait surement offertes. Elle avait des larmes de joie aux yeux. Un peu comme maman bien des années avant son décès. Je n'aurais d'ailleurs jamais pensé que papa aurait pu aimer une autre femme. À cause de cette trahison, je hais les hommes. Il ne m'avait jamais expliqué pourquoi non plus. Pourquoi est-ce que la vie devait continuer même si celle de maman s'était brusquement arrêté. Il ne m'avait jamais expliqué pourquoi le vent devait continuer de passer devant notre porte, alors qu'il avait volé le souffle de maman pour devenir plus fort. Il n'avait pu rien faire d'autre, que de faire comme si de rien était. Tante Béatrice a appelé mon nom en voyant que je la regardais haineusement. Puis, elle m'a ordonné de prendre de l'argent dans son sac et d'aller au marché faire des courses. J'y suis donc partie lorsqu'en chemin, mes yeux tombèrent sur toi. Tu étais près de la poubelle publique au carrefour. Ta couleur violette et tes poils doux m'ont fait courir à toi, malgré l'odeur nauséabonde qui entourait les lieux. Je t'ai ramassé, ressentant par la même occasion les éclats de mon cœur être à moitié recollé. Le cadenas sur ton côté était cassé et les premières pages de ton cœur arraché. À cet instant, je me suis reconnu en toi et je me suis demandé, à qui avais-tu appartenu ? Qui avait avec autant de violence arracher les récits de sa vie, puis, jeté le journal qui l'avait servi de confident ? Tu étais comme moi, abandonné et rejeté, n'attirant les regards de personnes à cause de tes blessures et à cause de l'odeur qui ne voulait pas te laisser partir. Oui, moi aussi, je pue. Mon âme empeste. Je t'ai ainsi serré dans mes bras jusqu'à finir de faire les courses au marché, puis je suis rentrée. Avant de franchir la porte de la maison, je t'ai caché, te coinçant entre mon jeans et ma peau sous mon tee-shirt. Je ne désirais pas que quelqu'un de la maison te voit et t'arrache de mes bras.
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