LES DISGRACIÉS Entre Lucien Darsy et Hervé Jalibert la rivalité s’affirmait chaque jour plus nette et plus ardente : ils aimaient tous deux Geneviève Agérolle, gracieuse créature dont la beauté fière et l’âme très douce les avaient conquis dès la première rencontre. Et Geneviève était fort embarrassée. Elle le leur avait dit naïvement : — Comment voulez-vous que je me décide ? Si encore vous aviez entre vous quelque point semblable, je pourrais comparer. Mais vous différez en tout. Vous, Lucien, vous ne vivez que par le cerveau, vous Hervé, presque toutes vos heures, sont consacrées à l’exercice, au culte de la force. Qu’est-ce que j’aime le mieux, moi, de la vie intérieure et des occupations de l’esprit, ou bien de la vie active et violente ? Je ne sais pas. Et tant d’autres choses vou