La distance nécessaire

1129 Words
Je savais que c'était la meilleure chose à faire. Prendre de la distance avec Peter. Mais ce n'était pas aussi simple que ça en avait l'air. Chaque fois que je le croisais dans les couloirs de l'université, que je sentais son regard se poser sur moi, un tourbillon d'émotions me traversait. Nous n'étions rien d'autre que des camarades, pourtant, il y avait ce lien, cette alchimie inexplicable qui flottait entre nous. Mais il fallait que je me ressaisisse. Peter était avec Kéllia, et Kéllia était une petite amie très jalouse et possessive. Elle ne supportait pas de nous voir parler, ni même de nous voir nous regarder. Kéllia était la reine de l'université, et tout le monde le savait. Sa présence imposante, son charisme naturel, et sa richesse faisaient d'elle une figure incontournable. Elle faisait partie de ces enfants gâtés, nés avec une cuillère en argent dans la bouche, pour qui tout semblait facile. Il lui suffisait de demander pour recevoir, de tendre la main pour obtenir ce qu'elle voulait. Rien n'était hors de portée pour elle. Contrairement à moi, qui devait travailler d'arrache-pied pour chaque opportunité, chaque succès. Là où je m'éreintais pour gravir les échelons, Kéllia n'avait qu'à esquisser un sourire pour qu'on lui déroule le tapis rouge. Cela dit, je ne pouvais pas nier que, pour en arriver là où ils en étaient aujourd'hui, ses parents avaient dû travailler dur. Ils avaient construit leur empire à la force de leurs sacrifices, de leur ambition. Je respectais ce parcours, cette détermination. Mais Kéllia, elle, n'avait rien connu de ces épreuves. Elle n'avait jamais eu à lutter pour obtenir ce qu'elle voulait. Elle n'avait pas la moindre idée de ce que c'était que de se battre pour ses rêves, de se lever chaque jour avec la peur de ne pas être à la hauteur, de devoir jongler entre les études et le travail pour boucler les fins de mois. Pour elle, la vie était un terrain de jeu où elle fixait les règles, et où personne n'osait lui dire non. J'avais vu la façon dont Peter regardait Kéllia, et même si elle était possessive, il semblait l'accepter, comme si c'était la norme pour lui. Peut-être qu'il y avait de l'amour entre eux, peut-être pas. Mais qui étais-je pour juger ou pour intervenir ? Je ne voulais pas être celle qui sème la discorde, celle qui brise un couple. Ce n'était pas ce que je voulais. Je ne voulais pas être cette personne. Chaque fois que je pensais à ce qui s'était passé dans les toilettes, à la gifle de Kéllia et à ses menaces, je me rappelais pourquoi il était nécessaire de prendre du recul. Ce n'était pas seulement pour moi, mais aussi pour eux. Leur relation n'avait pas besoin d'un élément perturbateur comme moi. Si Peter et Kéllia devaient se séparer, ce serait à cause de leurs propres problèmes, pas à cause de moi. Et puis, j'avais d'autres préoccupations bien plus importantes. Je venais à peine de commencer ma première année à l'EPFL, et les défis académiques étaient déjà écrasants. Je devais me concentrer sur mes études, sur mes rêves. J'avais choisi de poursuivre un Bachelor en Génie Mécanique, un parcours exigeant qui me mènerait ensuite à un Master en Énergies Renouvelables et Systèmes de Production. Mon objectif était clair : me spécialiser dans les énergies renouvelables pour apporter des solutions durables et innovantes. Je voulais combiner mes compétences techniques en ingénierie avec ma passion pour l'environnement. C'était une longue route, cinq ans d'études intenses avant d'obtenir mon diplôme. Cinq ans de travail acharné, de nuits blanches, de sacrifices. Je ne pouvais pas me permettre de perdre de vue mes objectifs à cause de sentiments confus et de situations compliquées. Je devais rester concentrée, garder la tête froide. Je décidais alors de m'éloigner de Peter, de mettre de la distance entre nous. Je n'allais plus aller aux mêmes événements que lui, ni traîner dans les mêmes cercles sociaux. Je devais me préserver, préserver cette relation naissante avant qu'elle ne devienne quelque chose que ni lui ni moi ne pourrions contrôler. Kéllia était déjà à l'affût, prête à défendre ce qu'elle pensait lui appartenir. Et je ne voulais pas lui donner une raison de plus de s'en prendre à moi. Il y eut des moments où je me surpris à le chercher du regard, où mon cœur se serrait en le voyant discuter avec elle. C'était douloureux, mais je me répétais que c'était la meilleure chose à faire. Je ne pouvais pas me permettre de jouer avec le feu, de risquer de me brûler. Kéllia pouvait être impitoyable, et je ne voulais pas entrer dans un jeu de pouvoir où il n'y aurait que des perdants. Je me concentrais donc sur mes cours, sur mes projets, sur mes rêves. Chaque formule apprise, chaque concept maîtrisé, me rapprochait un peu plus de mon but. Je me plongeais dans les études avec une détermination renouvelée. C'était mon chemin, mon avenir. Et si, pour l'instant, cela signifiait renoncer à ce que je ressentais pour Peter, alors c'était un sacrifice que j'étais prête à faire. Je savais que certains me regardaient de travers, se demandant pourquoi je m'éloignais, pourquoi j'évitais Peter. Mais je ne devais rien à personne. Mes priorités étaient claires : réussir mes études, réaliser mes rêves, et surtout, ne pas me laisser distraire par des complications inutiles. Les jours passèrent puis les semaines. Je me fis plus discrète, plus effacée. Je traînais plus souvent à la bibliothèque, seule, plongée dans mes livres. Je n'allais plus aux soirées, aux sorties entre amis. J'avais choisi de me couper du monde pour mieux me concentrer. C'était difficile, mais nécessaire. Et pourtant, il y avait toujours cette petite voix, au fond de moi, qui murmurait que peut-être, tout cela aurait pu être différent. Que peut-être, si les circonstances avaient été autres, si Kéllia n'avait pas été là, Peter et moi... Non. Je chassais ces pensées. Cela ne servait à rien de rêver à des "et si". La réalité était ce qu'elle était. Peter et Kéllia étaient en couple, et je devais les laisser tranquilles. Je me concentrais sur ce que je pouvais contrôler : mon avenir. J'avais un long chemin à parcourir avant d'atteindre mes objectifs. Et je savais que ce ne serait pas facile. Mais j'étais prête à affronter tous les défis, à surmonter tous les obstacles. Parce que c'était mon rêve, mon choix. Et je n'allais pas le sacrifier pour des sentiments qui, pour l'instant, n'avaient pas leur place dans ma vie. J'ignorais ce que l'avenir me réservait, mais j'étais déterminée à suivre mon chemin, peu importe les distractions, peu importe les tentations. Parce que, au fond de moi, je savais que je pouvais réussir. Et c'était tout ce qui comptait.
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